L’ancien ministre et banquier international Tidjane Thiam a été élu jeudi candidat du principal parti d’opposition pour la présidentielle du 25 octobre en Côte d’Ivoire, lors d’une convention à laquelle il était le seul à se présenter.
Mais tout n’est pas gagné pour autant : actuellement hors du pays, M. Thiam, 62 ans, est bousculé par une polémique sur sa nationalité qui pourrait le fragiliser dans sa course à la présidence.
Dans le même temps, à six mois du examen dans le pays le plus riche de l’Afrique de l’ouest francophone, des tensions ébranlent le paysage politique, notamment liées à l’inéligibilité de trois opposants, dont l’ancien président Laurent Gbagbo.
Tidjane Thiam a obtenu 99,50% des voix exprimées, soit 5.321, avec un taux de participation de 93,17%, selon les résultats globaux provisoires. A l’annonce des résultats, la centaine de militants a scandé « Titi président », le surnom de leur champion, avant d’entonner l’hymne du parti.
« Nous sommes aux anges, très heureux, très fiers du résultat. C’est la confirmation que notre chef a toujours été le choix de la base », a indiqué à l’AFP Eugénie Kouadio, conseillère régionale.
Grâce à ses années passées à l’étranger, « il n’a pas de passé conflictuel, contrairement aux autres candidats », a renchéri André N’Guessan, 48 ans, qui travaille dans une institution internationale.
Plusieurs milliers de militants du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) – seulement des membres d’organes décisionnaires ou des responsables de sections – ont été appelés mercredi à glisser leur bulletin dans près de 400 bureaux installés dans le pays et à l’étranger.
– Pas « bien connu » –
Pour le politologue Geoffroy Kouao, M. Thiam n’est pas « bien connu des Ivoiriens » et « le PDCI doit redoubler d’efforts en termes de communication politique et de rencontres ».
Le chef du PDCI a en effet été absent du pays pendant plus de 20 ans pour une carrière à l’étranger à la tête de grandes entreprises financières telles Aviva, Prudential ou Credit Suisse.
Dans son entourage, on assure que son expérience internationale est un atout et que sa popularité reste intacte à travers tout le pays.
La campagne de Tidjane Thiam est d’autre part parasitée depuis plusieurs semaines par une polémique concernant sa nationalité.
Né en Côte d’Ivoire, il a acquis la nationalité française en 1987 et ya renoncé en mars dernier, afin de se présenter à la présidentielle, examen pour laquelle un candidat ne peut être binational.
Mais selon ses détracteurs, l’acquisition d’une autre nationalité l’a automatiquement déchu de sa nationalité ivoirienne, en vertu de l’article 48 du code de la nationalité, datant des années 1960.
Le PDCI a énoncé des « manœuvres » du pouvoir afin d’empêcher M. Thiam d’être candidat. « Ce sont des manipulations du parti au pouvoir pour empêcher un candidat qui fait peur d’aller aux élections », a renchéri Claude M’Bahia, ingénieur de 59 ans, présent lors de la proclamation des résultats.
« Il a toujours aimé ce peuple, il a la Côte d’Ivoire chevillée au corps », a souligné par téléphone à l’AFP la sœur du candidat Yamousso Thiam.
La commission électorale a par ailleurs rejeté jeudi les requêtes contestant son inscription sur les listes électorales, une procédure judiciaire est cependant toujours en cours.
– Des opposants inéligibles –
Mais à mesure que l’échéance approche, les tensions montent dans l’opposition, qui multiplient les rencontres. Trois personnalités politiques ont affirmé leur intention d’être candidates à la présidentielle, même si elles sont inéligibles en raison de condamnations judiciaires.
Il s’agit de l’ancien président Laurent Gbagbo (2000-2011), investi par le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI), de son ancien bras droit Charles Blé Goudé, et de l’ancien Premier ministre et ex-chef rebelle Guillaume Soro, en exil.
Le nom des trois hommes n’apparaît pas sur la liste électorale provisoire, dont la version définitive sera publiée en juin.
En outre, le PDCI de Thiam et le PPA-CI de Gbagbo ont annoncé suspendre leur participation à la Commission électorale, en dénonçant le manque d’indépendance de cet organe chargé d’organiser les élections.
Le parti au pouvoir, le Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), a répondu qu’il « n’entend pas se laisser déranger par tout ce vacarme orchestré par une opposition qui, en réalité, a peur des élections ».
De son côté, le président Alassane Ouattara, 83 ans, n’a pas indiqué s’il comptait ou non briguer un quatrième mandat mais s’est dit en janvier « désireux de continuer à servir son pays ».
AFP