Comme écrit dans une chronique publiée dans l’édition du 6 mars dernier et intitulé « Signe de blessures et lignes de factures », nous écrivons que « Le retour au pouvoir de Donald Trump a remis en cause une constance dans la politique extérieure américaine : le dialogue transatlantique avec l’Europe ».
Aujourd’hui que le débat sur une politique de défense commune en Europe est devenu irréversible et audible dans les prises de positions, la césure entre partenaires atlantiques semble visible. Avec les postures américaines plus préoccupées par le pivot Asiatique-Pacifique opéré dans la politique étrangère des États-Unis depuis plus d’une décennie, le Pacte Atlantique, un des plus solides au monde, est en eaux troubles. Cette zone de turbulence traversée aujourd’hui par ce partenariat a poussé les grandes nations européennes comme l’Allemagne et la France à voguer seules dans une nouvelle aventure dans la politique de défense. Avec 60 % du Pib mondial et 66 % de la croissance mondiale, l’Asie-Pacifique, avec la montée en puissance de la Chine, concentre plus les Etats-Unis que la vieille entente qui les lie à l’Europe qui avec l’âge est devenue chancelante et hésitante. Avec ses atouts, sa position à la charnière des océans Indien et Pacifique, son savoir-faire dans la gestion des flux extérieurs, ses compétences, sa force de travail, l’Asie-Pacifique centralise une bonne partie des chaines d’approvisionnement logistiques mondiales. Très naturel alors que le compas américain y pivote.
C’est aussi normal que les dirigeants européens le comprennent pour ainsi agir de la sorte. Ainsi d’ici 2030, l’Union européenne se dit prête à investir 800 milliards d’euros (plus de 524.800 milliards de FCfa), pour accélérer son rééquipement militaire. Le 4 mars dernier, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a annoncé ce méga plan intitulé « Réarmer l’Europe ». Depuis quelques années, les États européens ont déjà augmenté de 30 % leurs dépenses militaires, pour y consacrer collectivement quelque 326 milliards d’euros en 2024. Ainsi les européens veulent aller plus loin avec les tergiversations américaines à assurer via l’Alliance atlantique, le parapluie nucléaire à l’Europe face à la menace russe de plus en plus prégnante et pressante. Ce n’est pas la première fois que l’Alliance atlantique a connu des soubresauts. Plus grande coalition militaire au monde, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (Otan), modèle réussi et abouti d’alliance stratégique, a aussi connu ainsi des moments troubles jusqu’à ce que le Président français Emmanuel Macron parle de « mort cérébrale ».
Avec le retour de la guerre en Europe, cette alliance a été redynamisée et s’était positionnée pour devenir indispensable et incontournable dans la sécurité collective de beaucoup de pays, même si des membres éminents comme la France et l’Allemagne poursuivent leur politique d’autonomie stratégique. Face à l’immensité des défis, surtout par l’apparition de la guerre de haute intensité en Europe avec le conflit russo-ukrainien et l’hybridité des conflits à venir, l’Otan s’était « ressuscitée » et se plaçait comme étant la réponse idéale et vitale pour ses membres. Tout ceci c’était avant le retour à la Maison Blanche du président américain Donald Trump, qui avec ses positionnements et atermoiements, a ainsi rebattu les cartes, jusqu’à pousser les européennes à faire de leur politique commune de défense qui était un vœu pieux en un radieux programme… oumar.ndiaye@lesoleil.sn