Dans nos poches, sur nos bureaux, une nouvelle forme de confident a pris place : l’IA. Pour beaucoup, elle n’est plus un simple outil mais un véritable conseiller, un interlocuteur toujours disponible. Nous lui confions nos soucis quotidiens, nos angoisses, nos espoirs.
À toute heure, sans jugement ni filtre, l’IA écoute. Elle propose des conseils, des analyses, des pistes de réflexion. C’est une présence rassurante pour les utilisateurs de l’outil, un miroir numérique dans lequel on peut se livrer sans peur d’être jugé. Mais ce confort a un coût. À force de nous ouvrir à un algorithme, l’humanisme en prend un coup. La question se pose : à qui se confier aujourd’hui ? Les amis sont occupés, la famille peut être jugeante ou ne pas comprendre. Les relations humaines, avec leurs complexités, leurs fragilités et leurs exigences, peuvent sembler plus difficiles à naviguer que le dialogue fluide et prédictible avec une IA.
Cette tendance révèle une facette troublante de notre société : la solitude grandissante. Si l’IA devient notre principal confident, cela signifie-t-il que nous avons perdu le lien avec les autres ? Ou bien l’IA ne fait-elle que combler un vide que les relations humaines n’arrivent plus à remplir ? L’IA est efficace. Elle peut synthétiser des informations, proposer des solutions et donner des perspectives rationnelles. Mais peut-elle remplacer un ami qui nous prend dans ses bras ? Peut-elle nous offrir l’empathie d’un proche qui partage nos peines et nos joies ? La chaleur d’une conversation autour d’un café ? L’IA offre un refuge, un espace de parole sûr et anonyme. Mais ce refuge ne risque-t-il pas de nous isoler encore plus ? En nous habituant à cette facilité, nous pourrions perdre le courage et l’habitude de nous confier à un être humain.
L’IA peut nous conseiller, mais elle ne peut pas nous réconforter avec un contact physique ou un regard bienveillant. Elle peut nous écouter, mais elle ne peut pas pleurer avec nous. L’émergence de l’IA comme confident est un signal d’alarme. C’est l’occasion de nous interroger sur la qualité de nos relations, sur notre capacité à être présent les uns pour les autres.
L’IA n’est pas le problème, mais le symptôme. Il est peut-être temps de réapprendre à nous confier à nos amis, à nos familles. De reconstruire des liens, d’accepter la vulnérabilité que cela implique. L’IA peut être un complément, un outil utile pour organiser nos pensées ou obtenir des informations, mais elle ne devrait jamais remplacer le contact humain, l’échange de cœur à cœur. C’est dans ces moments de partage et d’empathie que réside la véritable essence de l’humanisme.
Cheikh Tidiane NDIAYE