À ceux qui s’empressent de dénoncer, parfois avec condescendance, la supposée « contradiction » interne du projet politique porté par le PASTEF, il faut répondre avec clarté et hauteur : ce que vous percevez comme une cacophonie est en réalité la polyphonie d’un front populaire conscient de ses responsabilités historiques. Le PASTEF, loin d’être un simple parti traditionnel, est la traduction politique d’un moment révolutionnaire inédit dans l’histoire sénégalaise contemporaine. Il ne s’est pas consolidé dans la paix sociale des salons de la République, mais dans la tourmente d’un peuple debout, décidé à rompre avec l’ordre néocolonial et à reconquérir sa souveraineté.
Cette hétérogénéité, loin d’être un défaut, est un compromis stratégique assumé, fondé sur une lecture lucide du contexte national et mondial. C’est un compromis historique, au sens gramscien, entre des forces sociales diverses unies par une même urgence : sortir du piège de la dépendance et bâtir un État nouveau. Chacun y contribue sans renier son identité politique.
Un capitaine dans la tempête : le rôle structurant d’Ousmane Sonko
Dans cette architecture complexe qu’est un front populaire, il faut un fil conducteur, une boussole, un porteur de vision capable d’agréger les énergies sans les dissoudre, de tenir la cohérence sans étouffer la diversité. C’est là que se révèle la stature d’Ousmane Sonko, président du PASTEF. Il incarne non seulement une ligne politique claire — celle de la souveraineté nationale, de la justice sociale et de la refondation républicaine — mais aussi une capacité rare à articuler les contradictions, à transformer les tensions internes en moteur de créativité politique.
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Le président du parti, Ousmane Sonko, n’a jamais prétendu détenir une vérité unique. Ni dogmatique, ni arbitre d’un pluralisme tiède, il est le catalyseur d’un mouvement populaire qui grandit en parlant aux frustrations comme aux espoirs. Sous sa direction, le PASTEF est devenu un cadre où le débat est libre, les différences valorisées, et la ligne contre la recolonisation clairement affirmée, sans exclure ceux qui veulent bâtir un État au service du peuple. Il incarne une boussole politique, transformant l’indignation en organisation et l’aspiration en stratégie.
Distinguer l’essentiel de l’accessoire : la matrice dialectique du PASTEF
Ceux qui critiquent cette configuration restent prisonniers d’une vision binaire, où unité rime avec uniformité. Or, le PASTEF incarne une tradition plus exigeante : distinguer contradictions principales et secondaires. L’enjeu central n’est pas entre courants idéologiques de rupture, mais entre deux projets antagonistes : un Sénégal soumis aux diktats extérieurs et gouverné par une élite compradore, et un Sénégal souverain, enraciné dans ses luttes, tourné vers la justice sociale et la réappropriation des leviers économiques.
C’est en cela que le PASTEF est porteur d’un projet de refondation, et non d’un simple programme de gestion. Le pluralisme interne du mouvement n’est pas un obstacle à cette refondation : il en est la condition. Car une révolution populaire ne se gagne pas avec des purs, des dogmatiques, des idéologues retranchés dans leur tour d’ivoire. Elle se gagne avec des hommes et des femmes qui acceptent de mettre en commun leur courage, leurs compétences, leurs histoires, pour répondre aux besoins urgents de justice, de souveraineté et de dignité.
PASTEF, produit d’une histoire et levier d’un avenir libéré
Il faut rappeler que le PASTEF n’est pas tombé du ciel. Il est le produit d’une longue histoire de luttes : celles des résistances à la colonisation, des insurrections paysannes, du mouvement syndical, des mobilisations démocratiques des années 80 et 90, des frustrations d’une jeunesse dépolitisée mais en quête de sens. Il est aussi la réponse politique à une situation devenue insupportable : celle d’un pays aux ressources pillées, aux services publics dévastés, à la démocratie dévoyée. Il est l’instrument par lequel un peuple, dans toute sa diversité, a dit non à l’humiliation et oui à l’espoir.
Critiquer sa composition au nom d’une pureté idéologique perdue, c’est méconnaître les exigences de l’histoire. C’est ignorer que, dans les moments de bifurcation historique, ce sont les alliances larges, les coalitions courageuses, les fronts populaires, qui permettent les ruptures durables. La révolution sénégalaise est par essence inclusive : elle ne se fera pas contre le pluralisme, mais avec lui, dans un cadre organisé, conscient, orienté vers l’objectif fondamental : construire un État du peuple, par le peuple et pour le peuple, au cœur d’une Afrique affranchie des tutelles.
Le PASTEF, en choisissant le rassemblement plutôt que la dispersion, le compromis stratégique plutôt que l’enfermement idéologique, pose les fondations d’un Sénégal post-néocolonial, juste, souverain et solidaire. Et si c’est cela la contradiction, alors vive la contradiction. Car c’est d’elle que naîtra le changement. Et il faut, pour l’incarner, un homme qui ne confond ni l’écho populaire avec la facilité, ni la radicalité avec la haine, mais qui sait tenir la barre en pleine tempête : cet homme, c’est Ousmane Sonko.
Par Félix Atchadé
Militant politique, spécialiste de santé publique et d’éthique médicale