L’hydraulique, c’est son domaine. Très tôt, Diarra Sow a été guidée par son amour pour la géographie. Pour l’eau également. Une idylle qui n’a souffert d’aucune avarie jusqu’à sa nomination, en mai dernier, à la tête de l’Office des lacs et des cours d’eaux (Olac) ; une structure qu’elle rêve de placer au cœur du dispositif étatique.
Une femme engagée, qui a une vision, très orientée dans ses objectifs et qui croit en ses convictions. C’est ainsi que se définit Diarra Sow. « À l’intérieur, je sais que je suis une femme, comme toutes les femmes. Mais à l’extérieur, je me dis que je suis un homme, surtout du point de vue de mon travail, mais aussi de mes relations professionnelles, parce que je fonctionne comme un homme », avoue-t-elle. « D’une manière générale, je me définis comme une femme forte, engagée, très dynamique et qui sait très bien où elle va », assure la native de Saint-Louis, qui a très tôt compris qu’elle pouvait réussir sans sortir de son cocon natal. Tout son cursus scolaire (ou presque) elle l’a fait à Saint-Louis ; même si à un moment, l’envie de suivre les traces de ses camarades partis poursuivre leurs études à l’étranger lui a traversé l’esprit. Ses parents s’y étaient fermement opposés. « J’ai été couvée par mes parents qui ne voulaient pas que je voyage.
Après le baccalauréat, j’avais, comme la plupart de mes camarades de classe, voulu voyager parce que j’étais une excellente élève et je sais que j’avais des possibilités d’obtention de bourse. Mais quand j’en ai parlé à mon père, il m’a déconseillé de partir. Je suis donc restée parce que j’ai toujours cru que je pouvais rester au Sénégal, réussir et servir mon pays. Et je pense que ça s’est réalisé aujourd’hui », confesse Diarra Sow.
L’hydrologie, un choix complexe
A l’université, Diarra Sow a opté pour la géographie jusqu’au doctorat. Après la maîtrise, vu aussi la situation familiale, elle a choisi d’aller enseigner, tout en poursuivant ses études. « J’ai pu réussir le Dea et le doctorat en étant professeur d’histoire et de géographie. Et c’est à ce titre aussi que j’ai également été recrutée comme vacataire à l’Université Gaston-Berger où je donnais des cours de Travaux dirigés en hydrologie », fait-elle savoir. Diarra Sow s’est encore perfectionnée en faisant un Master 2 en gestion intégrée des ressources en eau à l’Institut international d’ingénierie de l’eau et de l’environnement de Burkina Faso. Et elle ne s’est pas arrêtée en si bon chemin. Elle a rejoint la Faculté des sciences et techniques de l’éducation et de la formation (Fastef) où elle a décroché un Certificat d’aptitude à l’enseignement secondaire (Caes). Jusqu’à sa nomination à la tête de l’Office des lacs et des cours d’eaux (Olac), elle était professeur d’histoire et de géographie au lycée de Rao. Mais pourquoi donc le choix d’un domaine aussi complexe que l’hydrologie ? Pour Diarra Sow, ce sont des circonstances qui l’ont menée sur cette voie.
« Au lycée, j’étais très bien en histoire et en géographie, et surtout en géographie. C’est ce qui a fait qu’après le baccalauréat, pour l’université, j’ai coché la géographie pour mes deux premiers choix. À partir de la licence, on avait un module hydrologie avec le professeur Adrien Coly. C’est ce module-là qui a réveillé ce qui dormait en moi, cet amour pour l’eau et de sa gestion », informe-t-elle. « Quand il s’agissait de choisir un sujet à partir de la maîtrise, je me suis rapprochée du docteur Adrien Coly pour lui dire que je voulais travailler spécifiquement dans l’hydrologie, malgré ma spécialisation en environnement », renseigne-t-elle. Le professeur Adrien Coly et bien d’autres techniciens du ministère, de la direction de l’hydraulique de Saint-Louis, de la Saed ont contribué à sa formation, à cet amour qu’elle nourrissait pour la gestion de l’eau.
« C’est un domaine très masculin parce qu’on voit peu de femmes qui exercent dans le domaine de l’hydrologie. Mais c’est également un challenge, un défi que j’ai toujours et je pense que je vais continuer sur cette lancée », promet Diarra Sow. Sa nomination à la tête de l’Olac peut être considérée comme une consécration politique, mais aussi un choix bien réfléchi par rapport à son profil, commente-t-elle. « Je suis géographe à la base. J’ai fait la géographie jusqu’au doctorat et je m’étais spécialisée, depuis la licence, en environnement et conservation des écosystèmes. Et à partir de la maîtrise, tous mes travaux étaient relatifs à l’hydrologie », explique-t-elle. Diarra Sow a donc travaillé sur des thématiques relatives à l’hydrologie des milieux aménagés dans la moyenne-vallée du fleuve Sénégal, de Podor jusqu’à Bakel. Et plus spécifiquement sur le Doué, un défluent du fleuve Sénégal.
« Vu mon cursus, mon profil, on peut dire, que c’est l’homme qu’il faut, ou bien la femme qu’il faut, à la place qu’il faut. Parce que durant tout mon cursus, toutes mes études, je m’étais spécialisée en géographie, mes travaux c’était dans l’hydrologie, donc je suis dans mon domaine qui est la gestion intégrée des ressources en eau », estime-t-elle.
Femme de terrain
Engagée et dévouée, Diarra Sow est une femme de terrain, qui ne se contente pas de se cloîtrer entre quatre murs. Débordante d’énergie, elle ne rechigne jamais à la tâche et descend régulièrement sur le terrain pour des missions de supervision. « J’ai parcouru tout le Sénégal et je suis allée partout où il y a de l’eau pour mieux m’enquérir de la situation, mais aussi avoir des projections à court et long terme sur les travaux de mobilisation que je compte mettre en œuvre », indique-t-elle.
Et elle compte bien poursuivre dans cette dynamique pour mieux servir le Sénégal et « concrétiser nos objectifs et la vision que nous avons d’ici 2050 de créer un Sénégal juste, souverain et prospère ». Diarra Sow est aussi engagée politiquement. Elle s’est jetée dans la mare en 2017 pour rejoindre ses camarades de promotion de l’Ugb qui avaient déjà adhéré au parti Pastef. « Je me retrouvais dans la vision de Pastef et je ne regrette pas mon engagement politique, parce que ça m’a permis de contribuer à la naissance d’une nouvelle génération capable d’être à la tête de ce pays », se félicite Diarra Sow qui milite dans la section communale de Pastef Saint-Louis où elle s’active dans l’animation et la massification du parti. Le don de soi toujours en bandoulière, elle invite les femmes à s’engager aussi en politique afin qu’elles puissent apporter leur contribution au développement du Sénégal.
« Avant, les gens faisaient de la politique pour avoir de l’argent, pour changer de statut social ; aujourd’hui, il y a une nouvelle donne. On fait de la politique pour participer à la gestion des affaires publiques. Et pour pouvoir y arriver, il faut faire de la politique, s’imposer, mais aussi occuper des postes de responsabilité », assure-t-elle. À son avis, les femmes doivent se déterminer à s’engager en politique mais aussi à occuper des postes de responsabilité. Aujourd’hui, Diarra Sow ambitionne de repositionner l’Olac en faisant en sorte qu’il soit au cœur du dispositif étatique. Et son rêve le plus grand est qu’il y ait de l’eau partout et pour tous, mais aussi que le Sénégal devienne un pays prospère, qui rayonne en Afrique et un peu partout à travers le monde.
Par Samba Oumar FALL