À Dakar, une étudiante a récemment confié à ses amis avoir tenté à plusieurs reprises de mettre fin à ses jours. Désemparée, elle en impute la responsabilité à ses parents, en particulier à sa mère, souvent absente. Elle est toujours entre deux avions.
C’est sur un ton empreint de tristesse que la jeune fille a décidé d’ouvrir son cœur et de se libérer d’un lourd fardeau : « J’ai tenté de me suicider à plusieurs reprises. Il ne faut pas me juger, priez pour moi… » Son message, bouleversant, a plongé ses destinataires dans une profonde inquiétude. Heureusement, elle est encore en vie. Son long texte déchire le cœur. L’histoire de cette jeune fille est la face visible de l’iceberg.
Elle dit avoir traversé une longue période de désespoir, mais elle n’est pas restée insensible face au flot de messages de soutien de ses amies. Ce n’est pas la première fois, dit-elle, qu’elle pense au suicide. Son entourage, pourtant proche, n’a rien vu venir. Personne n’a su percevoir son mal-être profond, ni déceler les signaux de détresse qu’elle envoyait parfois à demi-mot. Notre société, tenaillée par la cherté de la vie et la course à la réussite sociale, devient de moins en moins attentive. Elle ne mesure pas toujours les batailles silencieuses que livrent certains adolescents au quotidien.
Pour beaucoup de parents, le confort matériel suffit à créer les conditions du bonheur ; pour d’autres, parvenir à subvenir aux besoins primaires est déjà salutaire. Quand l’irréparable se produit, l’on s’émeut, l’on débat avant de sombrer dans l’amnésie. Cette jeune fille pointe un doigt accusateur sur sa maman, qui ne lui accorderait pas l’attention nécessaire. Toujours entre deux avions, celle-ci est tenue de faire face à ses responsabilités familiales et professionnelles.
Il arrive que des mères de famille, bien que professionnellement accomplies, ne parviennent pas à trouver l’équilibre. Elles ne s’imaginent pas toujours, à l’image des papas, que derrière le confort apparent, leur enfant a surtout besoin de leur présence, de leur attention et de leur écoute. Et que souvent, il est habité par des idées d’autodestruction. Comme cette étudiante, beaucoup d’adolescents vivent isolés derrière leurs écrans. Leurs parents ne se rendent pas compte qu’ils traversent mille tempêtes intérieures. Faute de résilience mentale et morale, ces jeunes peinent à affronter les épreuves de la vie et parfois ils finissent par développer des comportements déviants.
Quand d’aucuns sont prompts à tirer sur les femmes, il y a lieu de reconnaitre que bon nombre de mères de familles, aux prises à la charge mentale, subissent un épuisement psychologique. Elles manquent de moments de répit et même de temps personnel. Dans leurs écrits, des sociologues et psychologues établissent souvent un lien entre le climat familial, la qualité des relations parents-enfants et les conduites suicidaires chez les adolescents.
Le déficit de communication et d’attention conduit souvent à l’irréparable. Ils indiquent aussi que la négligence parentale reste un facteur de risque majeur de suicide. Malgré leur présence sur plusieurs fronts, des études montrent que les mères continuent d’assurer la majorité des soins de base. Elles sont nombreuses à s’organiser pour jouer pleinement leurs rôles de mère, d’épouse et de travailleuse. Certaines ont réussi le pari, au moment où d’autres vivent dans le désarroi, victimes d’un monde exigeant, épuisant et parfois injuste…
matel.bocoum@lesoleil.sn