Directeur du pôle News du Figaro, qui regroupe le quotidien Le Figaro, ses trois magazines (Le Figaro Magazine, Madame Figaro et TV Magazine), ainsi que toutes les activités numériques du groupe, notamment Le Figaro.fr, Bertrand Gié est une référence incontournable dans le domaine des médias. Lors d’un échange sur la digitalisation et l’emploi de la vidéo avec une délégation du Soleil dans les locaux du groupe situés dans le 9ᵉ arrondissement de Paris, il est revenu sur les étapes qui ont fait du figaro.fr le premier site d’actualité en France avec 7 millions de visiteurs par jour.
En rejoignant Le Figaro, quelles étaient vos missions ?
Je suis arrivé au Figaro en 2006 avec pour mission de développer les activités internet, car à l’époque, le journal n’avait pas encore de site web. Nous étions en retard, mais nous avons mis les bouchées doubles. Dès 2008 ou 2009, Le Figaro.fr est devenu le premier site d’actualité en France, position qu’il occupe encore aujourd’hui avec environ 7 millions de lecteurs par jour. Notre modèle économique est hybride : il repose d’une part sur les revenus publicitaires, bien qu’ils ne suffisent pas, et d’autre part sur les abonnements numériques. Actuellement, nous comptons près de 300 000 abonnés numériques, et nous espérons franchir ce cap symbolique en avril 2025.
Comment s’est faite la transition entre le papier et le web ?
En 2006, il n’y avait quasiment aucun lien entre le print et le numérique. Nous n’étions même pas dans le même bâtiment, ce qui reflétait aussi des différences de mentalités et de méthodes de travail.
Petit à petit, nous avons rapproché les équipes, modifié les rythmes de production et encouragé les journalistes print à contribuer pour le web. Cela a demandé beaucoup de temps, de patience, de volonté, et d’investissements. Un exemple concret est le développement de notre propre CMS (Content Management System), désormais utilisé par tous les journalistes, qu’ils travaillent pour le print, le web, l’audio ou la vidéo. Cet outil a permis une intégration complète des processus.
Et aujourd’hui, comment s’organise le travail entre le print et le web ?
Aujourd’hui, il n’y a plus de distinction entre une rédaction web et une rédaction print. Nous avons une rédaction dédiée à l’actualité en temps réel, qui gère le site internet. Elle regroupe environ 120 à 130 journalistes travaillant 24h/24 et 7j/7, capables de couvrir tous types de sujets. En parallèle, des services spécialisés (économie, politique, sport, etc.) produisent des articles de fond. Ces contenus sont d’abord publiés sur le site internet, soit en accès gratuit, soit en payant, avant éventuellement d’être intégrés au journal papier. Cependant, produire le quotidien reste une tâche énergivore. C’est un axe d’amélioration sur lequel nous travaillons encore.
Comment se déroulent les conférences de rédaction ?
Les conférences de rédaction structurent notre journée. À 9 h, une première conférence réunit les équipes web pour planifier la journée. La conférence principale, à 10 h, rassemble tous les chefs de service print et web pour discuter des contenus à venir, qu’ils soient pour le site ou le journal. Cette réunion commence toujours par une analyse des performances web : articles les plus lus, sujets qui fonctionnent, etc. D’autres conférences, spécifiques aux différents services (économie, sport, etc.), se tiennent tout au long de la journée. Enfin, des réunions de passation permettent aux équipes web, qui travaillent en rotation continue, de transmettre les informations clés. En termes de volume, un journal papier compte en moyenne 65 à 70 articles, tandis que le site publie près de 500 articles par jour, ce qui illustre l’intensité de la production.
Où en est Le Figaro avec l’intelligence artificielle ?
Nous avons une charte claire stipulant que tous les contenus produits sur Le Figaro sont rédigés par des humains. Cela garantit à nos lecteurs que les informations qu’ils consultent n’ont pas été générées par une intelligence artificielle. Cela dit, nous utilisons l’IA comme un outil pour gagner en productivité. Par exemple, un journaliste peut s’en servir pour obtenir une synthèse rapide d’un document volumineux. Cependant, la rédaction des contenus reste entièrement humaine.
Moussa DIOP, envoyé spécial à Paris