«Les femmes ne se mettent pas devant dans nos bus ». Cette phrase, servie à une passagère, la semaine dernière, dans le cadre d’un voyage interurbain, a créé un tollé sur les réseaux sociaux. La scène se passe au Sénégal, présenté comme un État de droit. Si certains s’interrogent sur la véracité d’une telle information difficile à accepter et à comprendre, des internautes n’ont pas manqué de déverser leur bile sur ces adeptes de pratiques moyenâgeuses.
Ils n’ont pas supporté qu’on puisse intimer à une femme l’ordre de quitter la première place qui lui avait été réservée pour chercher un siège à partir de la 5e rangée. Comme quoi, ils sont encore légion, dans notre pays, les nostalgiques de la période antique. Ils n’ont pas réussi à passer un filtre dans la gorge des internautes. Ceux-ci ont tiré à boulets rouges sur l’agence de voyage qui a établi ces règles désuètes, malgré les progrès de la science, la conscientisation des masses et la littérature développée pour lutter contre la « chosification de la femme ». Malgré son caractère loufoque, cette posture, qui dévie des véritables enjeux, invite au moins à la réflexion. Elle rappelle une triste réalité : le diable est vraiment dans les détails. Des esprits tiennent encore à adapter leur monture aux principes de la misogynie. Ils ne veulent pas traiter les femmes de la même façon que les hommes. Ils se plaisent à les infantiliser ou à les traiter avec mépris.
Ils veulent placer le diable dans le corps de la femme. Il faut encore un parcours de combattant pour lutter contre des « idées surannées » et pousser des esprits rigides à nourrir des pensées positives. Des poches de résistance ont la peau dure dans notre pays. Leurs tenants s’accrochent encore à l’idée que la femme est faite pour demeurer en arrière-plan. Peut-être, pensent-ils qu’à travers cette approche, ils peuvent lui empêcher de titiller « leurs cordes sensibles » ? Généralement, ceux-là qui sont incapables de contrôler leurs pulsions sexuelles érigent des barrières. Ils révèlent ainsi leurs faiblesses. Des auteurs, comme le philosophe italien Julios Evola, ont évoqué, dans leurs écrits, l’existence de cette espèce qui continue à se laisser guider par « un besoin biologique le plus primitif ». Ils ne sont pas en mesure de faire montre « d’un indifférentisme sexuel » comme les grands esprits. Dans son ouvrage « Les droits de la femme en islam », Ayatolah Mortadhâ Motahhary, qui établit des similitudes entre les aptitudes et les besoins de l’homme et ceux de la femme, parle aussi « des droits et des obligations similaires ». Il cherche aussi à montrer à quels égards « les deux ont des positions dissemblables et, par conséquent, doivent avoir des obligations et des droits dissemblables. »
Il se demande si « la dissemblance entre l’homme et la femme, sur le plan biologique et physiologique, doit conduire ou non à la dissemblance de leurs droits et responsabilités respectifs « non sans préciser que la dissemblance est en soi l’une des pièces maîtresses de la création. » En parcourant son ouvrage, on essaie de trouver des explications sur le comportement de ceux qui croient que « seule la passion peut unir l’homme et la femme » même s’il précise que l’union matrimoniale dépasse même ce cadre, que l’affection et la compassion sont plus sublimes que la passion. Il aide également à cerner la psychologie de l’humain soulignant que « l’homme est un combattant et un chasseur par nature, son action est offensive. La femme représente pour lui un corps dont il doit s’emparer et qu’il lui faut posséder. La femme parle pour l’intérêt collectif, et l’homme pour l’intérêt individuel ».
S’ils sont nombreux à faire exception à cette règle, des écrivains ont rappelé, sur la base d’une démarche scientifique, que les membres du sexe masculin n’hésitent pas à engager un duel pour conquérir une femme. « Ils se sont même battus les uns avec les autres dans ce but. Mais les membres du sexe féminin n’ont jamais montré une telle ardeur pour gagner un mâle. Il en est ainsi parce que les rôles respectifs de l’homme et de la femme ne sont pas identiques. Le mâle poursuit toujours une femelle, alors que la femelle affiche une sorte d’indifférence à l’égard du mâle », selon Ayatolah Mortadhâ Motahhary. Comme quoi, ceux qui cherchent le mal chez la femme font fausse route. Le diable est dans leurs regards. matel.bocoum@lesoleil.sn