«Aywa orange, orange casamance, nekh saf sukeur!!!». Ces dernières semaines, qui n’a pas entendu cette voix préenregistrée que crachent des haut-parleurs trimbales par des charretiers dans les dédales de nos quartiers ou campés au niveau de certaines artères passantes? «Orange Casamance», c’est le fruit star du moment. Cette variété d’agrume, à mi-chemin entre l’orange marocaine et celle plus classique qu’on connaissait au Sénégal, a fini de conquérir les palais.
Le fait de voir toutes ces charrettes faisant le tour des quartiers ou postées à certains endroits de la capitale à forte concentration humaine renseigne à suffisance. Au marché Sandika de Pikine, lieu par excellence de la vente en gros de fruits, depuis quatre mois c’est des dizaines de camions qui l’y déversent ; signe que la demande est forte. Et si la demande est si forte, c’est parce qu’elle est appréciée. Question de logique commerciale ! Juteuse, sucrée, elle a aussi l’avantage d’être moins chère que sa cousine du royaume chérifien. A ce rythme, et si la production se renforce, il y a de forte chance qu’elle remplace dans les cœurs et dans les palais l’orange importée. Et ce ne serait pas plus mal à l’heure de la souveraineté alimentaire prônée par les nouvelles autorités.
Vu l’engouement autour de ce fruit, nos chercheurs et producteurs pourraient voir dans quelle mesure l’introduire dans la zone des Niayes qui a à peu près les mêmes conditions agro écologiques que la partie de la Casamance où il pousse. Parce que, apparemment, tout le monde y trouve son compte, clients comme revendeurs. Cette filière semble donc financièrement juteuse tout comme le fruit. Mise à l’échelle, sa culture peut être source d’emplois pour de nombreux jeunes. Les charretiers qui s’y activent actuellement s’en sortent apparemment, mieux peut-être que ce que leur apportaient d’autres activités hippomobiles.
Mais, comme l’a souligné le Directeur de l’Horticulture, quelques défis sont à relever en amont. En effet, a-t-il soutenu, l’agrumiculture (culture de l’agrume), malgré son potentiel de production énorme au Sénégal, reste freinée par d’énormes contraintes dont les plus importantes restent les maladies de dépérissement des agrumes. Mais avec de la volonté, rien n’est infranchissable. Les mêmes problèmes ont plombé pendant longtemps la filière mangue notamment pour son versant export, mais le Sénégal a réussi à réduire drastiquement les ravages de la mouche de la mangue. Si bien que ce fruit est devenu presque le premier produit horticole du Sénégal à l’export. Si les autorités montrent la même volonté et le même engagement pour la valorisation de «l’orange Casamance», ce fruit peut nous valoir la même satisfaction que la mangue.
Réanimer l’espoir de 1975 (Par Samboudian KAMARA)