Depuis des années, les alertes contre le péril plastique n’ont jamais cessé.
Il y a 10 ans, lorsque le gouvernement sénégalais a décidé de prendre le taureau par les cornes en votant la Loi 2015-19 du 4 mai 2015 qui, dit-il, sera appliquée dans « toute sa rigueur », les citoyens soucieux du cadre de vie avaient poussé un ouf de soulagement. Enfin, nos villes, particulièrement notre capitale, Dakar, seront moins enlaidies et peut-être, deviendront comme la capitale rwandaise, Kigali, l’une des villes sinon la ville la plus propre d’Afrique.
Hélas ! Ce fut « 10 ans d’inapplication de la loi » pour reprendre le titre de l’article du « Soleil » sur la pollution plastique. (Cf. Le Soleil du 2 juin 2025). En tout cas, l’effet escompté ne s’est pas produit et le plastique continue de s’imposer, au grand dam des nostalgiques de la belle Dakar. Les habitants de la capitale n’ayant pas changé de mode de consommation et la volonté politique ayant fait gravement défaut. La sauvegarde des emplois y est sans doute pour quelque chose.
Car, au Sénégal, « cette nouvelle réglementation menace près de 35.000 emplois de jeunes et de femmes, particulièrement investis dans la vente d’eau en sachet, et a également des répercussions sur les consommateurs, qui font face au coût élevé des emballages alternatifs qui s’est répercuté sur le prix de différents produits ». (Cf. Fonds d’innovation pour le développement : https://www.fundinnovation.dev). D’après « Le Soleil » qui cite les statistiques du ministère de l’Environnement et de la Transition écologique, « la région de Dakar a un potentiel journalier de production de 1.500 tonnes de déchets solides urbains, soit 99.700 tonnes par an dont les emballages plastiques représentent 78 % ».
Le pire, fait remarquer le ministère, il a été noté une « augmentation relative de près de 15 % de déchets plastiques en 15 ans ». En réalité, « le pays produit, chaque année, 280.000 tonnes de déchets plastiques, un volume qui pourrait tripler d’ici à 2060 ». (Source : Le Soleil du 6, 7, 8 et 9 juin 2025). Ces déchets plastiques se retrouvent déversés dans la nature, affectant la qualité de l’eau, les sols et la santé des populations.
Toutefois, il faut reconnaître que le phénomène est mondial. D’après l’Institut supérieur de l’environnement (Ise) de France, « en 2021, 460 millions de tonnes de plastiques ont été produites dans le monde contre 2,3 millions de tonnes en 1950 » (Source : Le blog de l’Ise, Impact du plastique sur l’environnement : un fléau planétaire, décembre 2024). La Banque mondiale d’affirmer qu’« au cours des 60 dernières années, 8,3 milliards de tonnes de plastique ont été produites dans le monde, mais seulement 9,5 % d’entre elles ont été recyclées ». (https://www.banquemondiale.org, 2022).
Malgré les efforts des États, le plastique semble avoir de l’avenir si rien n’est fait, puisque soutient l’Ocde, « en l’absence de politiques plus strictes, la politique et l’utilisation de plastiques devraient augmenter de 70 %, passant de 435 millions de tonnes en 2020 à 736 millions en 2040, avec seulement 6 % de plastiques provenant de sources recyclées ». (Source : Rapport publié en octobre 2024). Les conséquences sont terribles, le plastique pouvant exister des milliers d’années sans désagréger.
De surcroît, le fait de le brûler à l’air libre ainsi que sa production qui nécessite beaucoup d’énergie entraînent, d’après les experts, des émissions de gaz à effet de serre qui contribuent fortement au changement climatique. Le plastique peut tuer les animaux qui l’ingèrent, enlaidir le cadre de vie… Malheureusement, aucun milieu n’échappe à la pollution plastique. Pas même les mers et océans, grands régulateurs de notre vie sur terre. Seule une volonté politique affirmée peut venir à bout de ce fléau. Cela passe, certes, par l’application de la loi dans toute sa rigueur, mais aussi et surtout par la mise en place de mesure d’accompagnement ou d’alternatives au plastique. daouda.mane@lesoleil.sn