Sanctions diplomatiques, économiques, financières et même sportives, rien ne semble avoir épargné à l’Ours russe. Depuis le déclenchement de son « opération spéciale » en Ukraine, le 24 février 2022, la Fédération de Russie a été mise au ban des affaires internationales par la « communauté occidentale ». Les résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies se sont ainsi multipliées depuis le début de cette crise condamnant ainsi l’agression de la Russie avec des votes qui sont toujours majoritaires en faveur de l’Ukraine.
Même les athlètes russes ont été privés de participer à des compétitions sportives comme les Jeux olympiques. Toutefois, le retour du magnat de l’immobilier new-yorkais (Donald Trump) semble avoir rebattu les cartes. Le maître du Kremlin, jadis honni par les capitales occidentales, semble devenu fréquentable après la tenue des échanges entre Américains et Russes à Djeddah. La Russie devient un interlocuteur dans la recherche de solutions dans la crise qui l’oppose à l’Ukraine. Le long entretien téléphonique entre chefs d’Etat américain et russe montre à suffisance que la Fédération de Russie n’a pas perdu son influence sur la scène internationale. L’agression russe en Ukraine qui est à sa deuxième phase démontre une certaine « glaciation » de la question ukrainienne qui a débuté avec la révolution de Maidan en 2014.
Durant cette même année, le territoire ukrainien a été envahi par la Russie avec l’annexion de la péninsule de Crimée et l’éclatement de la guerre civile avec les tentatives de sécession dans le Donbass. Malgré les tentatives d’accord (Minsk 1 et Minsk 2), la situation va perdurer jusqu’au déclenchement de l’opération militaire spéciale le 22 février 2024. Cette volonté russe de garantir un contrôle sur son étranger proche est résultante de la théorie de Leonid Brejnev, ancien leader du l’Union soviétique (1964 à 1982) qui avait conceptualisé cette doctrine de glacis protectrice autour de l’Urss justifiant ainsi l’intervention dans les pays du Pacte de Varsovie. Vladimir Poutine avait indiqué que « celui qui ne regrette pas l’empire n’a pas de cœur et celui qui veut le restaurer n’a pas de tête ». Mais face aux impératifs géopolitiques, le président russe semble utiliser les mêmes méthodes.
Dans son discours de Munich en 2007, l’ancien agent du Kgb avait toujours fait de l’entrée de l’Ukraine et de la Géorgie (deux Républiques de l’ex-Urss) des lignes rouges qui déclencheraient une riposte miliaire de la Russie. Dopé par ses ressources en hydrocarbures, la Russie en a profité pour devenir l’un des principaux exportateurs mondiaux et un acteur influent à l’échelle internationale. En outre, face au recul américain en Irak et en Syrie, Vladimir Poutine, à travers son intervention en Syrie en 2015, a su s’imposer comme un dirigeant fiable dans le Sud Global. Un Président qui a perçu les révolutions de couleur dans les pays limitrophes comme l’Ukraine et la Géorgie comme un élément de projection et d’affirmation de puissance américaine dans cette partie du monde que la Russie a considéré comme sa sphère d’influence. La nouvelle séquence de négociations qui risque de s’ouvrir concernant la guerre en Ukraine pourrait valider le retour total de la Russie sur la scène mondiale. Surtout qu’elle apparaît pour le Sud Global comme une antithèse du modèle occidental dont il conteste la suprématie. C’est dire que la Russie est en train d’opérer un vrai retour en zone… oumar.ndiaye@lesoleil.sn