À la frontière entre Yarakh et les Hlm, cohabitent de nombreux garages où sont stockés des matériaux publics et des entreprises individuelles. Cette zone apparait comme un angle mort urbain où l’insécurité et la précarité prospèrent. Jouxtant l’ancienne «Cité Imbécile», aujourd’hui déguerpie, et se prolongeant jusqu’à la proximité de la Pharmacie nationale d’approvisionnement (Pna) et des locaux du quotidien national «Le Soleil», ces garages enclavés sont sources d’insécurité pour les habitants de Yarakh et lieux de nombreux forfaits de quelques délinquants.
On se souvient de la grande vague de déguerpissement menée il y a quelques années par les autorités dans cet endroit de la capitale sénégalaise au nom assez singulier : « Cité imbécile ». C’est une zone qui semble être tombée dans l’oubli. Isolée et difficile d’accès tout en demeurant méconnue du grand public, la «Cité Imbécile» symbolisait tout ce qu’il peut y avoir d’angles morts, de zones maudites dans nos villes. Des bouts de terres inhabités où s’amoncellent des tas d’ordures et où des cochers, venus en ville sous l’effet de l’exode rural, finissent par s’établir avec leurs chevaux.
Ces angles morts urbains restent nombreux dans la capitale sénégalaise comme celui qui se situe derrière la Pharmacie nationale d’approvisionnement (Pna) et le quotidien national «Le Soleil». Ils apparaissent comme des aires délabrées transformés en ateliers de mécaniciens ou d’ouvriers de toutes sortes. De fait, si de l’ex-«Cité Imbécile» qui se situe non loin, il ne reste que des traces et le «capharnaüm d’une ruralité prenant possession de la ville», les garages publics et privés ainsi que les ateliers d’ouvriers attenant font toujours de cette zone à la frontière des quartiers Yarakh et Hlm à côté de la voie ferrée menant vers Colobane, un vrai refuge pour clochards, mendiants et étrangers indigents.
Avatar de la Cité Imbécile L’endroit donne à voir que des taudis, des habitats improvisés à ciel ouvert et des gueux malpropres. Aucun bus Tata n’y circule. Même les cars rapides, ces emblématiques véhicules de transport en commun qui desservent les quartiers populaires de Dakar, n’y accèdent. Pourtant plusieurs services techniques publics et des entreprises privées y ont à proximité leur siège, notamment leur garage pour matériels. On peut retrouver derrière la Pharmacie nationale d’approvisionnement (Pna), le garage du ministère de la Santé, etc. Un peu plus loin sur la route du quotidien national «Le Soleil», se trouve le garage de la Police nationale qui se sépare de quelques mètres du Laboratoire national de référence du bâtiment et des travaux publics (Lnr-btp).
Les ateliers et les commerces y fleurissent. Dans cet endroit qui se signale davantage par ses garages de mécaniciens, de bons pères de famille, des vendeurs de ferraille, des mécaniciens, des menuisiers mènent leurs activités côte à côte, à l’intérieur des cloaques où vivent des familles démunies. Pourtant, si le lieu semble être un simple espace de réparation d’engins automobiles, son enclavement fait le lit de l’insécurité croissante qui suscite l’angoisse chez les habitants de Yarakh. Il est 11 heures en ce vendredi 21 février. C’est le branle-bas dans les ruelles désordonnées du garage de mécaniciens. La rue poussiéreuse et non pavée qui y mène est parsemée de rangées de véhicules, dont beaucoup sont à l’état d’épaves ou abandonnés.
L’insalubrité n’empêche pas des gens de prendre leur petit-déjeuner dans des gargotes en plein air. Des alcooliques, totalement dans les vapes, titubent sous le soleil chaud que les conducteurs de pousse-pousse de ferraille esquivent pour se frayer un chemin. «Vol à la Pna» Babacar Faye est gérant d’une boutique située à proximité de l’ancienne «Cité Imbécile». Il concède avoir pris le risque de s’installer dans ces lieux rocambolesques. «Gars yi dagnou indice fii» (Les gens sont bizarres ici), dit-il, souriant. Selon lui, ce sont les anciens habitants de la Cité-Imbécile qui se sont installés ici. «Les jeunes ne travaillant pas, sombrent dans l’alcool, le tabac et le banditisme», remarque-t-il. Sa boutique, flambant neuve et bien achalandée représente une véritable aubaine pour les habitants.
Toutefois, par mesure de sécurité, de solides grilles en fer ont été installées, le séparant de ses clients. «Je suis installé ici depuis juste 4 mois, mais je suis sur le qui-vive. J’ai pris la précaution la semaine dernière d’installer des grillages après le meurtre d’un boutiquier à l’autre côté de Yarakh», fait-il savoir. Mais selon lui, vu qu’il y a des gens qui y vivent, il faut quelqu’un pour les approvisionner en marchandises malgré le risque réel dans la zone. «L’endroit est loin d’être sécurisé, mais qui ne risque rien n’a rien», ajoute-t-il. Même son de cloche chez Aïssatou, détentrice d’une gargote à proximité du pont de passage pour piétons vers Hlm. Selon elle, c’est l’enclavement de la zone qui explique le risque d’insécurité. «Cela fait à peu près une année qu’un agresseur a été lynché en plein jour par la population.
Depuis, je n’ai plus entendu parler d’agressions», dit-elle. Et d’ajouter aussitôt : «Mais il faut dire que la zone est trop enclavée. À certaines heures, vous pouvez rester longtemps sans voir une seule personne traverser». Selon Ibrahima Tall, chef de poste de la sécurité du garage du ministère de la Santé, un cas de vol a été signalé récemment à la Pna. «Je ne sais pas comment cela s’est produit, mais apparemment c’est dans la nuit que les malfaiteurs se sont introduits pour dérober des objets», témoigne-t-il. Pour l’ex-gendarme, qui a blanchi sous le harnais, ces problèmes de sécurité doivent appeler la gens à être davantage prudents surtout la nuit dans ces environs.
Souleymane WANE