Les boulangers du Sénégal traversent une période de turbulences économiques. Alors que le prix de la baguette de pain de 190 grammes est fixé à 150 F CFA par l’État, les professionnels du secteur, à travers la voix de Serigne Fallou Sarr, président du Regroupement des Boulangers du Sénégal, dénoncent l’insoutenabilité de ce tarif face à la flambée des coûts de production.
Un secteur en difficulté
Le constat dressé par Serigne Fallou Sarr est alarmant : « Nous sommes en train de vendre à perte », déplore-t-il sur les ondes de la privée RFM qui faisait un focus sur le sujet. Selon lui, les coûts des matières premières, notamment la farine, ont quasiment doublé. Parmi les autres préoccupations exprimées par les boulangers figurent les charges fiscales telles que la taxe sur le diesel, ainsi que les coûts de l’électricité, qui pèsent lourdement sur leurs activités. Cela place les boulangers dans une position de survie dit-il, générant un manque à gagner de 7 000 F CFA par sac de farine.
Cette situation est intenable et pourrait entraîner la fermeture de centaines de boulangeries dans les mois à venir si aucune mesure n’est prise par les autorités. Pour que le prix de la baguette puisse être maintenu à 150 F CFA, une réduction substantielle du coût de la farine locale est jugée impérative. Pourtant, l’Etat en juin 2024 avait opéré une baisse de 4000 Fcfa sur le sac de la farine pour les alléger les coûts. Cette mesure salutaire avait permis un consensus sur le maintien du prix de la baguette de 190 grammes à 150 Fcfa.
Conscient des efforts des autorités, Serigne Fallou Sarr précise que les boulangers soutiendront toute initiative visant à alléger le coût de la vie des Sénégalais, tout en insistant sur la nécessité d’une baisse significative du prix des intrants. Il avertit que sans un soutien gouvernemental approprié, le secteur risque de s’effondrer.
L’Ascosen pointe du doigt un problème de distribution
Du côté des associations de consommateurs, le discours est différent. Momath Cissé, vice-président de l’Association des Consommateurs du Sénégal (ASCOSEN), estime que les boulangers sont eux-mêmes responsables de la situation. « Les boulangers préfèrent vendre leurs pains aux intermédiaires à 100 Fcfa plutôt que directement aux clients », explique-t-il. Selon lui, ces livreurs imposent des marges élevées et redonnent aux boulangers les retours, ce qui réduit leurs bénéfices et renchérit le prix du pain dans les boutiques.
En outre, Momath Cissé dénonce des manquements aux normes d’hygiène : « Peu de boutiques ont mis en place des kiosques conformes, et beaucoup de boulangeries ne disposent même pas de certificats médicaux », souligne-t-il. Les boulangers ont choisi de suspendre toute action de grève pendant le mois de Ramadan, période où la demande en pain est particulièrement élevée au Sénégal.
Cheikh Gora DIOP