Vingt militaires camerounais ont été tués mardi dans une attaque perpétrée par des jihadistes du groupe Boko Haram, dans le nord-est du Nigeria, près de la frontière avec le Cameroun, ont indiqué à l’AFP deux sources proches de l’armée et un habitant.
Cet assaut est l’un des plus meurtriers attribués à Boko Haram contre des soldats depuis des mois dans le pays le plus peuplé d’Afrique.
Les troupes camerounaises opèrent régulièrement dans la région, tout comme les forces nigérianes, nigériennes et tchadiennes, dans le cadre d’opérations anti-jihadistes autour du lac Tchad, une zone instable qui abrite à la fois des combattants de Boko Haram et de l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP).
Les assaillants se sont d’abord rendus lundi dans la ville commerciale de Gamboru, où ils se sont mêlés aux éleveurs lors du marché hebdomadaire, avant de lancer une « attaque surprise » dans la nuit de lundi à mardi, à 15 km de là, dans la ville de Wulgo, ont indiqué deux sources proches de l’armée qui souhaitent garder l’anonymat.
Ils sont arrivés déguisés en éleveurs et en commerçants à Wulgo et y ont attaqué l’armée camerounaise, ont indiqué les deux sources.
« Les insurgés ont attaqué plusieurs bases vers 1h du matin et les combats se sont poursuivis pendant deux heures », a déclaré l’une des sources.
« Vingt soldats camerounais ont été tués dans les combats et leurs corps ont été transportés jusqu’à la frontière camerounaise ce matin », a ajouté cette source.
Contactées par l’AFP, les armées camerounaise et nigériane n’ont pas répondu dans l’immédiat.
« J’ai vu trois camions militaires camerounais transporter 13 corps vers la frontière camerounaise ce matin », a déclaré à l’AFP Muhammad Sani Umar, un habitant de Gamboru qui s’est rendu à Wulgo mardi.
– Lac Tchad –
Les bases militaires attaquées ont été incendiées et des véhicules brûlés, a-t-il ajouté.
Plusieurs armes ont été saisies par les combattants de Boko Haram, dont des canons antiaériens, a indiqué l’une des sources proches de l’armée.
Depuis plus de quinze ans, le nord du Nigeria est secoué par une insurrection jihadiste qui a fait plus de 40.000 morts et 2 millions de déplacés dans le pays, selon l’ONU. Elle s’est étendue ces dernières années dans les régions limitrophes au Niger, au Cameroun et au Tchad voisins.
Le lac Tchad, situé à la croisée des frontières de quatre pays, est devenu un bastion pour les groupes jihadistes, perturbant gravement les activités économiques essentielles telles que la pêche, l’agriculture et l’élevage, indispensables aux 40 millions d’habitants de la région.
À cette violence s’ajoute l’épuisement des ressources naturelles, le lac ayant perdu 90% de son volume depuis les années 1960 en raison du réchauffement climatique et d’une gestion inefficace.
Ces facteurs ont plongé les populations locales dans une précarité croissante.
– Coalition –
Depuis 2013, une coalition militaire régionale, la Force multinationale mixte (FMM), regroupant les armées du Nigeria, du Niger, du Cameroun et du Tchad et ayant son siège à N’Djamena, lutte contre les groupes jihadistes.
Cependant, les relations tendues entre ces États entravent son efficacité et compromettent les chances de succès dans la lutte contre le jihadisme.
En janvier, au moins neuf soldats nigériens ont perdu la vie lors d’affrontements avec les jihadistes de Boko Haram dans le nord-est du Nigeria, quelques jours après les meurtres de dizaines d’agriculteurs par un groupe jihadiste rival.
En novembre 2024, quinze militaires tchadiens ont été tués lors d’un « accrochage », qui a également fait 32 blessés, entre l’armée tchadienne et des combattants de Boko Haram.
Depuis qu’il a perdu son bastion dans la forêt de Sambisa en 2021 au profit de l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP), son rival, Boko Haram a déplacé sa présence dans les régions autour du lac Tchad, principalement dans les villes de Wulgo, Waza, Gwoza, Pulka et dans les montagnes de Mandara, à la frontière avec le Cameroun.
Wulgo et Waza ont été à plusieurs reprises ciblées par les jihadistes de Boko Haram.
Plusieurs bûcherons et éleveurs de ces deux villes ont été enlevés et tués après avoir été accusés d’espionnage pour le compte de l’armée ou des forces d’autodéfense locales.
AFP