Chelimo Njoroge, une mère de Nairobi, transforme son surplus de lait maternel en un geste de solidarité en le partageant avec d’autres mères dans le besoin d’après nos confreres de la BBC Afrique.
Chelimo Njoroge se souvient encore du jour où elle ne parvenait plus à fermer son congélateur. « J’avais rempli le congélateur. Puis le réfrigérateur-congélateur. Ensuite, j’ai commencé à utiliser celui de ma sœur », raconte-t-elle en riant. Cette femme de 36 ans, mère de deux enfants, a découvert qu’elle produisait bien plus de lait que nécessaire, même après avoir nourri son propre bébé.
Plutôt que de le gaspiller, Chelimo a choisi d’en faire don. Depuis près d’un an, elle partage discrètement son surplus de lait maternel avec huit autres mères de sa communauté, entre anciennes amies et nouvelles connaissances rencontrées grâce à ses vidéos TikTok. « J’ai vu ses TikToks montrant son congélateur rempli de lait et je me suis dit… waouh », confie Maryann Kibinda, l’une des bénéficiaires. « Je l’ai contactée et je lui ai dit : « Bonjour, comment allez-vous ? J’ai besoin de lait ». C’est tout. »
Le jour de son dernier don, Chelimo a remis 14 litres de lait. Une générosité d’autant plus remarquable que son parcours d’allaitement avait commencé difficilement. Son fils ne parvenait pas à téter correctement et elle a dû utiliser des téterelles pour tirer son lait. Mais rapidement, sa lactation est devenue si abondante qu’elle ne pouvait plus tout stocker.
« Au plus fort de ma production, j’avais assez de lait pour nourrir 50 bébés en néonatalogie », affirme-t-elle. Sur TikTok, elle partage depuis ses conseils sur l’allaitement, la conservation du lait et l’hygiène. Ce qui n’était au départ qu’un espace intime est aujourd’hui suivi par plus de 16 000 personnes : d’autres mères en surproduction, mais aussi des familles en détresse, à la recherche de soutien.
Le Kenya dispose d’une banque officielle de lait maternel à la maternité de Pumwani, à Nairobi. Mais celle-ci n’accepte que les dons des mères hospitalisées, destinés exclusivement aux nourrissons hospitalisés. Les mères comme Chelimo, qui allaitent chez elles, ne peuvent donc pas passer par des circuits officiels.
« Il n’existe pas de structure permettant d’accepter le lait des mères en surproduction comme moi », déplore-t-elle. Si une partie de son lait a servi à des bains adoucissants pour la peau des bébés, l’essentiel est allé à des familles qui, pour des raisons diverses, peinent à nourrir leurs enfants. Une chaîne de solidarité maternelle, née d’un excès devenu don de soi.