D’ici à la fin de l’année 2025, le Sénégal devrait se doter d’un nouveau Code minier. L’instruction est claire : le Chef de l’État l’a exigé mercredi dernier en Conseil des ministres.
Bassirou Diomaye Faye a demandé au gouvernement d’accélérer la finalisation d’un texte présenté comme stratégique. Ce serait la quatrième réforme du genre depuis 1988. Après les codes de 2003 et de 2016, le pays s’apprête donc, une nouvelle fois, à revisiter les règles encadrant l’activité minière. Pourtant, le Code de 2016, adopté à grand renfort de communication, avait été unanimement salué comme « l’un des meilleurs au monde ». Il se voulait inclusif, moderne, respectueux de l’environnement et des droits humains, et devait offrir à l’État un contrôle renforcé sur ses ressources minérales. Les innovations promises étaient nombreuses : zones promotionnelles, prévention des conflits d’intérêts, remboursement des coûts historiques, encadrement de l’exploitation semi-mécanisée, obligations de formation et d’emploi, adhésion à l’Itie, nouvelle clé de répartition des recettes, création de fonds de réhabilitation minière en phases d’exploration ou post-exploitation, etc.
La grande fierté du texte était le Fonds d’appui au développement local (Fadl) – et non le Fonds de développement des collectivités territoriales, comme indiqué par erreur lors du dernier Conseil des ministres – censé garantir des retombées tangibles pour les collectivités accueillant les opérations minières. Neuf ans plus tard, le constat est sans appel : ce Code présenté comme exemplaire n’a jamais tenu ses promesses. La plupart des innovations sont restées théoriques. Le cas du Fadl est particulièrement révélateur. Alimenté à hauteur de 0,5 % du chiffre d’affaires hors-taxe des entreprises minières, il devait constituer un outil puissant de développement local. Mais sa mise en œuvre a accumulé lenteurs et insuffisances. Le Comité national de suivi et d’évaluation du Fadl – pourtant pièce maîtresse du système – n’a été créé qu’en février 2025, soit neuf ans après l’adoption du Code. Un délai qui illustre la profonde déconnexion entre la production normative et son application. Autre exemple : le Fonds d’appui et de péréquation aux collectivités territoriales. Financé par 20 % des redevances minières, il n’a été distribué qu’une seule fois, en 2019. Pourtant, les recettes continuent d’affluer régulièrement dans les caisses de l’État.
On le répète souvent, le Sénégal excelle dans l’élaboration de lois, de codes et de dispositifs réglementaires. Mais lorsqu’il s’agit de les appliquer, le pays peine à suivre. Alors, pourquoi un nouveau Code minier ? Pour corriger ces dysfonctionnements ? C’est ce qu’on peut espérer. Ou s’agit-il plutôt d’un réflexe politique bien connu : « nouveau régime, nouveau code » ? On aimerait se tromper. Car si cette réforme se réduit à un exercice de communication, les populations continueront, elles, d’attendre les retombées annoncées. L’histoire des textes miniers au Sénégal est marquée par des révisions rapides et successives : le texte fondateur de 1961, le Code de 1988 – premier cadre moderne – puis celui de 2003, conçu pour attirer les investisseurs. Une décennie plus tard, il était déjà jugé obsolète. Le Code de 2016, pourtant présenté comme un modèle comme souligné supra, semble aujourd’hui suivre le même chemin puisque son processus de révision a été enclenché même s’il n’y a pas eu de communication là-dessus, poussant à se poser des questions sur son inclusivité. Bref, réformer n’a jamais été un problème au Sénégal. Appliquer les réformes, si. L’enjeu est désormais d’éviter que le prochain Code minier ne rejoigne la longue liste de textes ambitieux, mais inachevés, applaudis lors de leur adoption, puis, aussitôt relégués dans l’oubli.
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