De pays semi-féodal à l’histoire riche mais qui n’a pas toujours coulé comme un fleuve tranquille, la Chine s’est hissée au rang des puissances économiques du monde. Une ascension que la République populaire a construite en s’appuyant sur son héritage culturel, la reprise de son destin en main, mais surtout son ouverture réussie au reste du monde.
Par nos envoyés spéciaux en Chine, Malick CISS et Oumar KANDE
BEIJING – En moins d’un siècle, la République populaire de Chine est passée de pays sous-développé à deuxième puissance économique mondiale qui titille les Etats-Unis. Un grand bond en avant qui s’est fait patiemment mais sûrement. « Il faut jeter les bases d’abord pour mieux s’envoler ensuite ». Cette phrase déclinée par unspécialiste de la Chine sous le sceau de l’anonymat, illustre les succès de cette longue marche vers le développement, parfois parsemé d’obstacles, mais vite contournés.
C’était au cours d’une session de formation que le pays fait en faveur de journalistes et responsables de médias sénégalais, du 16 au 30 juillet. Enracinée dans son histoire parfois tumultueuse, ce pays à la civilisation qui a traversé cinq millénaires (il a connu 400 empereurs et 16 dynasties), réunissait pourtant toutes les conditions pour sombrer dans la misère. Envahie et dépecée par les pays occidentaux notamment la France et la Grande-Bretagne (les guerres de l’opium de 1840 et 1856), la Chine, qui se veut aujourd’hui un exemple de résilience et de dynamisme pour le Tiers-monde, a pris son destin en main avec fermeté après la Révolution de 1949. Ceci en se lançant à lui-même le défi de dépasser l’Angleterre, puissance planétaire d’alors, et les Etats-Unis, explique Li Hongfeng de la Beijing foreign studies university.
Sous l’égide du Parti communiste chinois (Pcc) triomphant après la Révolution du 1er octobre 1949, conduit par son leader Mao Zedong, la République populaire initie le Grand bond en avant (1968-1962) avec comme slogan « Plus nombreux, plus vite, plus efficace et plus économique », explique Mme Li. Puis il se lance dans une Grande révolution culturelle (1966 à 1967). Les autorités d’alors savent apprendre des erreurs et insuffisances de leur stratégie. « La force du Parti communiste chinois est de tirer des leçons.
Cette force d’autocritique permet d’éviter de reproduire les mêmes erreurs », explique-t-elle. Pays très hermétique, la Chine s’est résolue à enclencher son ouverture économique, à partir de 1978. Mais elle s’était déjà fait une religion : « si on veut s’enrichir, il faut construire des routes », dit la sagesse chinoise. La même année, lors du 11e congrès du Pcc, non seulement le pays accepte de rechercher la vérité dans les errements du passé (notamment les statistiques fausses), mais il priorise la modernisation socialiste, instaure le centralisme démocratique dans la prise de décision et lance une réforme agraire.
Les fruits des réformes
Deng Xiao Ping, revenu aux commandes, jette les jalons des nouvelles réformes de 1979 à 1985 (ouverture commerciale, réforme du secteur du commerce, ambitions pour le marché intérieur mais aussi mondial). « Alors, depuis 1990, la Chine a commencé à ressentir les fruits des réformes, avec la hausse du Produit intérieur brut(Pib), l’import-export, les investissements directs étrangers), note la source anonyme. Mais « pour construire un pays, il faut des talents, l’éducation est importante. Confucius demandait de donner une éducation équitable à tout le monde. On lance alors la campagne d’éradication de l’analphabétisme », ajoute-t-il.
Le pays compte aussi sur ses femmes pour avancer, alors le mariage arrangé est aboli, permettant à 16 millions de femmes de s’alphabétiser dans les années 1950. On donne corps à la citation de Mao : « la femme est la moitié du ciel », donc elle doit jouer un rôle essentiel dans la société chinoise.
L’ouverture économique s’adosse sur les Zones économiques spéciales (Zes), qui ont généré plus de 90% des emplois créés par les entreprises privées. Arrivé au pouvoir en mars 2013 après les présidents Jiang Zemin et Hu Jintao, l’actuel dirigeant du pays, Xi Jinping, souligne l’importance de la « prospérité commune » qui vise à réduire les inégalités socioéconomiques, va en croisade contre la pauvreté et la corruption. « Nous avons un objectif grandiose : donner une vie meilleure à tous », disait-il.
Le système d’économie de marché socialiste, combinaison de la propriété sociale des moyens de production par l’Etat et mécanismes d’une économie de marché, montre ses avantages. Le pays développe le marché des capitaux, privatise la quasi-totalité des Pme publiques, libéralise les prix pour s’assurer un essor économique.
La population rurale pauvre, qui était de 70 millions en 2015, chute à 30,46 millions en 2017 et à 16,6 millions à fin 2018, explique l’expert anonyme. La santé est érigée au rang de priorité avec 6,2% du Pib, soit le double de celui de la défense, ajoute-t-il.
Les réformes et l’ouverture engagent le pays sur la voie du développement économique rapide, constate Li Hongfeng. Le Pib par habitant, qui était de 156 dollars en 1978, bondit selon les régions du pays (11530 dollars à l’Est, 7280 dollars au Centre et 6800 à l’Ouest). La meilleure illustration du dynamisme économique chinois, c’est la Zes de Shenzen, qui était un petit village de pêcheurs de200 habitants. Devenue aujourd’hui une grande ville, Shenzen a un Pib qui s’élève à 349 milliards de dollars et une population d’environ 25 millions d’habitants et 328.000 entreprises privées, rappelle Li Hongfeng.