Le «Sacuur», c’est plus qu’un statut symbolique. Sa fonction est sacerdotale et temporelle. Il n’a pas de salaire, mais une dîme maritime appelée « saxsaxal » qui lui est versée. Ainsi, lorsque les pêcheurs vont en mer et ramènent de très belles prises, ils lui réservent une portion qu’il redistribue à l’ensemble des ayants droit. « Quand la pêche est bonne, le Sacuur reçoit une part qu’il redistribue. C’était bien organisé, bien structuré », fait savoir Pierre Ndiaye. Parfois, indique-t-il, il arrive que des gens viennent solliciter des prières avant d’aller en mer. Ainsi, l’élu procède à un rite que l’on fait quand le poisson se fait rare. « Le Sacuur va alors envoyer quelqu’un chercher une carpe. Le poisson est cuisiné et on prépare du couscous que la Linguère va amener en haute mer, mais avant de partir, le Sacuur formule des prières pour que le poisson soit fructifié. Ce n’est pas tout le temps que ça arrive, mais quand Dieu accepte les prières, il y a du poisson à volonté », explique Blaise Biram Ndiaye, non sans préciser que le Sacuur est toujours tenu de faire cette prière. C’est pour cette raison, fait-il savoir, que les forces cosmiques intègrent la personne de l’élu pour l’aider à rendre la mer poissonneuse, à assurer la sécurité des marins, et à faire en sorte que la terre ferme soit bénéfique à travers des récoltes abondantes.
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Antoine Diogoy Samal Thiakane Ndiaye a donc pour mission de veiller à ce que la mer soit poissonneuse et pacifique, pour permettre une exploitation optimale et durable de ses richesses au profit de la société, d’assurer la protection des populations en mer. Pendant son règne, il est toujours vêtu de blanc et ne doit plus toucher la mer. Il ne doit pas non plus y entrer et ses habits ne doivent pas être lavés avec l’eau de mer. Ainsi le veut la tradition. L’élu pourra cependant circuler dans le village et veiller, de jour comme de nuit, sur le bien de la collectivité, sa sécurité, sur l’abondance maritime.
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« Le Sacuur a toujours le chapeau avec lui, et on ne lave pas avec du savon, les habits avec lesquels il a été intronisé. Il ne rentre pas dans la mer, sauf quand il y a abondance de poissons qui encombrent le rivage. Quand le poisson commence à pourrir et à sentir mauvais, on s’organise pour que le Sacuur descende en mer et quand il entre dans l’eau, le poisson partait », indique Pierre Ndiaye. C’était un grand honneur d’être intronisé Sacuur. Jadis, rappelle Blaise Biram Ndiaye, quand quelqu’un était intronisé, les poissons venaient d’eux-mêmes sur le rivage et les populations les ramassaient sans difficultés. De même, précise-t-il, tous ceux qui ont été élus ont fait leurs preuves. « À l’époque, c’était un très grand honneur d’être roi de la mer. Actuellement, on est en train de négliger cette fonction », déplore-t-il.
Samba Oumar FALL
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