À Ranérou Ferlo, un fait vraiment inédit a retenu notre attention. Des populations du quartier Nelby, hommes, femmes et enfants, regroupées dans une maison, exultaient au rythme de tam-tam, de battements de mains.
Elles ne célébraient pas une naissance ni des fiançailles moins encore une victoire de l’équipe de football de leur quartier. Ils jubilaient parce que la charrette d’un des leurs, volée il y a quelques jours, a été retrouvée à Dahra Djolof, dans le département de Linguère. C’était suffisant pour déclencher l’extase de la famille du propriétaire et de ses proches. L’adrénaline est montée crescendo quand les envoyés, partis récupérer la charrette, sont rentrés triomphants, accueillis par une foule en liesse. Leur retour a mis le quartier sens dessus dessous. Les jeunes, sans doute gagnés par l’émotion, se sont laissé aller à des comportements indicibles. Ils étaient entrés en transe, avaient sorti des couteaux et coupe-coupes pour se trancher, se lacérer leur corps. Tout cela pour un cheval, une charrette volée. Il était difficile de les contenir, tant leur force avait décuplé.
Preuve que le voleur, s’il avait été alpagué, aurait passé un sale quart d’heure ! Il a fallu l’intervention des femmes qui les avaient débarrassés de leurs gris-gris pour qu’ils retrouvent leur état normal. C’était une question d’honneur de retrouver leur bien, surtout dans une zone où le vol de bétail constitue l’un des grands maux dont souffre l’élevage, malgré les mesures législatives prises par le gouvernement visant à réprimer et à dissuader les auteurs. Avec le vote de la loi n° 2014-27 du 03 novembre 2014 modifiant la loi n° 65-60 du 21 juillet portant Code pénal, l’article 368 du Code pénal a été réaménagé par l’introduction d’un alinéa 3 nouveau qui fait du vol de bétail une circonstance aggravante.
Cette disposition prévoit une peine d’emprisonnement de cinq à dix ans « si le vol portant sur du bétail a été commis au préjudice d’une personne qui tire de l’exploitation dudit bétail l’essentiel de ses revenus ou qui fait de son élevage son activité principale ». Malgré le durcissement des sanctions, le phénomène reste entier et demeure un véritable casse-tête pour les éleveurs qui ont perdu le sommeil à cause des malfrats qui leur font vivre de véritables nuits blanches.
Il est des délits qui portent beaucoup de préjudices à la société et privent d’honnêtes citoyens de sommeil, de paix et de tranquillité. Le vol en fait partie. Il est devenu un véritable fléau national, prend, année après année, des proportions quasi inquiétantes. Normal si l’on sait que voler est une profession qui ne nécessite ni diplôme ni études dans une université ou institution spécialisée et dont la pratique procure parfois des revenus conséquents à leurs auteurs.
Le sport favori de ces voleurs qui ne veulent point travailler, mais qui veulent plutôt profiter de ceux qui travaillent, n’est rien d’autre que de dépouiller les honnêtes citoyens de leurs biens et de ruiner tout leur espoir. Et pourtant, cet acte odieux qu’est le vol, en plus d’être réprimé par la loi, constitue un grand péché puni par l’islam d’une amputation de la main. Malgré tout, les malfrats ne reculent devant rien et leurs dégâts sont incommensurables.
Aujourd’hui, on assiste de plus en plus à la recrudescence des cambriolages, de jour comme de nuit, sans compter les vols à l’arraché. Ces délinquants n’ont peur de rien et commettent parfois des actes violents, surtout quand ils rencontrent de la résistance. À leurs risques et périls. Mais n’est pas Robin des bois, Billy the kid ou Arsène Lupin qui veut. Plusieurs malfrats ont dû abandonner leurs activités illicites en raison d’oppositions inattendues des populations, avec la justice populaire devenue aujourd’hui très fréquente sous nos tropiques.
Assez souvent, des voleurs, professionnels ou occasionnels, sont battus à mort par des foules en colère. Ce phénomène s’explique parfois par l’insécurité et le manque de confiance de la population en la justice, la police. Certaines gens qui ont le sentiment que ces voleurs ne sont pas assez sévèrement punis préfèrent de loin cette justice populaire qu’elles trouvent très dissuasive. Quoiqu’il en soit, le vol n’est pas une profession viable ni durable. Un voleur peut toujours voler, mais viendra un jour où la chance le lâchera. Et bonjour les dégâts ! Tous ces paresseux qui aiment l’argent facile gagneraient à aller travailler pour gagner honnêtement leur vie au lieu de se nourrir du travail, de l’effort ou de la sueur de leurs prochains. C’est irrémissible.
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