Le président de l’Organisme national de coordination des activités de vacances (Oncav), Amadou Kane, voit d’un bon œil la sortie du président de la République, Bassirou Diomaye Faye, pour une réforme des « Navétanes » gangréné par des scènes de violence. Regroupant toutes les couches sociales, les « Navétanes » doit vaincre ses démons et participer de façon conséquente au rayonnement sportif, économique, culturel… du Sénégal, estime M. Kane.
Quel est l’état des lieux du mouvement « Navétanes » ?
Les « Navétanes », l’Oncav et ses démembrements vivent très bien. Nous avons presque terminé cette saison et nous sommes de plain-pied dans les renouvellements qui ont commencé à partir des Asc, les zones. Les Odcav, les Orcav et l’Oncav suivront. La saison a été longue, mais pleine d’enseignements. Dieu merci, cela s’est bien passé partout au Sénégal. Nous sommes 8.400 Asc et nous avons presque 800 zones, 46 Odcav, 14 Orcav et 500.000 licenciés. Nous organisons plus de 20.000 matches sur tout le territoire national. Il est évident qu’on peut rencontrer des difficultés, mais la force du « Navétane », c’est que quand on rencontre une difficulté, c’est de la régler, la surmonter et avancer ; surtout par rapport à la violence.
Les « Navétanes » sont loin d’être un fleuve tranquille. Comment expliquez-vous toutes ces scissions et divisions au sein du mouvement ?
Il n’y a pas de division. L’Oncav est la seule structure nationale légale, reconnue par l’État, depuis 1974 jusqu’à nos jours.
Maintenant, si quelqu’un a été suspendu ou perd pendant les renouvellements et crée sa propre structure, ce n’est pas une scission. En vérité, il y a eu des scissions dans le passé. Issa Mbaye Samb (paix à son âme) avait créé une structure. Mais depuis l’audience historique qu’on avait eue avec le président Abdoulaye Wade, ces problèmes ont été dépassés. Tout le reste, ce sont des soubresauts de mécontents, de personnes suspendues ou vaincues dans les renouvellements. Malheureusement pour eux, cela n’a pas marché, car les Sénégalais ne les ont pas suivis. Dans la région de Dakar, il n’y a qu’une seule structure : l’Oncav. Les autres, si elles existent, je ne les connais pas. C’est nous qui travaillons avec l’État. J’ai parlé de 500.000 licenciés. Lundi (Ndlr : aujourd’hui), ce fichier sera mis à la disposition de qui de droit, c’est-à-dire la Fédération sénégalaise de football (Fsf) et l’État à travers le ministère des Sports.
Récemment, en Conseil des ministres, le Président de la République, Bassirou Diomaye Faye, a demandé au ministre chargé des Sports de procéder à une réforme du mouvement « Navétanes ». Qu’est-ce que cela vous inspire ?
C’est un honneur pour nous, du mouvement « Navétanes ». Que le Président de la République donne des instructions fermes pour qu’on s’occupe du « Navétane », cela doit honorer tout le monde. Nous avons envoyé un courrier au Président de la République pour le remercier d’avoir donné ces instructions-là et nous sommes à la disposition du ministre des Sports et du gouvernement. Nous avons d’ailleurs rencontré le ministre des Sports, et vous verrez, dans les jours à venir, que les directives vont être matérialisées. Le Président de la République n’a jamais menacé les « Navétanes ». Il a demandé à ce améliore les conditions de vie et de fonctionnement des « Navétanes ». C’est notre credo et c’est pourquoi je voudrais profiter de cette occasion pour le remercier et lui assurer que nous sommes disposés à travailler sans réserve pour que les « Navétanes » soient plus performants, qu’il n’y ait plus de violence dans ce que nous sommes en train de faire. Cette décision du Président survient après le décès d’un jeune lors des demi-finales de la Zone 1 de Yeumbeul.
La violence ne gangrène-t-elle pas le mouvement ?
S’il y a quelque chose qui gangrène les « Navétanes », c’est bien la violence. Cependant, il faut préciser que le décès survenu à Yeumbeul, ce n’était pas au cours d’un match. Nous déplorons la mort du jeune Moustapha Dieng, paix à son âme. Que cela se soit produit avant, pendant ou après, nous le déplorons et condamnons la violence sous toutes ses formes, mais cela ne doit pas seulement être l’affaire des « Navétanes ». Cela doit être le problème de tous les Sénégalais. Il faut que chacun s’investisse pour que nous puissions lutter contre ce fléau.
Nous sommes conscients que nous ne pouvons organiser à tout moment des compétitions avec des faits de violence. C’est pour cette raison qu’à chaque fois qu’il y a eu un arrêté préfectoral ou du gouverneur, nous nous sommes pliés. Quand l’autorité administrative pense qu’il y a trouble à l’ordre public, elle fait une note pour demander d’arrêter et nous nous soumettons, parce que nous sommes d’abord des administrés. Ce que je souhaite, c’est que ceux qui ont des problèmes personnels avec Amadou Kane les règlent avec Amadou Kane, mais pas avec les « Navétanes ». S’il y a des problèmes, il ne s’agit pas de supprimer, mais de trouver des solutions. Il ne faut pas penser que si le « Navétane » s’arrête nos vies vont s’arrêter. Nous sommes là parce que ceux qui sont dans le mouvement nous ont fait confiance.
Aujourd’hui, quelles devraient être les priorités dans cette réforme du mouvement « Navétanes » prônée par le Chef de l’État ?
Nous devons travailler dans la bonne citoyenneté. Comme je l’ai dit, notre devise c’est « Une citoyenneté active au service du développement ». Avant chaque finale, les Asc en lice font en sorte d’améliorer l’environnement de leur quartier. Depuis deux ans, nous avons intégré le problème de l’environnement dans nos règlements. Nous avons indiqué que chaque Asc doit participer à la prise en charge de son environnement. Dans le domaine de la santé, nous devons encore être plus présents et continuer, dans le domaine de la culture, ce que nous faisions il y a quelques années. Depuis 15 ans, nous organisons des phases nationales culturelles. Les Asc n’ont pas les moyens d’être dans le football, le théâtre et dans les autres domaines sportifs. Mais au-delà de ça, il faudrait qu’on fasse de sorte que tout projet tendant à participer au développement du pays soit en paix, qu’il y ait le calme, le civisme… Dans les rencontres qui vont se tenir, le problème des infrastructures doit occuper une place importante. Lorsque nous aurons de bonnes infrastructures partout, nous pourrions faire en sorte que les « Navétanes » se jouent au maximum de 45 à 60 jours. C’est possible de commencer après les examens et de terminer bien avant l’ouverture des classes. L’État est en train de faire beaucoup d’efforts.
Lorsqu’on parviendra à trouver une solution à ce problème d’infrastructures, les compétitions pourront se dérouler sur une courte durée. À l’intérieur du Sénégal, les gens ont terminé leurs compétitions depuis longtemps. Le gros problème, c’est à Dakar. Nous sommes aujourd’hui à 8.400 Asc dont les 700 se trouvent dans la région de Dakar. Mais, contrairement à ce que certains pensent, il n’y a pas trop d’Asc par rapport à la densité de la population et au nombre de quartiers et de villages existant au Sénégal. La lecture que nous avons de ce que le Président de la République a dit, c’est que les « Navétanes » doivent continuer à jouer son rôle de bon citoyen, aider le gouvernement dans la création d’emplois, sensibiliser les populations par rapport à certaines questions, organiser des matches pour que les jeunes se rencontrent sans qu’il y ait de la violence, participer à la formation dans tous les domaines. C’est notre engagement. On parle de manque de transparence dans la gestion des finances des « Navétanes ».
Pouvez-vous éclairer la lanterne des Sénégalais sur cette question ?
Nous avons déjà un règlement financier. Chaque année, que ce soit au niveau de la zone, de l’Orcav ou de l’Oncav, quand nous organisons, nous enlevons les charges. L’Oncav sort des procès-verbaux financiers qui sont validés par le Comité directeur, que nous amenons en Assemblée générale. Quand on veut tuer son chien, on l’accuse de rage. L’argent des «Navétanes » va aux « Navétanes ».
Si un Amadou Kane vient organiser un match à Demba Diop et qu’il y reste de 13 à 22 heures, c’est normal qu’on lui donne quelque chose quand il rentre. Ce n’est pas décrété, mais ce n’est pas interdit non plus. Cela a fait l’objet de validation. Il ne faut pas que les gens nous voient avec de beaux habits, de belles voitures, pour penser que c’est l’argent des « Navétanes ». Nous avons aussi nos sources de revenus. Chacun gagne son pain quelque part. Parmi nous, il y a des chômeurs, mais il y a aussi des travailleurs. Le mouvement regroupe toutes les couches sociales et nous pensons que ce que nous faisons est bien ; même si ce n’est pas parfait. Seul Dieu est parfait. Nous sommes dans les dispositions de rectifier si les gens pensent que quelque part il y a des choses qu’on n’a pas faites. Mais ce que nous n’accepterons pas, c’est de penser qu’en allant crier sur Facebook ou sur WhatsApp, cela peut enlever les gens qui sont ici. Le monde ne fonctionne pas comme ça. Chacun est libre de dire que les « Navétanes » ne fonctionnent pas bien, qu’il y a de la violence. Mais, les gens ne doivent pas accuser gratuitement d’honnêtes Sénégalais. Nous aussi, nous avons des familles et quiconque nous accuse, nous fournissons des preuves que ce n’est pas vrai.
Qu’est-ce qui explique la longévité de certains membres à la tête de certaines structures (Zones, Odcav, Orcav …) ?
C’est la volonté de Dieu. Ce sont les gens qui élisent qui l’ont voulu ainsi. Le mandat est de quatre ans. Il n’y a pas de cooptation dans le « Navétanes ». Tous ceux qui sont là ont été élus par les membres des comités directeurs ou les membres des assemblées générales. Depuis, il n’y a pas un mandat terminé qu’on n’a pas renouvelé. Si quelqu’un pense qu’Amadou Kane a duré et qu’il souhaite le remplacer, il n’a qu’à avoir une Asc et venir poser sa candidature contre Amadou Kane. Même si j’ai fait un siècle, si je fais bien le travail que les Sénégalais et le « Navétanes » attendent de moi, pourquoi les gens voudraient que je parte ? Parce qu’ils ont des problèmes personnels avec Amadou Kane. Ils ne parlent pas de renouvellement des instances ; ils parlent pour dire qu’Amadou Kane a duré ici. Je souhaite avoir 100 ans et rester ici, tant que Dieu me prête vie et que mes camarades continuent d’avoir confiance en moi.