L’audience accordée, le 28 avril dernier, par le roi du Maroc Mohamed VI, malgré sa convalescence aux trois ministres des Affaires étrangères des pays de la Confédération des États du Sahel (Aes), est illustrative des ambitions et aussi de l’attention que ce pays donne à son Initiative atlantique. Lancé le 6 novembre 2023, lors du 48e anniversaire de la Marche verte, ce projet combine à la fois agenda national et international en développant en même temps des relations économiques et diplomatiques avec les pays du Sahel en conformité avec la verticalité africaine de sa politique étrangère amorcée depuis plus de trois décennies. « Ainsi, pour favoriser l’accès des États du Sahel à l’océan Atlantique, nous proposons le lancement d’une initiative à l’échelle internationale », avait affirmé Mohammed VI, lors du lancement de cette initiative.
En étant parmi les premiers pays à se jeter à l’eau pour assurer un accès à la mer des pays de l’Aes et à d’autres Sahéliens comme le Tchad, le Maroc a ainsi déclenché la mère des batailles pour l’ouverture à l’océan Atlantique, point stratégique dans la projection de ces pays enclavés. Avec ses grands hubs maritimes comme Tanger Med, parmi les plus grands de ce monde, le Maroc, très en avance dans cette compétition maritime, a ainsi saisi l’opportunité d’accroitre son potentiel dans ce domaine et aussi dans le même temps, développer l’activité de ses ports secondaires situés dans les provinces du Sud comme Layoune et Dakhla et du coup apporter des solutions économiques à la crise du Sahara occidental qui, sur le plan politique, a engrangé d’importants succès comme la reconnaissance de la marocanité de ce territoire par beaucoup de puissances occidentales. À côté du royaume chérifien, certains pays ouest-africains comme le Togo ou le Ghana s’efforcent à s’incruster dans cette brèche pour ainsi se tailler des parts de marché dans cette course à la compétition maritime. Face au processus de désintégration de Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) entamé depuis le départ des pays de l’Aes (Mali, Burkina, Niger), il y a une résurgence de la compétition qui a rythmé l’économie maritime en Afrique de l’Ouest entre les ports de Dakar, d’Abidjan, Cotonou, Lomé et de Tema.
Situés sur la façade maritime, ces ports servent de points d’ancrage pour les pays de l’hinterland ouest-africain qui n’ont pas d’accès à la mer. Le port de Dakar en est ainsi pour le Mali, celui d’Abidjan ou de Tema pour le Burkina, Cotonou pour le Niger relevant ainsi les factures d’importations de ces pays et une importante rentrée de devises pour les pays côtiers concernés. À côté aussi, la Mauritanie, plus proche géographiquement de certains pays de l’Aes a aussi lancé il y a quelques années, son initiative maritime dénommée Projet de Port en eaux profondes (Pep) à Nouadhibou. Toujours à la recherche d’un partenaire privé prêt à financer ce projet qui permettra à la Mauritanie de bénéficier de son ouverture maritime, ce pays peut aussi se mettre dans les starting-blocks dans cette compétition maritime et ainsi devenir un point d’ouverture aux pays sahéliens qui avec la crise dans laquelle à la Cedeao est plongée sont obligés de tous chercher un accès à l’océan. Cette mère des batailles se mènera de manière âpre entre beaucoup de pays côtiers de la façade atlantique ; chacun de son côté cherchera à faire de son mieux pour ainsi devenir là où penchera la balance… oumar.ndiaye@lesoleil.sn