Les cas de viols défraient la chronique depuis quelque temps. Loin d’être un phénomène nouveau, le sociologue Souleymane Lô indique que plusieurs facteurs peuvent être à l’origine de ce mal.
Le sociologue Souleymane Lô explique que bien vrai que les violences sexuelles aient toujours existé, leur augmentation et leur médiatisation récente soulèvent des questions sur les causes profondes de cette tragédie sociale. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce fait. « La recrudescence des viols au Sénégal est le résultat d’un ensemble de facteurs imbriqués : des normes culturelles oppressives, des facteurs psychologiques, des inégalités économiques », a débuté M. Lô. Les premières causes peuvent être d’ordre économique. Selon les explications du sociologue, les inégalités économiques exposent davantage les femmes et les filles des milieux défavorisés aux violences sexuelles.
« Les conditions de vie précaires, notamment dans les zones urbaines et périurbaines, favorisent les abus. C’est souvent le cas avec les jeunes filles employées comme domestiques ou travaillant dans des conditions informelles qui sont souvent vulnérables aux violences de leurs employeurs ou collègues », argumente-il. « Les changements rapides au sein de la société sénégalaise, notamment en termes d’urbanisation et de modernisation, entraînent parfois une perte de valeurs morales notamment avec l’accès facile à des contenus pornographiques violents qui influence négativement certains comportements, en particulier chez les jeunes », poursuit-il. Il souligne également l’impact des facteurs culturels et sociaux. « La société sénégalaise reste marquée par des normes patriarcales où les hommes détiennent souvent une position dominante, reléguant les femmes à une position subordonnée. Cette configuration sociale renforce les comportements de domination masculine, incluant les violences sexuelles qui s’en justifient », avance le sociologue.
Et d’ajouter : « Le viol dans certains cas fait partie des formes de punition sociale à l’encontre de la femme qui transgresse certaines règles notamment celle relatives à ses déplacements à des moments où elle est censée être à côté de la maman ». Le manque de prise en charge psychologique peut également être un facteur expliquant la recrudescence des viols d’après M. Lo. « Les auteurs de violences sexuelles ont parfois eux-mêmes été victimes de violences ou ont grandi dans des environnements toxiques, reproduisant ainsi des comportements appris.
Ainsi, le manque de prise en charge des troubles psychologiques peut contribuer également à l’augmentation des comportements déviants », a-t-il fait savoir. Pour y remédier, le sociologue préconise une approche multidimensionnelle. « Cela inclut l’éducation à la sexualité, la réforme du système judiciaire, l’autonomisation des femmes et la sensibilisation communautaire afin de briser les tabous et de protéger les victimes. La lutte contre ce fléau nécessite une mobilisation collective de tous les acteurs de la société », conclut-il.
Arame NDIAYE