Dans les couloirs silencieux d’un gymnase vidé de ses acclamations, il arrive qu’un nom flotte encore, suspendu dans la mémoire des lieux. Ce nom, c’est celui de Mame Maty Mbengue. Pivot inamovible des Lionnes du Sénégal, guerrière élégante des parquets, elle a tout gagné. Pourtant, on parle trop peu d’elle. Peut-être parce qu’elle n’a jamais crié ses exploits. Elle les a juste… accomplis.
Née en 1968 à Dakar, à une époque où les terrains de basket féminins étaient loin d’être en lumière, elle se fait remarquer très tôt. Une présence. Solide. Calme. Redoutable. Elle débute à la Jeanne d’Arc, le berceau des grandes, puis s’envole vers les États-Unis. Central State University lui ouvre ses portes. Là-bas, elle découvre autre chose : la pression, l’exigence, l’élite. Elle ne plie pas. Elle gagne. Et entre dans le Hall of Fame de l’université. Une Sénégalaise, dans ce panthéon du sport universitaire américain.
Mais c’est sur les parquets africains qu’elle deviendra légende. AfroBasket 1984, elle n’a que 16 ans, et déjà l’échine des grandes. Puis viennent les années dorées : 1990, 1993, 1997, 2001. Cinq titres continentaux. Quatre titres de MVP. La meilleure, tout simplement. Toujours là, au centre du jeu, tenant la raquette comme une tour dans la mêlée.
Et puis, Sydney, 2000. Les Jeux Olympiques. Le Sénégal est qualifié, elle fait partie de l’aventure. Elle y va comme on entre en guerre, avec cette force tranquille qui ne tremble jamais.
On disait d’elle qu’elle parlait peu. Mais sur le terrain, elle disait tout. À ses coéquipières, elle offrait les écrans, les rebonds, la couverture, la confiance. Au public, elle offrait la victoire. Et quand elle quittait le terrain, c’était toujours sans bruit, mais jamais sans laisser de trace.
En novembre 2022, le monde lui rend justice : la FIBA l’intronise dans son Hall of Fame. Première femme africaine à recevoir cet honneur. Une page d’histoire, discrètement tournée. Comme à son image. Cette même année, son maillot n°15 est retiré par la Fédération sénégalaise. Aucun autre ne le portera. Ce n’est pas un trophée. C’est un silence respectueux. Celui qu’on accorde aux irremplaçables.
Demandez aujourd’hui à une jeune basketteuse si elle connaît Mame Maty. Beaucoup vous diront non. Et c’est peut-être là, l’injustice. Car elle a ouvert la voie, hissé l’équipe nationale au sommet, représenté le Sénégal avec fierté, sans jamais réclamer la lumière.
Mame Maty Mbengue était une architecture. De ces structures invisibles sur lesquelles on bâtit des générations. Elle ne dribblait pas pour la gloire. Elle jouait pour que le rêve tienne debout.
Alors, si un jour vous passez près d’un terrain, et que vous voyez une gamine lever la tête vers le cercle avec détermination, dites-lui ce nom.
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