C’est l’heure des comptes. Après près de deux semaines de négociations, la Cop 30 a livré son verdict. Le texte final adopté aux forceps à l’issue de la Cop 30 offre au Sénégal des avancées significatives dans plusieurs domaines essentiels à sa stratégie climatique. Bien sûr, la messe climatique en Amazonie n’est pas une révolution, car l’accord ne bouleverse pas l’architecture des négociations internationales. Mais il ouvre de nouveaux leviers pour renforcer la résilience du Sénégal en matière de sécurisation des financements et de défense d’une transition énergétique adaptée à ses réalités.
La première avancée majeure constitue la reconnaissance explicite de la vulnérabilité des zones côtières. Le Sénégal milite depuis plusieurs années pour que les pays côtiers africains soient davantage pris en compte dans les décisions climatiques. À Belém, cette revendication a trouvé un écho. L’érosion accélérée, la salinisation des terres et les risques d’inondations figurent désormais parmi les priorités du cadre d’adaptation adopté. Cette acceptation permet d’espérer une meilleure orientation des financements vers des projets structurants à Dakar, Saint-Louis, Bargny ou encore dans la Petite côte. Deuxièmement, le mécanisme « Pertes et dommages » sort renforcé. Les pays en développement dont le Sénégal obtiennent ainsi un dispositif clarifié et doté de lignes directrices opérationnelles. Au Sénégal, classé 32e pays le plus vulnérable au changement climatique, selon le ministère de l’Environnement, cette avancée devrait faciliter le financement d’actions de relogement, de protection du littoral et de restauration des écosystèmes fragilisés. Pour un pays où les chocs climatiques mobilisent chaque année des ressources budgétaires importantes, ce progrès représente un soutien attendu depuis longtemps. Sur le volet financier, Belém réaffirme l’engagement des pays développés à augmenter les ressources disponibles pour l’adaptation. Une orientation qui pourrait permettre au Sénégal d’accélérer la mise en œuvre de ses projets d’hydraulique, d’agriculture résiliente, d’assainissement et de gestion des risques climatiques.
La transition énergétique n’a pas été oubliée. Le texte final appelle à une «sortie accélérée des énergies fossiles» tout en reconnaissant la diversité des trajectoires nationales. Une formulation jugée équilibrée par la délégation sénégalaise qui défend l’utilisation du gaz comme énergie de transition, le temps de renforcer la part des renouvelables dans le mix énergétique. Cette position, désormais mieux comprise à l’international, offre au Sénégal la possibilité de poursuivre son développement tout en respectant ses engagements climatiques. Enfin, la Cop 30 aura permis au Sénégal de consolider sa diplomatie climatique. En effet, le pays est membre du Groupe des Pays les moins avancés (Pma), du Groupe africain et du Groupe G77+Chine. Cette présence dans plusieurs groupes de négociation a permis au pays de faire entendre sa voix, notamment sur les enjeux liés à l’équité, au financement et à la justice climatique.
Une visibilité renforcée qui lui ouvre davantage de marges pour défendre ses priorités dans les prochaines échéances, dont la Cop 31 prévue en 2026 en Turquie. L’accord de Belém n’est pas un tournant historique, mais il constitue, pour le Sénégal, une étape décisive. Ses vulnérabilités sont mieux reconnues et ses ambitions trouvent un espace pour s’exprimer. Reste désormais à transformer ces avancées diplomatiques en actions concrètes au service des populations les plus exposées. Yoff, Bargny Rufisque, Djiffer, Guet Ndar, Gandiol n’attendent que ça.
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