Plus de 200 personnes ont été tuées en trois jours dans des attaques des paramilitaires contre deux villages au sud de Khartoum, a indiqué mardi un groupe d’avocats prodémocratie, le ministère des Affaires étrangères faisant état d’un bilan deux fois plus important.
Le ministère des Affaires étrangères a indiqué que des attaques menées par les Forces de soutien rapide (FSR) avaient fait « 433, dont des bébés », dénonçant un « horrible massacre ».
Les attaques des FSR dans l’Etat du Nil Blanc contre les villages d’Al-Kadaris et d’Al-Khelwat –à quelque 90 km au sud de la capitale Khartoum– ont poussé des milliers d’habitants à la fuite, ont rapporté des témoins à l’AFP.
Depuis samedi, les FSR ont mené des « exécutions, enlèvements, disparitions forcées et pillages de biens » contre des civils non armés, selon un collectif d’avocats documentant les violations des droits humains depuis le début de la guerre.
L’attaque, qualifiée de « génocide » par le collectif, a fait des centaines de blessés et de disparus, at-il indiqué, précisant que certains habitants ont été abattus ou se sont noyés en tentant de fuir à travers le Nil.
Depuis le début de la guerre en avril 2023, l’armée et les paramilitaires ont été accusés de crimes de guerre.
Les FSR, que les Etats-Unis ont accusés en janvier de génocide, sont tristement célèbres pour des exécutions sommaires, des actes de nettoyage ethnique et des violences sexuelles systématiques.
La guerre a fait des dizaines de milliers de morts, déplacés plus de 12 millions de personnes et engendré ce que l’International Rescue Committee qualifie de « plus grande crise humanitaire jamais enregistrée ».
– Des corps dans les rues –
Les deux camps partagent l’État du Nil Blanc, qui s’étend de la zone au sud de Khartoum jusqu’à la frontière avec le Soudan du Sud.
L’armée soudanaise contrôle le sud, notamment Rabak, la capitale de l’Etat du Nil Blanc, ainsi que deux grandes villes et une base militaire stratégique.
Les FSR, de leur côté, respectent le nord, limitrophe de la capitale soudanaise, une région où se trouvent notamment les villages où les récentes attaques ont eu lieu.
Affirmant ne pas être en mesure de confirmer le bilan, une source médicale à fait état lundi de « corps gisent encore dans les rues, et d’autres personnes tuées chez elles sans que personne ne puisse les atteindre ».
Les combats se sont intensifiés ces dernières semaines, l’armée tentant de reprendre aux FSR le contrôle total de Khartoum.
Le collectif d’avocats a accusé mardi l’armée d’agressions « barbares » contre des civils dans l’est de Khartoum, quelques jours après une attaque des FSR ayant fait six morts dans la même zone.
Il a affirmé que des civils du district du Nil oriental, dans le grand Khartoum, accusés de collaboration avec les FSR, avaient été victimes de « meurtres, disparitions forcées et arrestations arbitraires » perpétrées par des individus liés à l’armée.
Les avocats avaient fait état samedi de six civils tués dans le district du Nil oriental par les paramilitaires, qu’ils accusent d’agressions répétées et d’avoir tiré sans discernement sur des zones surpeuplées.
Les combats entre l’armée et les paramilitaires se sont intensifiés ces dernières semaines, l’armée tentant de reprendre aux FSR le contrôle total de Khartoum.
L’Unicef, l’agence de l’ONU pour l’enfance, a alerté dimanche sur la situation des civils pris au piège d' »un cauchemar vivant » dans et autour de la capitale.
Elle a fait état de témoignages alarmants sur des familles séparées, des enfants disparus, détenus ou enlevés, et des violences sexuelles.
– Embargo sur les armes –
Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a déclaré mardi une « impunité enracinée » qui alimente de graves violations des droits humains.
« Les attaques continuent et délibérées » contre les civils, avec notamment « des exécutions sommaires, violences sexuelles et autres violations et abus, soulignant l’échec total » des deux camps à respecter le droit international humanitaire, a-t-il affirmé dans un communiqué.
L’ONU a également appelé à l’élargissement de la compétence de la Cour pénale internationale ainsi qu’à l’extension de l’embargo sur les armes –en vigueur depuis 2004– à l’ensemble du Soudan, et non plus uniquement à la vaste région du Darfour (ouest).
Le Darfour, qui abrite près du quart de la population du Soudan, a connu une escalade des violences ces dernières semaines, les FSR cherchant à consolider leur emprise sur la région.
L’ONU affirme que des milliers de familles ont fui les attaques des FSR contre les villages autour d’el-Facher, capitale de l’Etat du Darfour-Nord et seule grande ville de la région échappant à son contrôle.
Les FSR ont lancé la semaine dernière une attaque meurtrière contre le camp de déplacés de Zamzam assiégé et frappé par la famine, près d’el-Facher.
AFP