Les partis politiques dénoncent les restrictions sur les libertés publiques au Mali avec la décision de la junte de suspendre les activités des partis politiques et des «associations à caractère politique» jusqu’à nouvel ordre. L’analyste politique Ousmane Dao décortique cette décision.
La situation politique au Mali, marquée par la suspension des activités des partis politiques et des «associations à caractère politique», préoccupe les observateurs de la scène politique malienne. Le décret a été lu à la télévision nationale par les responsables de la junte au pouvoir, le mercredi 7 mai 2025. Il indique que cette mesure sera mise en vigueur «jusqu’à nouvel ordre pour raison d’ordre public». Interrogé par le journal «Le Soleil», Ousmane Dao, analyse politique malien, indique que ce «décret met entre parenthèses les activités des formations politiques qui ne pourront pas légalement agir jusqu’à ce que la mesure de suspension soit levée». Pourtant, il a rappelé que «la Constitution en vigueur au Mali consacre le multipartisme intégral et exclut toute modification de cette disposition. Cependant, il est loisible de comprendre qu’il s’agira non seulement de travailler sur une nouvelle charte pour les partis politiques, mais aussi de proroger, fort éventuellement, la transition de cinq ans, comme recommandé lors des dernières concertations».
Pour le politologue, cette mesure survient dans un contexte de mobilisation des partis politiques et de la société civile contre le projet de loi visant la dissolution programmée des partis politiques. À son avis, cela apparaît comme «une tentative de restriction des libertés individuelles et publiques». Cette situation, précise M. Dao, va à l’encontre des acquis démocratiques pour le peuple malien. «L’octroi d’un nouveau délai de cinq ans aux autorités en place s’accommode difficilement avec les activités des partis politiques qui sont en ordre de bataille pour le retour le plus rapide possible à l’ordre constitutionnel ; ce qui ne semble pas être de l’avis de ceux qui sont au pouvoir, excluant toute élection d’un nouveau gouvernement avec la stabilisation effective du pays, notamment sur le plan sécuritaire», a-t-il souligné.
Depuis les coups d’État (2020 et 2021), l’opposition malienne connaît une forte restriction des libertés publiques et politiques sous prétexte de lutte contre le djihadisme et la rébellion touarègue dans le nord du pays, alors que le multipartisme ainsi que les libertés d’expression et d’association sont garantis par la Constitution malienne de 1992 avant d’être réaffirmés dans la nouvelle loi fondamentale promulguée en 2023 par la junte. Rappelons que les Assises nationales avaient proposé la prorogation de la transition jusqu’à cinq ans avec Assimi Goïta à la tête de l’État. Ce qui a provoqué une levée de boucliers des organisations politiques et des droits de l’Homme maliennes contre cette décision.
Mamadou Makhfouse NGOM