Le Sénégal est à l’aube d’une nouvelle révolution qui promeut une gouvernance de rupture axée sur la transparence et l’efficacité. Comme toute révolution, elle prend son point de départ en ville. Pour répondre aux enjeux du moment, ce mouvement invite à une rupture dans les pratiques urbaines. Il visera donc un « urbanisme de rupture » dans le but de transformer radicalement la manière dont les villes sont conçues, gérées et habitées. Il est une réponse directe aux défis posés par l’urbanisme anarchique actuel, et il se fixe pour objectif de bâtir un avenir plus vert, plus équitable et plus harmonieux pour tous les citoyens.
Un urbanisme qui met en valeur des modèles urbains endogènes, pour ne pas dire un urbanisme d’opportunités qui valorise et encadre le commerce de rue. L’objectif central de cet urbanisme de rupture et d’opportunités est de créer un développement urbain vert, centré sur les communautés et la formation d’un nouveau type de citadin doté d’une conscience accrue des enjeux environnementaux et urbains, adoptant des comportements qui favorisent un cadre de vie sain et durable. Il s’agit d’un véritable changement de paradigme, où la transformation des mentalités individuelles est perçue comme le moteur d’une transformation sociétale profonde.
L’urbanisme de rupture sera un urbanisme de qualité pour une nouvelle urbanisation plus durable, plus équilibrée, mieux planifiée et moins consommatrice d’espaces avec une politique d’aménagement courageuse fondée sur une option rationalisée du cadre de vie du citoyen. Il s’appuiera sur une nouvelle politique de la ville à travers une démarche stratégique et programmatique visant le renouvellement de la ville sur elle-même et la redynamisation des quartiers anciens. En effet, il suffit d’observer le cadre de vie et les infrastructures dans nos banlieues pour se rendre compte de l’étendue de l’aporie vers laquelle nous mène cette urbanisation déréglée.
On assiste à une véritable inversion du sens de la circulation des biens et des personnes ou, pire, à une stagnation économique. Une sorte d’obésité impressionnante s’est emparée de nos villes, de sorte que les artères qui devraient permettre de desservir l’intérieur du pays sont bouchées. C’est ce qui donne l’impression que malgré les importants efforts fournis pour solutionner la crise urbaine, l’action des pouvoirs publics reste dans le bricolage et le colmatage. Pour inverser la tendance actuelle de l’urbanisation désordonnée, déséquilibrée et anarchique, plusieurs leviers sont impératifs : – la simplification et la digitalisation des procédures d’urbanisme sont des priorités pour alléger les démarches administratives et les rendre accessibles via des plateformes numériques de manière à faciliter l’application des règles d’urbanisme et réduire les délais d’obtention du permis de construire.
Ce nouvel urbanisme ne peut réussir sans des réformes institutionnelles profondes avec la création d’un cadre réglementaire plus pragmatique et opérationnel ; – une gouvernance territoriale inclusive dans le but de s’assurer que tous les pôles territoires bénéficient d’un développement urbain équilibré et que la voix de chaque citoyen est prise en compte dans les décisions et les choix d’aménagement ; – la promotion d’une planification urbaine intégrée et simplifiée avec l’aide de l’intelligence artificielle pour développer des plans d’urbanisme cohérents et faciles à comprendre et qui englobent toutes les dimensions du développement urbain durable intégrant les enjeux de sobriété foncière, d’économie circulaire et de croissance verte.
Il s’appuiera sur des mécanismes d’intervention plus opérationnels et mieux coordonnés à travers la mise en place d’outils et de processus permettant une action rapide et concertée face aux défis urbains ; – last but not least, l’amélioration de la qualité des professionnels de l’urbanisme sera nécessaire pour renforcer la formation, l’éthique et les compétences des acteurs du secteur afin de garantir des projets urbains de qualité. Cela s’inscrira dans une démarche de changement de comportement des citoyens qui seront sensibilisés à l’importance d’un urbanisme réfléchi et l’encouragement à adopter des pratiques respectueuses de l’environnement urbain ; Il est clair que certaines parties du Sénégal sont à la limite une sorte de négation de la notion même d’État : le non-droit qui y règne en matière d’urbanisme, anéantissent les efforts de l’État jusque dans ses moindres fondements éthiques et juridiques.
L’urbanisme de rupture sera celui de la tolérance mais aussi des sanctions pour dissuader les pratiques illégales et non conformes afin de faire respecter autant que possible la réglementation en vigueur. Enfin, l’urbanisme de rupture accordera une grande place aux espaces publics ouverts. Dans une logique de sobriété foncière, il invite à une densification du tissu urbain et une végétalisation de la capitale sénégalaise par une réduction des surfaces habitables et régulation de la gentrification. Cet urbanisme de rupture incarne la pleine souveraineté de notre nation en matière d’aménagement du territoire. Il nous permettra de décider librement de la vocation et de l’organisation de nos espaces urbains, affranchis de toute influence extérieure.
Notre ambition est de concevoir des villes authentiques, qui nous ressemblent, en développant un urbanisme pensé par nous et pour nous, et en réalisant des infrastructures adaptées à nos réalités. Il s’agit en somme de bâtir des modèles urbains durables, intégrés et inclusifs, dont nous assumons pleinement la conception et la pérennité. Cette approche holistique, qui intègre des réformes structurelles, institutionnelles et comportementales, est perçue comme la seule voie possible pour une transformation urbaine durable au Sénégal. C’est un appel à l’action pour que chaque citoyen embarque dans ce « train » de la révolution urbaine, afin de construire ensemble des villes qui soient non seulement belles et fonctionnelles, mais aussi résilientes, justes et créatrices d’opportunités.
Par Alé Badara SY, Conseiller Technique urbanisme et aménagement du territoire du
Premier ministre Ousmane Sonko