Alors que les pouvoirs publics mettent les bouchées doubles pour refermer la brèche toujours béante de l’émigration clandestine, voilà que surgit une autre forme d’aventure macabre de nos jeunes.
Elle consiste à se faire appâter par un réseau mafieux de « faux » recruteurs de joueurs, conscients que le football, hyper lucratif ces dernières années, constitue un bon filon. Aujourd’hui et plus que jamais, notre pays continue de payer un lourd tribut des embarcations de fortune qui quittent nos côtes par vagues, entraînant avec elles nos forces vives prises par le mirage de l’eldorado et du mieux-être ; un dramatique mercato entretenu par des passeurs et des rançonneurs transnationaux qui s’intensifie en Afrique de l’Ouest. De l’autre côté, la « voie du Nicaragua », cette route migratoire clandestine vers les États-Unis, principalement empruntée par des Africains de l’Ouest, notamment des Sénégalais, a aussi été exploitée à fond par des candidats à l’aventure.
Le parcours, souvent facilité par des agences de voyages et des réseaux sociaux, comprend des vols vers ce pays, puis une traversée terrestre dangereuse à travers l’Amérique centrale pour atteindre le Mexique et les États-Unis. Un véritable calvaire. Pour toutes ces routes, seuls quelques aventuriers parviennent à bon port. Le gros des troupes est, hélas, englouti par le grand bleu, laissant derrière des familles inconsolables. De nombreux jeunes ont donc rejoint le pays de l’Oncle Sam en suivant une trajectoire périlleuse et dangereuse. Et, ces derniers temps, une nouvelle forme d’escroquerie, connue sous le nom de « Qnet » (nom emprunté ou usurpé), est apparue.
Il s’agit des bandes criminelles qui font miroiter des emplois fictifs à des jeunes talents sénégalais ou africains. Animés par l’envie folle de découvrir d’autres horizons et de signer des contrats mirobolants, de nombreux jeunes footballeurs tombent dans le piège de ces réseaux de malfaiteurs sans scrupules. En un mot, réussir à tout prix. Devons-nous laisser nos jeunes céder à la tentation et partir à l’étranger ? Réussir à tout prix justifie-t-il tous les sacrifices, de s’engager dans toute sorte de manœuvre ? Au point de mettre sa vie en danger ? Absolument pas ! La vie humaine est sacrée, elle prime sur tout et doit être préservée coûte que coûte. Aujourd’hui, tout le monde veut devenir une star du football, mais le talent ne suffit pas. Tout le monde n’a malheureusement pas la chance de l’international sénégalais Sadio Mané.
Cet homme, qui disputera, l’année prochaine, sa deuxième Coupe du monde (2018 et 2026), après avoir raté celle de 2022, n’avait jamais rêvé intégrer une académie de football en quittant son Bambaly natal. On raconte d’ailleurs que lors des tests de sélection pour cette école d’élite, il avait du mal à nouer ses lacets. La chance lui a pourtant souri et lui a ouvert les portes de l’académie Génération Foot. Des jeunes comme Mané, il en existe beaucoup au Sénégal, des talents qui évoluent dans des équipes de football des villages les plus reculés, mais dont la carrière, par manque de chance ou d’encadrement, a fait long feu. S’ils avaient eu l’opportunité de décrocher des contrats professionnels, leurs noms figureraient sans doute aujourd’hui dans les annales du football sénégalais, voire mondial. Mais le destin en a décidé autrement. Aujourd’hui, la chance des jeunes talents réside dans l’essor des académies.
Pour rien au monde, ils ne doivent compromettre leur avenir. Il leur faut intégrer ces structures d’excellence ou des clubs de football, plutôt que de succomber aux sirènes de l’aventure et de l’incertitude. Ils ne doivent pas céder aux provocations de ces « marchands de la mort », des manipulateurs abjects et dangereux, mus par de simples intérêts mercantiles. Partir n’assure pas la réussite et le retour est encore moins garanti. Il est possible de réussir et de s’épanouir dans son propre pays en travaillant dur et en saisissant toutes les opportunités visibles et viables. Il s’agit d’y croire, d’y miser et de s’investir pleinement, entièrement et durablement.
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