Sur la route des Niayes, entre Thiaroye et Yeumbeul, les clignotants sont au rouge. Cet axe routier donne toutes les peines du monde aux chauffeurs et aux usagers des transports qui l’empruntent. En cette saison des pluies, les eaux stagnent de plus en plus et accélèrent la dégradation de cette voie.
Pendant la saison des pluies, circuler sur certaines routes est synonyme d’un parcours du combattant. Englouties par les eaux, les voies deviennent impraticables et donnent du fil à retordre aux passants et aux riverains. Dans la banlieue, en ces temps de plein hivernage marqué par de fortes précipitations, la circulation sur les voies urbaines fait défaut.
Une situation qui s’explique par l’état de délabrement des routes, l’ensablement des voiries et les nids-de-poule qui deviennent des points de stagnation d’eau. La route des Niayes qui part de Pikine en passant par Thiaroye, Yeumbeul puis Malika jusqu’à Keur Massar, demeure une identité remarquable du mauvais état des routes dans certaines zones de la banlieue de Dakar.
Sur cet axe, de Keur Massar à Yeumbeul Nord, des travaux d’extension de la route et la pose de canalisations ont accordé un répit aux populations. Cependant, ces travaux qui devaient aller jusqu’à Pikine ont connu un arrêt depuis belle lurette. Conséquence : de Yeumbeul Sud en traversant Thiaroye jusqu’à une partie de Pikine, la route est dans un état de délabrement avancé.
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Mamadou Lamine Diop, un chauffeur de taxi septuagénaire, témoigne que la dernière fois que ce tronçon a été retouché, c’était en 1996. « J’ai débuté en tant que taximan ici à Yeumbeul en 1986, et je me rappelle bien en 1996 quand les techniciens étaient venus ici. 30 ans après, il n’y a jamais eu de travaux de réhabilitation sur cette voie », se souvient le vieux conducteur.
Aujourd’hui, cette route, très fréquentée par les véhicules de transport en commun, les particuliers et les charrettes, inflige un véritable calvaire aux populations. Pour le vieux chauffeur, les voitures tombent souvent en panne à cause de la mauvaise qualité de la route. On le trouve chez le mécanicien installé à quelques mètres pour de petits réglages.
« Vous voyez, je viens fréquemment chez le mécanicien pour réparer ma voiture. Certains organes de la voiture ne tiennent plus et l’argent que je gagne, je vais pratiquement le dépenser pour la réparation. Les organes tels que les amortisseurs, les cardans ne peuvent pas supporter dans le long terme les dégâts de cette route pleine de nids-de-poule et de fissures. Parfois même, quand je pense à cette situation, je perds la motivation à prendre le volant, car je sais qu’une journée pénible m’attend », souligne-t-il.
Pour corroborer les dires du vieux chauffeur, on note que dans cette partie entre Yeumbeul Sud et Thiaroye, un embouteillage se dessine, car les nids-de-poule ralentissent la circulation. Sous une chaleur suffocante, la chaussée dégradée s’étire comme un piège mécanique. Crevassée, parsemée de nids-de-poule béants et de bosses, cette route mal entretenue martyrise les mécaniques.
Les suspensions gémissent, les amortisseurs encaissent des chocs violents, les pneus s’usent prématurément et les rotules se déforment au fil des secousses. À chaque cahot, c’est la direction, le châssis et même le moteur qui subissent une fatigue silencieuse, réduisant peu à peu la durée de vie des voitures. Sur cet axe, chaque trajet devient une épreuve qui altère, pièce après pièce, les organes vitaux des voitures.
Un tronçon en quête d’une remise à neuf
En outre, les habitants de cette localité vivent une inquiétude grandissante. Les eaux de pluie trouvent un point d’ancrage sur cette route, arrivant jusqu’à occuper les trottoirs. Du fait de l’ensablement de la voirie, les eaux stagnent facilement. Pis, par le manque de canalisation, la situation devient chaotique. En pleine activité dans son atelier de menuiserie de bois, Pape Macodé Wade déplore le manque de réaction des autorités pour trouver des solutions.
Son atelier, se trouvant tout près de la route, lui offre une vue directe sur les aventures imposées par l’état de la route. Les nids-de-poule, les immondices et les eaux usées font que les passants marchent le long des cantines installées à côté du trottoir pour éviter d’être salis par les éclaboussures provoquées par les véhicules.
Pris au piège par les eaux stagnantes, l’on est obligé de contourner partout pour accéder à l’atelier du menuisier. Ce dernier pense que pour une meilleure solution, cette route doit être transformée en deux voies en y incluant un bon système de canalisation.
« Ici, notre problème reste la dégradation de cette route. C’est une vieille doléance qui persiste depuis des décennies sans que la moindre solution ne soit trouvée. En cette période d’hivernage, la situation devient encore plus grave, allant jusqu’à nous empêcher de travailler convenablement. Néanmoins, par défaut de canalisation, les habitants sont obligés de verser les eaux usées sur la route, ce qui aggrave encore la situation. Depuis des années, nous attendons un grand changement sur cette voie qui, une fois réhabilitée, donnera une bouffée d’oxygène aux populations », explique le menuisier.
Matar Thioune, habitant de Yeumbeul, est du même avis. Toutefois, il exhorte les autorités municipales à mener des opérations de nettoyage pour désensabler la route.
« C’est le calvaire en cette période d’hivernage. On peine à vaquer librement à nos occupations. Souvent, les chauffeurs de taxi et d’autres particuliers refusent de passer par ici parce qu’ils savent que c’est un trajet difficile », renseigne-t-il.
L’hivernage ne fait que mettre à nu une vieille réalité : tant que les routes seront délaissées, la banlieue restera embourbée dans ses difficultés. À Thiaroye comme à Yeumbeul, la pluie passera, mais la galère persistera.
Par Bada MBATHIE