Encore un immeuble effondré tel un château de cartes. Encore des morts, encore des larmes. À force, on va finir par croire que le béton sénégalais est fait à base de lait en poudre et de prières improvisées. Onze morts à Touba parce qu’un bâtiment a décidé de faire une sieste éternelle sur ses habitants.
Le ministre parle de « négligence avérée », citant un rapport technique. Traduction : certains savaient, mais personne n’a rien fait. Pendant ce temps, 1 400 autres bâtiments à Dakar, menaçant ruine, font la queue pour s’écrouler à leur tour poliment. On construit des étages comme on construit des promesses : à la va-vite, sans fondations solides, mais avec beaucoup de foi… et une bonne dose de « Yallah bakhna ».
Après chaque drame, on pleure, on s’indigne, on cause beaucoup puis on tourne la page. Jusqu’à ce qu’un autre immeuble nous la replie sur le crâne. Et ce laxisme ne s’arrête pas aux murs : sur nos routes, dans nos écoles, dans nos hôpitaux, c’est le même béton mou de l’indifférence. Au pays du Joola, de Sakal, de Sikilo, l’oubli est un matériau de construction. Et visiblement, il est en stock illimité. salla.gueye@lesoleil.sn