À Dakar, la salle Forbis, logée à la Maison de la Douane, est un creuset de talents en herbe. Des enfants âgés de trois ans à la quinzaine pratiquent la gymnastique au sein du Dakar Gym Club. Si les gestes sont encore hésitants, les ambitions de ces athlètes sont grandes.
La salle Forbis, située près du Canal IV, derrière l’école de la Douane de Dakar, fait figure d’exception dans un pays où les infrastructures dédiées à la gymnastique restent encore rares. Ce samedi 28 juin, une cérémonie de décoration réunit parents d’élèves, athlètes et entraîneurs autour de la célébration de la gymnastique. À l’intérieur de la grande pièce de la Maison de la Douane, des parents d’élèves scrutent fièrement les mouvements de leurs enfants. En face d’eux s’étendent les tapis de gymnastique soigneusement disposés. Au-dessus, une estrade surplombant la salle fait office de podium. Cet édifice, à l’atmosphère plutôt sombre, conserve un charme suranné qui rappelle les constructions d’autrefois, avec ses murs et ses poutres apparentes. Par cohortes, les athlètes défilent et suivent leurs enchaînements. Constituées principalement de filles, les jeunes athlètes, âgées de trois à une quinzaine d’années, sont intenables et sautillent de partout.
Mariam Traoré, 10 ans, de taille courte et d’une forte corpulence, fait partie des jeunes qui fréquentent le Dakar Gym Club. Cette dernière a vu son niveau progresser rapidement. « Avant, je ne savais faire que des roues. Maintenant, je réalise des mouvements très difficiles », témoigne-t-elle fièrement. En quatre ans de pratique, elle a déjà remporté cinq médailles, dont une en or, deux en argent et deux en bronze, et nourrit l’ambition de participer aux Jeux olympiques. Pour cette élève en classe de troisième, la gymnastique est une discipline qui lui permet de se surpasser. « La gymnastique, c’est un sport très beau pour moi. Ça me plaît », confie-t-elle avec enthousiasme. Mariama a emporté dans son élan sa petite sœur Fatima, qui l’accompagne durant les cours.
Éveiller le corps des enfants
Avant de rejoindre le Gym club de Dakar, cette fan de la gymnaste artistique américaine Simone Biles s’entraînait à la maison. Encouragée par son intérêt pour ce sport, sa mère l’a inscrite. « Je veux être comme ma mère », renseigne-t-elle. « Elle a vu ça à la télé, puis à la maison, elle faisait des acrobaties. J’ai décidé de l’inscrire après avoir contacté la fédération. J’ai fait des recherches sur le web et je suis tombée sur le Dakar Gym club », indique sa maman. Selon Mme Traoré, l’évolution de sa fille est remarquable. « Elle évolue très bien et est toujours parmi les trois premières de sa catégorie ».
Tout comme Mariama, Saydatou Mariama Niass s’est bien intégrée au sein de ce club. À 16 ans, la jeune athlète est accompagnée de ses jeunes sœurs. Plus qu’un moment de jeu, la gymnastique est un moment de communion pour sa famille. « Il y a des gens qui viennent le lundi, le mardi et le dimanche selon les groupes. Je viens pratiquer parce que mes parents ont insisté pour m’inscrire. Je me sens bien en pratiquant des cours avec mes sœurs », confie-t-elle, en se grattant le ventre. Pour cet autre parent d’élèves qui préfère parler sous anonymat, la gymnastique est un sport qui doit-être accompagné, vu l’impact qu’elle joue. « Nous devons mettre en lumière l’importance du soutien familial et de la fédération dans le développement de la gymnastique au Sénégal », souligne-t-il tout en indiquant qu’il a pris plaisir à participer à la cérémonie.
D’après lui, ce sport, perçu comme « passionnant » et « très beau », attire les jeunes dès le plus jeune âge, « qui y voient un moyen d’expression physique et un espoir pour un avenir sportif prometteur ». C’est pourquoi, d’après lui, l’intensification de la formation des jeunes s’impose. Sollicitée, la gérante des lieux, Albertine Andrade Barbosa Gonçalvès, par ailleurs ancienne présidente de la Fédération de gymnastique du Sénégal pendant plus de trois décennies, n’a pas souhaité s’exprimer sur la situation de la discipline au Sénégal, ni sur l’histoire autour de l’implantation de la Salle Forbis, où elle a posé les premiers jalons de la structuration de la discipline. Son rôle dans la vulgarisation de cette discipline est salué par de nombreux passionnés de gymnastique. Depuis plus de trente ans, elle est considérée comme celle qui a contribué à l’essor discret de la discipline au Sénégal.
Marième Fatou DRAME