L’Afrique connaît une hausse de la consommation de drogues et une expansion des réseaux criminels.
L’information est de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc). (Rapport mondial sur les drogues 2024 publié sur le site web de l’Onudc : https://www.unodc.org/unodc/en/data-and-analysis/world-drug-report-2024.html). Ledit document montre qu’en 2022, 30 millions de personnes auraient consommé des amphétamines en 2021 dans le monde, même si, précise l’Onudc, « le cannabis reste la principale drogue qui fait l’objet d’achats, de trafic et de consommation en Afrique ». Depuis le début des années 2000, le continent est de plus en plus utilisé comme zone de transit pour des drogues comme la cocaïne, l’héroïne ou la méthamphétamine.
La cocaïne en provenance d’Amérique latine et à destination de l’Europe transite par l’Afrique de l’Ouest et du Nord, tandis que l’héroïne en provenance d’Asie du Sud-Ouest et à destination de l’Europe transite par l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe, et la méthamphétamine est acheminée depuis l’Asie du Sud-Ouest vers l’Afrique australe et l’Afrique de l’Est pour être consommée sur place ou réexportée, principalement vers l’Asie de l’Est et du Sud-Est. Le pire, c’est que les drogues qui transitent par l’Afrique sont maintenant proposées sur les marchés locaux. La région ouest-africaine est passée d’une simple zone de transit à une zone de forte consommation de drogues. Amado Philip de Andrés, responsable de l’Onudc à Dakar, alertait déjà en 2022 sur le phénomène. « Avant, nous observions qu’entre 5 % et 8 % de la cocaïne qui transitait par la région restait sur place. Aujourd’hui, ce taux est passé à 10 %, voire 17 %. Cela indique qu’une base de consommateurs se développe au niveau régional et c’est une grande source d’inquiétude », disait-il. Au Sénégal, 2.605,16 kg de cocaïne ont été saisis en 2024 par les unités douanières sur l’ensemble du territoire et incinérés dans les fours de la Sococim. La contrevaleur totale de la drogue incinérée est évaluée à plus de 208 milliards de FCfa. (https://www.douanes.sn). Ce chiffre est révélateur.
Mais qui connaît réellement la quantité de drogues ayant circulé et échappé à la vigilance des Forces de défense et de sécurité (Fds) dans notre pays ? Par exemple, dans le Bignona, ce sont des hectares de champs de cannabis que l’Armée cherche désespérément à faire disparaître. Le cannabis qui, d’après l’organisation onusienne (Onudc), « reste l’une des drogues les plus nocives sur le continent » et demeure « la drogue pour laquelle le nombre de personnes admises en traitement est le plus élevé ». Outre le cannabis, différents types de drogues (cocaïne, héroïne, méthamphétamine, entre autres) se retrouvent sur nos marchés locaux, favorisant la forte consommation, notamment chez les jeunes. En tout cas, ils sont nombreux, les cas d’overdose chez les jeunes révélés par la presse dans notre pays.
En effet, l’implication de plus en plus de jeunes dans la consommation de drogues est attestée par plusieurs études. D’après le Dr Karim Diop, Sg du Centre régional de recherche et de formation à la prise en charge de Fann (Crcf), « la jeunesse est de plus en plus impliquée dans la consommation de drogues ». (Cf. Scidaf 2024 : Sciences sociales et drogues en Afrique francophone). Quant au Dr Jean Augustin Diégane Tine, chef de la Division santé mentale au ministère de la Santé et de l’Action sociale en 2021, son rapport a révélé que le nombre de patients reçus dans les structures psychiatriques et addictologiques durant l’année 2021 pour un motif de consultation de consommation de drogues est de 6.607 patients. Comparativement à 2020, il y a eu un bond significatif de plus de 3.562 patients. Les caractéristiques sociodémographiques des patients montrent que les hommes étaient majoritaires à 82,5 %.
Les célibataires représentaient 70,06 %. Plus grave, ce sont les patients âgés de 20 à 24 ans chez qui la consommation de substances psychoactives a été la plus retrouvée. (Cf. Rapport national sur la prise en charge des usagers de drogues et d’alcools au Sénégal. Année 2021). Faut-il rappeler que cette forte consommation de drogues a des conséquences à la fois sociales et économiques. En effet, du commerce illicite de drogues ne résulte que souffrances : violences familiales, stigmatisation, discrimination, augmentation de la criminalité, mise à rude épreuve du système de santé publique. L’Onudc estime à 64 millions le nombre de personnes souffrant de troubles liés à l’usage des drogues dans le monde en 2022.
daouda.mane@lesoleil.sn