La dégradation de la note du Sénégal par Moody’s, intervenue juste après la clôture du Forum Invest in Sénégal, en dit long sur les motivations sous-jacentes d’une telle décision. Certes, les institutions internationales évoluant dans le monde de la finance demeurent des partenaires importants, voire privilégiés, du Sénégal et de nombreux pays en développement pour le financement de projets structurants. Mais cela n’enlève rien au fait qu’aujourd’hui, une telle notation soulève de légitimes interrogations quant à ses véritables motivations.
La note souveraine du Sénégal a été abaissée à Caa1, avec une perspective négative (contre B3 auparavant). Selon Moody’s, cette décision s’explique par un niveau de dette plus élevé qu’annoncé après les révisions et audits récents, ainsi que par des tensions de liquidité rendant le financement à court terme plus difficile, le tout dans un contexte marqué par la révélation d’une dette publique avoisinant 118 à 119 % du PIB et le gel temporaire de l’appui du FMI.
Pourtant, le Sénégal sort tout juste d’un forum économique majeur ayant réuni de nombreux investisseurs internationaux. À son issue, des engagements de financement de plus de 13 000 milliards de francs CFA ont été annoncés, soit près de trois fois le budget national. Plus d’une cinquantaine de projets ont suscité un intérêt concret de la part de partenaires publics et privés.
C’est un succès indéniable pour l’APIX, cheville ouvrière de cette organisation, qui a démontré la capacité du pays à mobiliser des ressources dans un contexte économique mondial tendu.
Certes, le taux de conversion de ces promesses en financements effectifs dépendra de la faisabilité des projets, des bouclages juridiques et financiers et de la disponibilité des garanties, des paramètres étroitement liés à la perception de la note souveraine.
Or, la publication d’une note défavorable immédiatement après cet élan positif donne l’impression que certaines institutions financières internationales s’inscrivent dans une logique de pression ou de rapport de force avec le Sénégal. À court terme, cette dégradation renchérit le coût du financement souverain et pourrait freiner l’engagement de certains investisseurs.
Une telle dynamique semble aller à l’encontre de la politique économique actuelle, fondée sur la souveraineté nationale et la reprise en main des leviers stratégiques du développement.
Il est donc légitime de s’interroger sur la pertinence et la rigueur de cette notation. À bien des égards, elle ne reflète ni la réalité économique du pays ni les efforts de transparence entrepris par les nouvelles autorités depuis 2024. Celles-ci ont non seulement rétabli la vérité des chiffres sur les finances publiques, mais ont également instauré une gouvernance financière plus claire et responsable, tout en engageant des réformes courageuses pour lutter contre les détournements présumés de deniers publics. Le gouvernement a par ailleurs présenté un plan de redressement crédible, articulé autour d’un calendrier d’ajustement transparent et structuré. Ces avancées devraient, au contraire, renforcer la crédibilité financière du Sénégal.
Le gouvernement du Sénégal bénéficie de la confiance et du soutien de ses citoyens. Le moment est venu de comprendre que le développement endogène, tel que défini dans la stratégie de transformation systémique, doit constituer le fer de lance de notre économie.
Enfin, l’implication de la diaspora dans le tissu économique national, à travers une approche plus dynamique et inclusive, représente une alternative crédible et durable pour financer le développement du pays.
Thiawo Lecor
Secrétaire de Administratif PASTEF NEW YORK
Enseignant-chercheur au Centre universitaire de New York
Doctorant en Philosophie
Licence en santé et développement durable