Les zoos humains, vous connaissez ? C’est une pratique par laquelle le colonisateur exposait les ressortissants de ses colonies comme des animaux, parfois même dans des zoos avec des animaux comme des singes.
Sûr qu’ils ne sont pas nombreux les noirs, indiens et autres peuples qui ont eu vent de cette infamie occidentale. Pourtant, bien que leur existence soit souvent méconnue du grand public, ces « zoos humains » qui faisaient partie d’une grande entreprise de propagande coloniale (la mission civilisatrice), étaient très répandus en Europe à la fin du 19ème siècle jusqu’à la moitié du 20ème siècle. Un moyen de démontrer ainsi la prétendue supériorité de la civilisation occidentale. Selon le site https:www.cec-ong.org, les zoos humains-2, « en 1897, la Belgique organise une exposition internationale dans laquelle des villages congolais sont reconstitués. 267 Congolais sont amenés par bateau jusqu’en Belgique pour les occuper.
À cette époque, le Congo est appelé État indépendant du Congo et est une propriété personnelle de Léopold II ». La Belgique n’était pas le seul pays. La pratique a, en effet, prévalu du temps des empires coloniaux (États-Unis inclus), l’Allemagne (comme pays d’exposition), jusqu’à la Seconde guerre mondiale. Pour le colon, ces expositions sont d’ordre ethnographique. Faux ! Car, ces peuples sont mis dans un environnement très éloigné de leur mode de vie réel, racontent les historiens. La chaîne télé Sud Première a fait un grand focus sur cette vilénie coloniale. Dans ces expositions appelées encore « exhibitions » ou « spectacles ethnologiques » et que l’on qualifiait souvent de « villages noirs », « nègres », ou « indigènes », d’après le site Wikipédia, on précisait parfois la nationalité (« village sénégalais », « soudanais », « ceylanais ») ou le groupe ethnique (« indien », « malabare ») présumé des personnes qui y étaient mises en scène. Concernant l’Afrique, l’histoire nous a appris le sort dégradant réservé à Saartjie Baartman, la « Vénus hottentote », exposée devant le grand public en 1810.
Elle a même été objet d’études scientifiques parce qu’elle avait de grosses fesses, ce qui lui a donné le surnom de la « Vénus stéatopyge ». Idem pour le pygmée congolais (actuelle Rdc) Ota Benga qui faisait partie des noirs kidnappés et amenés aux États-Unis par Samuel Verner en 1904. Il fut placé dans le zoo du Bronx, à New York, en 1906 parce qu’il avait des dents taillées en pointe. Pour les Occidentaux, ce fait est la preuve d’un prétendu cannibalisme chez ces peuples. Ce qui n’était, en réalité, qu’une coutume du bassin du Congo, notamment chez les pygmées. Certes, le phénomène d’exposition apparait dès l’Antiquité. « Les Grecs avaient leurs « sauvages » et les Egyptiens ramènent des nains du Soudan pour les exhiber ». Et le premier « zoo humain » en Amérique fut celui de Moctezuma à Mexico qui, en plus d’exhiber de vastes collections d’animaux, montrait aussi des êtres humains présentant des difformités : albinos, nains, bossus. (Cf. Wikipédia : Jean-Christophe Victor, « Exhibitions ou l’invention du sauvage », émission Le Dessous des cartes sur Arte, 27 mars 2012) et Mullan, Bob et Marvin Garry, Zoo culture: The book about watching people watch animals, University of Illinois Press, Urbana, Illinois, 2e édition, 1998, p. 32. (ISBN 0-252-06762-2). Mais, au 19è siècle, c’est une véritable industrie du spectacle qui a été mise en place.
« Les impresarios occidentaux, comme Jean-Alfred Vigé et Aimé Bouvier en France se créent un réseau de recruteurs et chefs de troupes dans les différentes colonies comme Jean Thiam et Mamadou Seck, sur l’île de Gorée, pour alimenter un marché en forte croissance à la fin du XIXe siècle. Au bout du compte, plus d’un milliard quatre cents millions de visiteurs ont pu voir 35.000 figurants dans le monde, entre 1800 et 1958, depuis les petites manifestations de cirque jusqu’aux grandes expositions coloniales et universelles pouvant mobiliser plusieurs millions de spectateurs], ainsi la grande exposition coloniale de 1907 à Nogent-sur-Marne attire 2,5 millions de visiteurs. (Cf. Wikipédia). Selon de nombreux intellectuels, c’est cet exotisme qui serait à la base du racisme abject que le monde vit aujourd’hui. Lequel racisme s’appuyait sur un discours scientifique comme l’a démontré Delphine Peiretti-Courtis, enseignante en histoire contemporaine à l’Université d’Aix-Marseille, spécialiste de l’histoire de la race et du genre dans une thèse soutenue en 2014 et intitulée « Corps noirs et médecins blancs. La fabrique du préjugé racial, XIXe-XXe siècles ». daouda.mane@lesoleil.sn