Gardien et capitaine de l’équipe de beach soccer du Sénégal, Al Seyni Ndiaye est l’emblème des « Lions » de la plage. À 36 ans, il incarne le dépassement de soi pour la Nation avec huit trophées de Coupe d’Afrique dans sa besace.
Totem, emblème, porte-bonheur, boussole…, ces mots ne seraient pas de trop pour qualifier ce que représente Al Seyni Ndiaye au sein de l’équipe nationale de beach soccer du Sénégal. Du foot à 11 au foot de plage, Al Seyni a marqué les esprits de nombreux passionnés de ces deux disciplines. Au début, tout le prédestinait à devenir un conquérant. Téméraire, il passait ses journées à se bagarrer dans les rues de Ouakam, lors des traditionnels « petits camps » et à l’école. Pour celui qui, tout petit, a commencé sa carrière à l’école de foot Alioune Camara, antichambre de l’Us Ouakam (Uso), le football représentait un moyen de se défouler et d’évacuer sa rage. Au sommet d’une carrière remplie de péripéties et de trophées, il réussit à porter, haut, le flambeau de l’équipe nationale de beach soccer en étant le capitaine emblématique et le plus médaillé de la sélection. Huit trophées de Coupe d’Afrique remportés (2008, 2011, 2013, 2016, 2018, 2021, 2022 et 2024), neuf participations à des phases finales de Coupe du monde entre 2007 et 2024 (32 matches disputés). Quarts de finaliste (2007, 2011 et 2017) et demi finaliste (2021) du mondial, le palmarès est loin d’être exhaustif pour le natif de Ouakam.
La rencontre avec Chita
Pourtant, Al Seyni Ndiaye n’avait jamais entendu parler de beach soccer, lorsque Ibrahima Ndiaye dit Chita lui propose de participer à la Coupe d’Afrique de la discipline en 2007, alors qu’il n’était âgé que de 17 ans. « C’est par pur hasard que j’ai rejoint l’équipe de beach soccer puisque le gardien qui devait initialement participer à cette compétition n’avait pas de passeport. Je jouais en ce moment dans le championnat populaire communément appelé « Navétanes », à l’Asc Diambars. La règle interdisait aux joueurs de moins de 18 ans de participer au championnat d’Afrique de beach soccer. Je suis exceptionnellement le premier joueur à l’avoir fait. Après des négociations, on m’a laissé jouer. En une semaine, j’ai été mis au parfum des règles de jeu, avant qu’on ne s’envole pour l’Afrique du Sud », rappelle Al Seyni Ndiaye. L’avenir donnera raison à Chita, car Al Seyni Ndiaye termine meilleur gardien de la compétition à sa première participation. « De 2007 à 2012, je crois que le beach soccer n’était pas assez connu. Nous avions gagné plusieurs fois le championnat d’Afrique sans avoir été reçus par le président de la République. Ce n’est qu’en 2021, après notre demi-finale contre le Brésil, qu’il y a eu un déclic. On nous a reçus au Palais. Et les gens ont commencé à mieux connaître ce sport », explique l’ex-gardien de but de football à 11. « Il ne me reste que la Coupe du monde à gagner pour clore mon chapitre avec l’équipe nationale », confie-t-il, avec conviction.
Al Seyni Ndiaye, endeuillé par le décès de son père, a les yeux qui brillent lorsqu’il regarde sa mère. On le retrouve chez lui à Ouakam, dans la chaleur familiale, décontracté et heureux d’avoir du succès dans sa vie. « La famille est le socle de ma réussite. J’ai toujours fait de mon père mon modèle. Je remercie mes parents pour l’éducation qu’ils m’ont donnée. Cela m’a permis d’avancer dans la vie malgré les tentations. Je ne fume pas. Je ne bois pas et je ne pense pas le faire », confie-t-il, la voix sévère.
Bon élève, Al Seyni Ndiaye a fréquenté le Collège Elhadj Mamadou Ndiaye, puis le lycée mixte Maurice Delafosse. En 2013, il échoue à sa première tentative au Baccalauréat et décide de quitter l’école. Ne pouvant pas allier études et sport, le Ouakamois se concentre sur le foot de plage. Cette passion est la source de vie de Al Seyni Ndiaye, selon ses coéquipiers. « Seny est incomparable. Il sait nous mettre à l’aise et nous conseille chaque fois qu’il le faut. Il a cette aptitude à gérer la pression et à pousser les gens vers le haut », témoigne son coéquipier Seydina Mandione Laye. Gardien remplaçant de l’équipe nationale de beach soccer, Ousseynou Dia se dit fier de partager les entraînements avec ce « grand professionnel et protecteur envers tous ».
L’obsession de la Coupe du Monde
À l’aube de la retraite, Al Seyni Ndiaye se voyait déjà loin des plages, après le sacre continental de 2024, mais il a été convaincu par son entourage, en particulier des joueurs de l’équipe nationale A de football, avec qui il entretient de très bonnes relations, de rechausser encore les godasses pour tenter de mettre dans sa besace une Coupe du Monde. « Je comptais prendre ma retraite après mon dernier sacre avec les « Lions ». Cependant, plusieurs de mes conseillers, dont le champion d’Afrique, Cheikhou Kouyaté, avec qui j’entretiens de bonnes relations, m’ont convaincu de rester pour tenter une nouvelle fois de glaner la Coupe du Monde », révèle-t-il. Pour avoir sacrifié beaucoup d’opportunités, le risque en valait la chandelle, estime le capitaine des « Lions » de la plage. « En 2009, on nous avait accordé des visas de 10 ans pour tous les joueurs, après un tournoi aux États-Unis. Tous ceux qui étaient de ma génération sont partis tenter l’aventure. J’étais le seul à rester au Sénégal. Et depuis, je continue à défendre les couleurs nationales parce qu’à force de volonté, on réussit toujours à atteindre nos objectifs. L’équipe nationale en vaut la peine », déclare-t-il. Les regrets n’ont pourtant pas manqué pour le joueur de beach soccer. « En 2012, lorsque mon transfert au Barça est tombé à l’eau. Ça m’avait beaucoup découragé, car je ne comprenais pas pourquoi l’Us Ouakam voulait me retenir alors que j’étais deuxième gardien derrière Pape Latyr Ndiaye », regrette-t-il. Pour se consoler de ses nombreux revers, Al Seyni Ndiaye espère que le Sénégal va remporter la prochaine Coupe du Monde, pour une première fois que l’Afrique (Seychelles) organise la compétition sur ses terres. Son deuxième souhait est que les joueurs de l’équipe nationale soient reçus par le président Bassirou Diomaye Faye. « Nous serions très honorés de rencontrer le président de la République pour lui présenter notre trophée. C’est vrai que nous avions été reçus par l’ancien président Macky Sall. Avec le trophée remporté en 2024, nous voulons présenter notre trophée à la nouvelle institution », évoque-t-il, pensant que c’est le meilleur moyen de ragaillardir les troupes avant la grande bataille prévue au mois de mai, aux Seychelles.
Par Marième Fatou DRAMÉ