À Genève, la communauté sénégalaise s’est retrouvée à l’Espace de quartier Le 99 pour célébrer la Tabaski dans une ambiance chaleureuse et festive. Mets traditionnels, boubous colorés et éclats de rire étaient au rendez-vous et le tout saupoudré d’une bonne dose de nostalgie du pays.
Le climat est d’humeur capricieuse en cette matinée de l’Eid. De Bienne à Neuchâtel, en passant par Renens, le ciel est tantôt ensoleillé, tantôt nuageux. À Genève, le ciel reste couvert. Le soleil semble jouer à cache-cache en ce jour de célébration. Ici, il est difficile de ressentir l’ambiance de la fête de la Tabaski. À la gare de Genève, le goût de la célébration n’est pas au rendez-vous. Il faut descendre plus loin, jusqu’à la rue de Lyon, à l’Espace de quartier Le 99, pour sentir l’esprit de la fête.
C’est dans une grande salle que la Tabaski a été célébrée ce samedi 7 juin 2025. De grandes tables sont disposées dans la pièce. L’espace est chaleureux et convivial, bien loin de la grisaille extérieure. Ça discute et rigole à chaque coin et recoin. Un grand buffet accueille les invités dès l’entrée, juste à gauche. Sur deux tables sont disposées des boissons, et sur de grandes barquettes : du riz, de la viande, de la sauce, des crudités et du ‘thiakry’ en guise de dessert. Drapés dans de somptueux boubous traditionnels, les Sénégalais de Genève ont communié et festoyé dans une ambiance joyeuse.
Festoyer avant tout !
Coiffure impeccable, maquillage discret, chaussures à talons : Fatoumata Diallo n’a rien laissé au hasard pour la Tabaski. Habillée d’une robe en brocart, la jeune femme n’a pas hésité à se faire envoyer par GP sa plus belle tenue. Pour elle, à Dakar comme à Genève, il est essentiel de célébrer la Tabaski et cela passe par une mise soignée.
« Ce sont des moments agréables, et ça fait plaisir de la fêter avec la communauté sénégalaise », confie, tout sourire, cette jeune femme de 21 ans.
Mais cela ne l’empêche pas de penser au pays. Accompagnée d’une de ses connaissances, elles prennent des photos à partager avec la famille.
« Je suis là depuis deux ans, cependant il m’est difficile de m’habituer à célébrer la Tabaski à Genève. Il manque ce petit truc qui rend la fête inoubliable », relativise Fatoumata Diallo.
Fatima Ndiaye, elle aussi, se réjouit de festoyer avec ses compatriotes. Mère d’un petit garçon, elle a l’habitude de venir communier avec la communauté sénégalaise. Cette assistante comptable à Genève voit en ces occasions une manière de se rapprocher de la célébration telle qu’elle est vécue au pays, et de passer du bon temps.
« C’est un plaisir, parce que la Tabaski est spéciale au Sénégal. Au moins, quand on est là, ça nous permet de nous dire que nous aussi on la fête, même si c’est avec quelques différences. Mais c’est agréable de se retrouver tous ensemble », dit-elle, le sourire aux lèvres.
La nostalgie du pays
La Tabaski est un véritable rituel. Entre l’immolation du mouton, le dépeçage, la grillade, chaque moment est unique. D’un air évasif, Khadija pense à ces instants qu’elle partageait avec sa belle-famille. En dépit des années passées à Genève, celle qui travaille dans le domaine médical peine à se faire à une célébration loin de son pays d’origine.
« Ce sont vraiment les moments avec la famille proche qui nous manquent le plus. Les fêtes sont des occasions pour se retrouver tous ensemble, et ce n’est jamais évident. Il y a des souvenirs qui reviennent comme un boomerang », dit-elle avec un sourire amer au coin des lèvres.
Pape Matar Kébé en est à sa 23e année à Genève. L’enseignant a « loupé plusieurs Tabaski », mais le goût amer est le même chaque année.
« Nous avons raté plusieurs festivités au Sénégal. Cependant, la Tabaski reste particulièrement marquante. Les convivialités qu’on a l’habitude d’y vivre ne sont plus les mêmes », avoue le Sénégalais, drapé dans un bazin beige, son chapelet bien en évidence. Mais pour lui, la célébration garde tout son sens :
« Il y a peut-être les parents qui manquent, mais là, actuellement, disons que nous la célébrons, nous la vivons d’une manière peut-être différente, mais toujours dans la ferveur », relativise-t-il, tout en saluant l’initiative des frères Diouf.
Chaque année, les jumeaux Karim et Seydina Diouf organisent ces moments de retrouvailles entre Sénégalais.
« Nous avons mis en place ces initiatives depuis plus d’une vingtaine d’années », confie Seydina Diouf.
L’ingénieur en hydraulique estime qu’il est important de se réunir lors de ces occasions pour communier et échanger autour de ce qu’ils ont en commun : le Sénégal.
« L’objectif est d’apporter de la convivialité, de la teranga (hospitalité) à ces âmes qui n’ont pas l’occasion de se réunir en famille », conclut-il. Une manière d’appeler à la solidarité et à l’unité en ce jour de fête.
Arame NDIAYE (envoyée spéciale à Genève)