L’œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba constitue un patrimoine spirituel et intellectuel d’une richesse inestimable. La traduction et la diffusion des œuvres de cet homme multidimensionnel et à la piété légendaire contribuent au renforcement des valeurs fondamentales comme le respect, l’amour du travail et la non-violence.
Tous les écrits de Cheikh Ahmadou Bamba sont en arabe. Mais aujourd’hui, ils sont traduits et publiés dans presque toutes les langues vivantes à l’échelle internationale. Et, dans un monde en crise où la montée des tensions et la perte de repères éthiques semblent faire la loi, ces écrits du fondateur du mouridisme pourraient devenir salvateurs. Leur traduction et leur diffusion dans le monde éclairent le chemin des gens vers un futur plus juste et plus pacifique.
Ce, d’autant plus que le message du guide religieux, axé sur la paix, la spiritualité, le travail, le pardon, la patience et la transformation intérieure, a le potentiel de désamorcer bien des tensions et d’ouvrir la voie à une humanité plus fraternelle.
Selon Mouhameth Galaye Ndiaye, théologien et philosophe, la traduction et la diffusion des écrits de Cheikh Ahmadou Bamba à l’échelle internationale revêtent une importance stratégique et spirituelle majeure à l’heure où le monde est en quête de repères éthiques, de paix durable et de dialogue interculturel sincère. Pour lui, traduire et diffuser les écrits de Cheikh Ahmadou Bamba, c’est ouvrir une voie vers un monde « plus juste, plus spirituel et plus solidaire ».
C’est également, poursuit-il, permettre à l’humanité de redécouvrir, dans l’Islam africain, une tradition intellectuelle et mystique d’une puissance méconnue, profondément enracinée dans les valeurs de paix, d’amour du travail, de respect de l’autre et de service désintéressé.
À l’en croire, l’œuvre du fondateur du mouridisme représente un patrimoine intellectuel et spirituel d’une richesse exceptionnelle, capable d’enrichir aussi bien la pensée islamique que l’humanisme mondial. « L’un des premiers atouts de cette diffusion est qu’elle contribue à consolider les valeurs de paix, de tolérance et de non-violence à l’échelle planétaire », a-t-il expliqué.
Poursuivant son propos, il rappelle que Cheikh Ahmadou Bamba est, à juste titre, considéré comme un apôtre de la non-violence, bien avant des figures mondialement reconnues telles que Gandhi ou Martin Luther King. « Sa résistance à la colonisation française s’est toujours inscrite dans une logique spirituelle de patience, de pardon et de réforme intérieure, et non dans la confrontation armée. Cet héritage, s’il était mieux connu, pourrait nourrir de nouvelles réflexions sur la résolution des conflits et la transformation sociale non violente », affirme-t-il.
Mieux, il estime que la diffusion internationale de l’œuvre du guide spirituel permettrait l’introduction dans les universités du monde d’une pensée islamique enracinée, rigoureuse et ouverte. Car, d’après lui, Cheikh Ahmadou Bamba ne se contente pas de transmettre des règles religieuses. Il propose une vision intégrale de l’homme et de la société, fondée sur la discipline intérieure, la recherche du savoir, la justice, et surtout le service désintéressé.
« La traduction de l’œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba est d’autant plus justifiée que ce dernier est sans conteste l’un des auteurs les plus prolifiques de l’histoire de l’Islam. Son œuvre, riche de plusieurs dizaines de milliers de vers, couvre les domaines du droit, de la spiritualité, de l’éthique, de l’histoire, de l’éducation et de la métaphysique », dit-il.
En effet, c’est par la non-violence que Cheikh Ahmadou a choisi de diffuser l’Islam, de résister à la colonisation, mais de protéger son peuple contre les effets dévastateurs de la colonisation et de l’acculturation. C’est cette approche qu’il a proposée pour l’accomplissement du changement social.
Dans sa logique, il ne croyait pas en une réforme de type « top-down », dans laquelle les hommes de pouvoir, laïcs ou religieux, auraient l’initiative. Mais selon lui, pour obtenir un impact durable, il faut que les graines du changement soient semées dans les cœurs et les âmes.
Le type d’éducation qu’il préconisait concernait autant le corps que l’esprit et l’âme. Ainsi, dira Dr Moustapha Diop : « sa philosophie de paix et de pardon peut inspirer le monde, tandis que ses écrits poétiques, appelés “xassaïdes”, demeurent des sources d’inspiration spirituelle et culturelle. Imaginez que le monde se conforme à cet enseignement, que deviendraient les conflits et la militarisation ? », s’interroge-t-il avant de rappeler que Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké a révélé l’originalité de son approche par l’importance qu’il donne à l’éducation spirituelle qui n’est rien d’autre que la méthode de purification de l’égo.
Cet exercice autour de l’égo, cœur de l’enseignement de Cheikh Ahmadou Bamba, constitue, selon de nombreux spécialistes, un apport majeur au dialogue spirituel mondial. En mettant l’accent sur la transformation intérieure avant toute action extérieure, le fondateur du mouridisme propose un modèle universel applicable à toutes les sociétés.
Son insistance sur l’humilité, la persévérance et la patience dépasse les clivages culturels et religieux. Aujourd’hui, de Dakar à New York, de Touba à Paris, ses « xassaïdes » continuent d’inspirer non seulement les disciples mourides, mais aussi des chercheurs, écrivains et intellectuels curieux de comprendre cette vision pacifique de la réforme sociale.
Plusieurs universités étrangères, notamment aux États-Unis et en Europe, intègrent désormais l’étude des écrits de Cheikh Ahmadou Bamba dans leurs programmes consacrés aux spiritualités africaines et au soufisme.
Aliou DIOUF