Parce qu’elles sont censées transmettre des valeurs fortes aux enfants, les femmes ont toujours dû faire face à de fortes exigences dans toutes les sociétés humaines. Celles-ci ont tenu à mettre la barre très haut pour les protéger. Et c’est parce que la femme, mère, sœur et épouse est un trésor pour l’humanité.
Certains vont jusqu’à dire que l’homme est le cerveau et la femme le cœur. Elle représente également le sexe fort à préserver du mal incarné par les mâles, en quête naturellement de sensations fortes et de volupté. Des garde-fous établis, dans cette optique, ont imposé à la femme l’obligation de se conformer aux attentes des autres et aux conventions sociales. Et ce n’est pas fortuit, si on lui colle l’étiquette de gardienne du patrimoine traditionnel, moral, culturel et religieux. Son existence et sa présence donnent un sens à la vie humaine. Elle illumine l’univers.
Du coup, elle a bénéficié d’un traitement qui frise, aux yeux des réformistes, une privation de ses droits, de sa liberté d’agir et d’user de son corps comme bon lui semble. Dans cette logique, le voile ou foulard de tête, cette étoffe symbolique, drapée sous plusieurs appellations à l’échelle mondiale, passe souvent comme un frein à l’épanouissement de la femme. Le voile islamique s’est positionné sur la ligne de mire de plusieurs militants de la cause féminine. Ils ont voulu libérer la femme du joug traditionnel et des masculinités dominantes. Dans leur raisonnement, la femme a le droit de disposer de son corps à sa guise, quitte à en faire un objet sexuel ou un outil de marketing. Le mouvement islamique de libération de la femme sonne creux pour eux.
Si l’existence du voile est antérieure à l’avènement de la religion musulmane, des chercheurs et intellectuels ont démontré à l’envi que l’islam édicte des règles tenant compte de la psychologie des deux sexes, « l’esprit de la séduction ou de la chasse chez l’homme d’une part, et la crédulité de la femme concernant la fidélité et la sincérité de l’homme d’autre part ». La célébration récemment du « hidjab day », dans notre pays, a montré que la réalité est toute autre. Que souvent les grilles d’analyse et de lecture sont embrouillées par le voile épais de l’ignorance ou des stéréotypes sexistes. Cette journée a dévoilé la grandeur et le charme de toutes ces femmes qui ont pris l’option de se voiler.
Elles ont revendiqué et assumé leurs droits de porter le voile en toute responsabilité. Elles donnent raison à un auteur français qui lance tout de go que la gent féminine doit être « libre à la femme de porter ou non le voile, en connaissance de cause, et non sous les pressions sociale, politique ou patriarcale ! » Les initiatrices du « hidjab day », loin de subir l’influence des « frères islamistes », ont montré que la décence rime bien avec l’élégance. Que le voile, une prescription de la religion musulmane, loin d’embrigader la musulmane, préserve son honorabilité, la place sur un piédestal et lui octroie tous les droits. Que le port du voile, loin d’être également cette injonction archaïque des hommes visant à reléguer les femmes en arrière-plan, la protège de toute instrumentalisation de son corps, qu’il ne constitue pas un signe ostentatoire ou un symbole de domination masculine. Que les femmes ne méritent pas des restrictions pour avoir adopté librement ce style vestimentaire encourageant parfois leurs filles à suivre leurs pas.
Elles ont étalé leur charme et mis à nu, à travers le voile, leur personnalité et leur capacité à faire des choix vestimentaires adaptés à leurs goûts et à leurs convictions. Les réseaux sociaux ont amplifié l’importance de cette date, en mettant le projecteur sur des femmes épanouies intellectuellement et inspirantes. Derrière un « écran » ou « un rideau », autre appellation du voile, elles exposent une belle façon d’allier modernité, tradition et religion. Dans un ouvrage collectif publié avec deux autres chercheures, l’écrivaine Yasmina Foher-Janssens semble montrer qu’elle est bien révolue l’époque où « son usage repose sur la règle, édictée par les hommes, selon laquelle une femme convenable ne doit pas se montrer dans l’espace public tête nue parce que c’est une marque d’impudeur ». Elles remettent au goût du jour une question d’actualité : pourquoi le voile est si souvent considéré comme une offense aux valeurs démocratiques… ?
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