Longtemps perçu comme un modèle de stabilité et de cohésion sociale, le Sénégal est aujourd’hui confronté à un défi majeur : la progression des discours ethnicistes voire communautaires. Les propos virulents de la chroniqueuse Ngoné Saliou Diop, tenus le 30 septembre dernier, lors d’une émission sur la chaîne YouTube Sans Limites, sont de nature à « saper » l’unité nationale.
Après avoir critiqué la gouvernance de l’ancien président de la République, Macky Sall, elle est allée jusqu’à qualifier son appartenance ethnique d’une manière jugée offensante. Des tiers ont porté plainte contre elle pour « injures publiques, discours contraire aux bonnes mœurs et atteinte à l’honneur d’une communauté, … ». Le collectif pour la défense de la cohésion nationale a fait pareil en déposant des plaintes ayant abouti à la convocation et à l’audition de la chroniqueuse, le lundi 6 octobre 2025, par la Division spéciale de cybersécurité (Dsc). Puis elle a été libérée. Minimiser la gravité du discours de la chroniqueuse, c’est faire fi de l’importance de la paix sociale dans un pays comme le nôtre.
D’autres ont même fouiné dans les archives rappelant que quelqu’un avait tenu de pareils propos, mais n’a jamais été inquieté. Mais devons-nous reproduire les mêmes erreurs ? Devons-nous cautionner ces propos virulents ou nous en indigner ? En prétextant ce triste épisode, le risque c’est de tomber dans le fatalisme de mauvais aloi, à savoir que rien de mal n’arrive à notre pays béni par ses illustres saints et ancêtres. Mais dans son recueil posthume : « Pensées », le philosophe et moraliste français, Blaise Pascal, nous rappelle : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà ». Tout est question de contexte. Ce qui est peut-être perçu comme vérité aujourd’hui, peut ne pas l’être dans une autre circonstance et vice versa. Dans la foulée, l’honorable Serigne Pape Makhtar Kébé a, lui aussi, été injustement « injurié » et « menacé » par des tiers à la suite d’un de ses enseignements inspirés des leçons de Seydil Hadj Malick Sy (Maodo).
Des organisations proches de la hadara de Tivaouane qualifient cette « dérive d’inacceptable » dans une société qui a toujours puisé sa cohésion et sa stabilité dans le respect des guides religieux et la valeur de la parole spirituelle. Alors que le message universel de Maodo, Seydil Hadj Malick Sy, dans son immense sagesse, ne s’adressait jamais « à une ethnie particulière ni à une appartenance communautaire fermée ». Pour rien au monde, nous ne devons monnayer la paix sociale. Car, il n’y a pas une meilleure richesse. Préserver le vivre ensemble passe d’abord par s’indigner et condamner ces discours discourtois, à caractère ethniciste. Notre pays doit sa réputation à ses ressorts solides notamment la paix et la cohésion sociale. Nous ne devons donc pas saper ces fondements qui constituent le ciment de l’unité nationale. Fort heureusement, les mis en cause ont battu leur coulpe en faisant amende honorable et en présentant leurs excuses aux personnes qui se sont senties atteintes dans leur dignité et leur honorabilité.
Certes, une faute reconnue est à moitié pardonnée, mais la voie judiciaire doit suivre son cours. Pour l’exemple. En le faisant, on décourage toute velléité de récidive. On évitera ainsi de dresser les uns contre les autres. Car, les équilibres sont fragiles et nous devons y veiller jalousement en prêchant la paix partout et à tout temps. « Le Sénégal est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion.
Elle respecte toutes les croyances », stipule le premier article de la Constitution. La diversité culturelle, ethnique et religieuse, loin d’être une faiblesse, a constamment été une richesse. Cet héritage, construit par des générations, ne doit pas être terni par des discours de haine et de division. C’est une base solide pour le vivre ensemble, mais qui nécessite la vigilance et l’engagement de tout un chacun pour perdurer. Cet esprit de paix, au cœur des valeurs sénégalaises, doit être préservé face aux nouveaux défis posés par les discours qui divisent. Préserver l’unité nationale est un devoir envers les générations futures et un engagement pour un avenir serein.