Présidente de la Fédération sénégalaise de roller et skateboard, Awa Nar Fall est une icône de ces sports sur le plan sénégalais et africain. Elle se livre sur le parcours des athlètes de ces disciplines depuis l’implantation du club Maestro Roller et sur les objectifs de la Fédération.
Votre aventure avec le roller et le skateboard date de très longtemps. Qu’est-ce que cela vous fait d’être la seule femme sénégalaise présidente d’une fédération sportive ?
C’est un grand honneur pour moi d’accompagner ces jeunes. J’ai toujours été une personne sociale. C’est ce qui m’a conduit vers ce sport. Actuellement, en plus d’être la présidente de la Fédération sénégalaise de roller-skateboard, je suis à la tête de la Confédération de football skating et de handball roller, et la vice-présidente de la Confédération africaine de roller-skating. Pour la petite histoire, en 2002, je travaillais comme agent municipal à la Ville de Dakar, par ailleurs, je manageais deux groupes de danse devant participer à l’émission « Oscars des vacances » qui passait sur la chaîne 2Stv. Il s’agit de « Fardisse » et « Inconnus de Fass », qui avaient finalement gagné la compétition, cette année-là. De là, des jeunes qui pratiquaient le roller m’ont interpellée pour me proposer de devenir leur marraine. J’ai été émue par leur geste. À ce moment-là, il n’y avait qu’un seul club dénommé Accro Roller. Les frais d’inscription et de mensualité étaient exorbitants pour ces jeunes qui rêvaient de pratiquer le roller. On leur demandait de payer 100.000 FCfa pour adhérer et de redonner la moitié de cette somme, à chaque fin de mois. Alors, pour ne pas décevoir ces jeunes passionnés venus de Pikine, Grand Dakar, Fass…, j’ai décidé de créer le club Maestro Roller.
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Au départ, nous étions six personnes à fonder ce club. De ce fait, j’ai commencé à les appuyer en achetant des matériels pour roller et faire du skate. Les jeunes ont commencé à s’entraîner à la piscine olympique, où je travaillais, à cette époque. Sur ce, une concurrence rude avec les hommes du milieu a commencé. J’ai été traitée de tous les noms par l’autre camp. On m’a traitée de folle. J’avais alors répliqué durant une émission à Canal Infos, pour prendre la défense des jeunes qui avaient le droit de faire un sport sans dépenser beaucoup d’argent. Le sport n’appartient pas seulement aux gosses de riches. C’est pour tout le monde. J’ai vraiment agi dans le but d’intégrer tout le monde dans le roller et le skateboard. Ces jeunes qui étaient sous-estimés sont devenus champions d’Afrique et du Monde, à l’image de Dame Fall. Dans ce sillage, le Comité national sénégalais de gestion provisoire de sport de glisse (Cnspg) a été créé en 2006. Le Cnspg a été présidé par Alexandre Alcantra, actuel directeur général de Kirène. À l’époque, j’occupais le poste de directrice technique nationale (Dtn). De coach, je suis passée à présidente de club jusqu’à devenir directeur technique nationale.
Depuis lors, qu’est-ce que cette génération a pu réaliser en termes de palmarès dans les deux disciplines ?
On peut dire que nous sommes présents partout au niveau national. En 2010, on a remporté la Coupe d’Afrique au Sénégal. En 2012 et 2015, l’équipe nationale a été encore championne d’Afrique. En 2016, nous sommes allés au Bénin où nous avions obtenu 33 médailles. Dans plusieurs disciplines, nous avons eu des champions. En 2017, nous avons fait notre première sortie à l’international en Chine. Ce qui a permis à Awa Baldé du club Accro Roller et à Dame Fall de Maestro Roller de gagner le championnat du monde en free jump. Avant leur sacre, Robert Diouf a été notre premier champion d’Afrique, un garçon très discipliné qui avait déjà ouvert la voie. Dernièrement, nous avons eu un autre champion du monde en la personne de Jean Pierre Ngor Sarr. Actuellement, nous avons été cinq fois champions du monde en battant des records. En 2017, lorsque le comité de gestion des sports de glisse a éclaté, nous avons créé la Fédération de roller-skateboard et j’ai été élue pour la première fois présidente. Cette année encore, je compte me représenter pour un cinquième mandat afin de continuer l’aventure.
Quelles sont les disciplines du roller et du skateboard, qui se développent le plus au Sénégal?
Le free jump est un peu plus développé au Sénégal. Même si le Sénégal est vice-champion de handball roller depuis l’année dernière, il y a encore des choses à améliorer. Faire du roll-ball, c’est comme faire du handball, mais la différence c’est qu’on le pratique en portant des patins. Dans la même veine, cela fait dix ans qu’on exerce le football skating qui, comme son nom l’indique, veut dire faire du football avec des patins. Pour notre première participation aux championnats du monde de Turquie organisés du 20 au 26 novembre 2024, nous avons pu nous hisser jusqu’en demi-finale. Pour le moment, il y a des disciplines nouvelles que nous ne pouvons pas encore intégrer dans nos programmes. Par exemple, nous ne pouvons pas pratiquer le hockey sur glace, parce qu’on ne possède pas une salle adéquate pour pouvoir le faire. Nous tendons la main aux autorités pour qu’elles nous appuient davantage.
Comment préparez-vous les Jeux olympiques de la jeunesse « Dakar 2026 » ?
Nous sommes en phase de préparation avec les juniors qui doivent participer. C’est notre pays qui organise. C’est l’Afrique qui organise, nous allons nous donner à fond. Les skateurs se préparent intensément. Nous voulons remporter beaucoup de médailles durant ces Jeux olympiques en catégorie juniors.
Par Marième Fatou DRAMÉ