Le Sénégal derrière le Nigeria et l’Algérie. Dans le trio de tête des pays où l’on prie le plus quotidiennement dans le continent. Rien d’étonnant serait-on tenté de dire tant que dans ce pays ça prie. Ça égrène aussi les chapelets, va à la messe, va à la mosquée.
Un pays dans lequel on retrouve plus de généraux civils que militaires avec tous ces khalifes symboles d’un Islam bien hiérarchisé et souvent héréditaire. Le classement de l’organisation non gouvernementale Pew Reserach Center qui a publié, la semaine dernière, un rapport sur la question dans le monde confirme donc la place centrale de la religion dans la vie de nos compatriotes. Attention au blasphème du magnifique et inspiré Souleymane Faye qui disait être un « musul-menteur ». Une catégorie dans laquelle le chanteur rangeait une bonne partie de ses compatriotes. Justifiant et assumant d’ailleurs ses propos, il rappelait la sagesse prophétique qui voulait qu’un musulman puisse voler, boire de l’alcool, s’adonner à des relations extra-conjugales… Mais jamais, au plus grand jamais, jamais, il ne devrait mentir.
Le mensonge étant une voie idéale pour justifier et s’exposer à d’autres vices. S’en abstenir pousse donc le musulman à délaisser tous les autres péchés et la perfection. Loin donc d’un simple néologisme forcé par l’artiste, l’expression était et est toujours chargée quant à une conformité entre les actes cultuels et le respect de l’esprit de la religion qui vise à parfaire l’individu. Revenons aux conclusions de l’étude de l’Ong américaine, fruit de quinze années de terrain entre 2008 et 2023 sur les pratiques religieuses dans 102 pays et territoires, qui établit un classement que d’aucuns pourraient qualifier de logique. L’Afrique subsaharienne, l’Amérique latine, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord sont, sans surprise, les zones les plus religieuses.
L’Europe et l’Asie de l’Est, plus développées, sont les parties les moins religieuses. L’Indonésie, premier pays musulman du monde avec ses 270 millions d’habitants, se révèle être le pays où l’on prie le plus sur la planète. Avec ses 243 millions de musulmans, la quasi-totalité des Indonésiens avoue prier, selon toujours l’étude de l’Ong Pew Reserach Center. Le peuple latino-américain est mis en exergue puisqu’étant considéré comme parmi ceux qui prient le plus quotidiennement. En Afrique, se classent derrière le podium Djibouti et le Niger. L’étude souligne que les habitants de l’Afrique subsaharienne sont parmi les plus susceptibles et prompts à dire que la religion est très importante dans leur vie. « Au moins 90 % des adultes le disent au Sénégal, au Mali, en Tanzanie, en Guinée-Bissau, au Rwanda et en Zambie », apprend-on encore.
A contrario, l’étude fait état d’un « net recul de la pratique religieuse dans de nombreux pays occidentaux. Les personnes de presque tous les pays européens étudiés sont parmi les moins susceptibles de dire que la religion est très importante dans leur vie. Au Danemark, au Royaume-Uni ou en Suède, elles ne sont que 10 % ». L’on est tenté de dire, en parcourant ces résultats, que la pratique religieuse s’accommode mal du développement tout comme cette étape, dans la vie des Nations, met en lumière des notions de comportements individualistes, de familles nucléaires, de manque de chaleur et de solidarité humaines.
D’aucuns donneront certainement raison à Karl Marx dont la partie la plus retenue de la célèbre citation est la religion « est l’opium du peuple ». La trouvaille sur la religion, au-delà des luttes de classes et du combat contre le capitalisme, est plus large. Elle dit que « la religion est le soupir de la créature opprimée, l’âme d’un monde sans cœur, comme elle est l’esprit des conditions sociales d’où l’esprit est exclu ». Qu’à cela ne tienne, nous autres du Sénégal, comme d’autres contrées moins avancées, trouvons notre bonheur et épanouissement dans la pratique religieuse à laquelle s’ajoutent gamous, ziarras, magals et pèlerinages qui rythment nos saisons. Espérant que Dieu reconnaîtra les siens. Tout comme nous affrontons les aléas et obstacles de la vie dans la certitude, incha Allah, de sauver nos âmes et d’y survivre. Bons ramadan et carême pour les enfants de Dieu.
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Réanimer l’espoir de 1975 (Par Samboudian KAMARA)