C’est connu de tous. Notre système éducatif a plusieurs défis à relever dont le plus crucial, à mon avis, demeure la pédagogie, c’est-à-dire, notre manière d’enseigner qui, faut-il le rappeler, discrimine souvent.
Or, « l’école n’a pas vocation à discriminer. Le handicap de l’élève peut être social et non médical, surtout lorsqu’on est issu d’une famille ayant des difficultés, défavorisée », soutient, dans une vidéo sur Facebook, Jean-Pierre, un enseignant français qui a 44 ans d’expérience, interrogé sur sa pédagogie. Il précise que « tout enfant a un potentiel extraordinaire, à condition que l’on parvienne à l’aider à le mettre en exergue et à progresser. Malheureusement, dans la plupart des cas, les pratiques sont restées les mêmes. On continue toujours à évaluer à travers la notation (les points) et l’on différencie les bons des mauvais élèves ». « Cette évaluation n’est-elle pas en elle-même subjective si l’on considère que celui qui évalue est aussi imparfait que celui qu’il évalue ? », se demande l’enseignant. Et Jean-Pierre propose de faire en sorte que les élèves soient actifs pour qu’ils soient acteurs de leurs apprentissages.
« Dans une pédagogie active, il y a du tutorat, de l’entraide, de la coopération. Personne n’est laissé sur le carreau, quelles que soient les difficultés », soutient Jean-Pierre. Cette pédagogie défendue par Jean-Pierre est définie comme étant « une approche éducative qui place l’apprenant au centre du processus d’apprentissage. L’élève n’est plus un récepteur passif de connaissances, mais « un acteur de son propre apprentissage, expérimentant, collaborant et échangeant avec ses pairs ». En d’autres termes, dans la pédagogie active, l’apprenant est un acteur, l’enseignant un guide. C’est donc « une méthode de formation engageante, vivante, permettant à l’apprenant une véritable immersion ». (Cf. https://www.besedeez.com / la pédagogie active, c’est quoi ?). Et si l’on s’inspirait du modèle finlandais ? Lequel met l’accent sur plusieurs exercices (8 au total) en classe. Dans son ouvrage intitulé « Ton enfant est hyperactif…ou pas. 10 règles à respecter avant de diagnostiquer », l’auteur et coach parental, Sam Dit Bien, explique ce modèle.
La Finlande, affirme Sam Dit Bien, « s’appuie sur la théorie de Gadner qui considère que tous les enfants ont des domaines dans lesquels ils sont plus ou moins doués. Il existe 8 types d’intelligence : langage, logico-mathématiques, spatial, musical, kinesthésique, interpersonnel, intrapersonnel et naturaliste. Ainsi, chaque exercice correspond à une intelligence et chaque élève se trouve doué pour une ou plusieurs de ces intelligences. Il n’y a donc jamais d’enfant meilleur que les autres et les rares fois qu’un enfant est en difficulté dans les 8 intelligences, c’est là que l’on détecte un trouble. L’enfant est alors pris en charge. Cette méthode permet un vrai suivi, d’une très grande qualité, car l’enfant n’est pas noyé dans une masse d’élèves en difficulté ». En France, poursuit Sam Dit Bien, « le programme scolaire propose d’explorer majoritairement 2 intelligences, celle du langage et celle de logico-mathématique. Les élèves qui ne sont pas bons dans ces 2 intelligences sont considérés comme de mauvais élèves, avec des troubles.
C’est dire que le pédagogue doit comprendre d’abord comment fonctionne l’enfant et adapter, ensuite, la stratégie au fur et à mesure qu’il grandit. Or, nous fonctionnons comme si ce sont les enfants qui doivent s’adapter au monde des adultes ». Ce modèle français est reproduit à l’identique au Sénégal. Ce qui est fortement dénoncé par des spécialistes comme le Dr Oumar Dioum. Le grand mathématicien, dans une vidéo, invite à s’inspirer du modèle anglo-saxon. « Un système normal, c’est un système dans lequel on essaie de faire réussir au moins 95 % des gens. Parce que les excellents, les très bons et les bons n’ont pas besoin de professeur. La vraie pédagogie, c’est tirer ceux qui sont moyens vers le haut », note l’enseignant.
Il est vrai que dans notre pays, rares sont des enseignants qui acceptent de perdre leur temps avec des élèves trainant des difficultés. Pourtant, d’après l’Unicef : « Éduquer les enfants et les aider à réaliser leur plus grand potentiel est possible au Sénégal ». Et selon l’organisation onusienne, bien que le Sénégal ait considérablement amélioré l’accès à l’éducation de base au cours des 20 dernières années, « 4 enfants sur 10 n’achèvent pas l’enseignement primaire et seulement 37 % terminent un cycle complet d’éducation de base ». (Cf. http : //www.unicef.org. : apprentissage du jeune enfant et éducation de base de qualité. 2021). Des statistiques qui doivent faire réfléchir.
daouda.mane@lesoleil.sn