Le marché du travail sénégalais en 2024 fait l’objet d’une analyse approfondie dans le dernier rapport annuel publié par le Ministère du Travail, de l’Emploi et des Relations avec les Institutions.
Ce document dresse un état des lieux détaillé de l’emploi, des dynamiques entrepreneuriales ainsi que des activités de contrôle menées par l’inspection du travail au cours de l’année.
Des créations d’établissements en léger recul, mais un solde positif
En 2024, 1 928 établissements ont été ouverts, soit une baisse de 4 % par rapport à 2023. Parmi les 1 928 entreprises ouvertes en 2024, le commerce arrive en tête avec 30 % des créations, suivi par le secteur de la construction qui représente 14 % des nouveaux établissements. En parallèle, 155 fermetures ont été enregistrées, en hausse de 26 %, traduisant une certaine fragilité dans le tissu entrepreneurial. Le solde reste néanmoins positif, avec 1 773 établissements supplémentaires, signe d’un environnement globalement favorable à la création d’activités, malgré une conjoncture économique encore tendue.
Le pays a enregistré 10 386 créations d’emplois, soit une baisse notable de 18 % par rapport à l’année précédente. Toutefois, les pertes d’emplois (880) restant relativement limitées, le solde net reste positif, avec 9 506 emplois créés. Cela traduit un marché de l’emploi qui continue de croître, mais à un rythme plus modéré.
Une hausse marquée des contrats de travail, avec une prédominance des CDD
Un total de 77 870 contrats de travail a été enregistré, représentant une progression de 27 % par rapport à 2023. Cependant, 62 % de ces contrats sont à durée déterminée (CDD), contre 23 % en contrats à durée indéterminée (CDI), ce qui pose la question de la précarité de l’emploi. Par ailleurs, les disparités de genre persistent : 72,54 % des emplois sont occupés par des hommes, contre 27,46 % par des femmes.
Une vigilance accrue sur les obligations sociales
L’année a été marquée par une intensification des contrôles. 5 174 établissements ont été inspectés, permettant de relever 11 810 infractions. Parmi les principaux manquements figurent : non-affiliation à l’IPM (26,42 %), non-affiliation à l’IPRES (19,95 %), non-affiliation à la CSS (19,44 %). Ces chiffres révèlent un défaut important de respect des obligations sociales par de nombreux employeurs, avec des conséquences directes sur la sécurité des travailleurs.
Les conflits et les accidents en mutation
En matière de contentieux, 3 960 travailleurs ont été impliqués dans des conflits individuels, soit une hausse de 19,35 %, signe de tensions persistantes dans les relations de travail. En revanche, les accidents du travail et maladies professionnelles déclarés ont chuté de 34,97 %, à 975 cas, ce qui peut traduire une amélioration des conditions de sécurité ou un moindre signalement.
Progression de la couverture sociale
Bonne nouvelle du côté de l’IPRES : 40 300 nouveaux adhérents ont rejoint le régime de retraite, portant le total à 577 171 participants. Ce chiffre témoigne d’un élargissement progressif de la couverture sociale, malgré les défis en matière d’affiliation.
Le marché du travail sénégalais en 2024 montre des signes de vitalité, avec un solde positif d’emplois et un tissu d’entreprises en croissance. Toutefois, la précarité de l’emploi, les infractions sociales fréquentes et les inégalités de genre rappellent la nécessité de poursuivre les réformes en profondeur. La consolidation des acquis passera par une meilleure régulation, une promotion accrue du travail décent, et un accompagnement plus fort des entreprises dans leur formalisation.
Cheikh Gora DIOP