L’électrification de Marakissa (un village de Sédhiou) constitue une révolution dans le village. Les habitants de cette bourgade qui ont longtemps émis ce désir continuent d’exprimer leur joie de voir Marakissa faire partie des 294 localités électrifiées de la région de Sédhiou. Toutefois, elles patientent pour le branchement des ménages au réseau électrique.
SÉDHIOU – Le jeudi 15 mai 2025 fut un jour mémorable pour les habitants de Marakissa. Ce jour-là, ce village de la commune de Djibabouya, situé dans le département de Sédhiou venait de sortir des ténèbres, grâce à la mise en service du réseau électrique. « Quand Birame Soulèye Diop, le ministre de l’Énergie, du Pétrole et des Mines a allumé symboliquement le courant, je me suis dit, notre souci de sécurité est terminé. Aujourd’hui, nous n’avons rien à envier à la capitale en matière d’éclairage sur la voie publique », se souvient Faye Diémé, un notable du village de Marakissa.
Trouvé en pleine concertation avec le chef de village, le sexagénaire ne tarit pas d’éloges à l’endroit des services de l’État qui se sont engagés pour réaliser ce vieux rêve de tout Marakissa : l’électrification. « Vous ne pouvez même pas mesurer notre joie », renchérit de son côté Moustapha Diémé, chef du village. L’électrification de Marakissa s’inscrit dans le cadre du Programme d’urgence d’électrification rurale (Puelec). Une intervention composée de projet structurant qui « vise à électrifier plus de 75.000 foyers et à améliorer les infrastructures électriques dans les zones rurales et périurbaines », a expliqué Birame Soulèye Diop, quelques mois avant.
Juste avant la mise en service des installations électriques, le village de Marakissa qui compte environ 3000 habitants utilisait l’énergie solaire. L’ensemble des foyers devait débourser environ 500.000 FCfa pour réparer le réseau solaire souvent défectueux. « De plus, les panneaux étaient purement et simplement réservés à alimenter les lampes internes de nos maisons », témoigne Moustapha Diémé devant quelques jeunes du village dont Insa Diémé tout juste revenu des champs. Un coupe-coupe à la main, il avait fait un détour chez le chef du village lorsqu’il a entendu parler de l’électricité. L’homme âgé d’une quarantaine d’années reconnaît l’impact positif de l’électrification de son village. « Les voleurs ne nous fatiguent plus. Ils n’osent plus s’aventurer dans le village pour dérober notre cheptel », exulte Insa Diémé.
Une attente pressante dans les foyers Une des voix féminines les plus écoutées du village, Ndèye Mariétou Diémé admet le changement dans sa localité. « Je le sens et je le vis », se réjouit-elle. Dégourdie et engagée à défendre les intérêts de ce terroir, elle avoue : « Nous n’avons plus peur de nous déplacer à l’aube pour aller vendre nos mangues ou vaquer à nos occupations ». En cette période d’hivernage, les filles et les fils du village retournent petit à petit au bercail. La majorité sera là, à Marakissa au mois d’août, des moments d’effervescence, souffle-t-on. Football, carnaval, danse du « Kankourang », etc ; des activités qui sont en ligne de mire. Ainsi, chacun, à l’instar d’Abdou Karim Diémé, carreleur de profession fait de son mieux pour terminer ses activités champêtres.
Dynamique au sein de la jeunesse, depuis son retour dans le village, Abdou Karim enchaîne ses journées à labourer le domaine familial pour finir à temps. Toutefois, avec la lumière qu’il a découverte dans son village, il ne cache pas son enthousiasme. « Nous avons beaucoup attendu ce courant, aujourd’hui nous vivons comme toutes les autres localités », applaudit-il. Plus de trois mois après le passage du ministre de l’Énergie et de sa délégation à Marakissa, seule la voie principale est encore éclairée. Cette étape a permis de résoudre les inquiétudes sécuritaires. Mais il reste à connecter les câbles dans les foyers. « C’est une urgence d’avoir le courant à la maison, surtout dans ce contexte d’hivernage où on a besoin de l’électricité. Cela nous épargnera de parcourir des kilomètres jusqu’à Marsassoum rien que pour charger nos téléphones », insiste Insa Diémé.
Pour sa part, Faye Diémé affirme qu’avec le courant dans les ménages, les jeunes du village vont forcément se lancer dans l’entreprenariat. Ces derniers insiste-t-il, attendent le basculement des câbles dans les foyers pour démarrer. « En tout cas, s’il y a du courant dans les maisons, vous verrez que le village va davantage se développer parce que nos enfants n’auront plus besoin de s’implanter à Marsassoum ou à Bignona pour mener leurs activités », certifie M Diémé. À Marakissa, la longue patience apparaît sur les initiatives des habitants. Ndèye Mariétou Diémé qui s’est payé un réfrigérateur attend encore que son foyer soit alimenté pour démarrer son petit commerce. « C’est vrai qu’il y a l’éclairage public qui marche à merveille, mais au niveau de nos maisons nous ne sommes pas encore connectés. C’est comme si on nous donnait du riz sans sauce », lâche -t-elle dans un ton ironique. Un peu plus loin, du premier hameau, se situe la petite boutique de Salim Souaré, un homme à la chevelure dépeignée.
Calme et attentif, le visage couvert de sueur, il rassemble des marchandises laissées en plein air, sous un ciel peu clément, pleuvant par intermittence. Dans un coin de sa boutique, son réfrigérateur bien couvert attend la marche du compteur électrique installé tout juste à l’entrée de son petit commerce. Pour Salim, l’électrification est une révolution dans le village. C’est la concrétisation dit-il, des souhaits et prières des marabouts de ce foyer religieux. « Ma boutique va aussi changer, car je vais dans les prochains jours vendre des produits frais », espère Salim qui ne veut plus que la boisson fraîche continue d’être un luxe pour les populations.
Par Jonas Souloubany BASSENE