Quand tu le veux, tu le sais ; quand tu le sais, tu le peux ; quand tu le peux, tu le fais [1]*
La Loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités françaises, autrement appelée Loi Pécresse, a posé des empreintes manifestes sur les nouveaux contenus de programmes de formation dans les universités du Sénégal, malgré le rejet d’influence, par une franche de l’intelligentsia africaine, en termes de réformes de la gouvernance universitaire française sur la marche des institutions universitaires africaines.
Nous pouvons retenir avec la Confédération Générale du Travail – CGT des Etablissements d’Enseignement Supérieur que la « Loi LRU (Libertés et Responsabilités des Universités) donne les pleins pouvoirs aux présidents d’universités afin qu’ils puissent développer leurs propres stratégies en matière de formation, de recherche et d’insertion professionnelle… » [2]. Pour mieux cerner les influences normatives voulues, imposées, recherchées ou collatérales de la loi ( Valérie) Pécresse sur la gouvernance universitaire du Sénégal, nous vous renvoyons à la lecture comparative à titre de divergences, de convergences et de complémentarité entre la Loi Pécresse LRU (Libertés et Responsabilités des Universités) dans son Titre II : la Gouvernance universitaire ( Articles 2 à 17) , particulièrement, Chapitre 2, Article 6 –Le Président ( des universités françaises), et la Loi n°2015-26 relative aux universités publiques (du Sénégal) qui stimule dans son Chapitre 2 « Organes des Universités », ce qui suit :
Article 6 : l’administration de l’université comprend trois (3) organes :
– Un Conseil d’administration
– Un Conseil académique
– Un recteur.
(…)
Les Facultés, les unités de formation et de recherche, les écoles et les instituts sont créés, par décret en fonction des besoins et des capacités internes et externes de chaque université.
Nous notons à travers les lettres précitées de la Loi n°2015-26 relative aux universités publiques des termes à prendre à la lettre et à l’esprit : une fonction portée par une personne assimilée à un organe : « le recteur » est, selon la Loi, un organe au même titre que le Conseil d’administration et le Conseil académique.
L’organe, désigné autrement par le terme juridique, le Recteur prendrait en son compte, entre autres, l’équipe managériale des Vice-recteurs et l’équipe organisationnelle, technique et fonctionnelle du Directeur des Etudes et de la Pédagogie universitaire, portant également le rôle et la charge de Conseiller et du Recteur et des établissements ; les Directeurs de la Recherche et de l’Innovation ; de la Coopération Internationale ; de l’Insertion Professionnelle et des Relations avec les entreprises ; du Service à la communauté.
Selon la Loi n°2015-26 relative aux universités publiques dans son Chapitre 2 Organes des Universités, la vision du Recteur ne serait ni personnelle, ni personnalisée, moins individuelle, elle est à considérer et à comprendre par une lourde responsabilité collective, voire communautaire, au même titre que celle du Conseil d’administration et du Conseil académique sous une composition de plusieurs membres aux profils inscrits par la même Loi dans ses articles respectifs 8 et 14. La Loi Pécresse dite Loi LRU (Libertés et Responsabilités des Universités) a sonné le glas de changements de paradigmes notés dans le Système LMD (Licence, Master, Doctorat) tel qu’il est exprimé au Sénégal dans la Loi N°2011-05 du 30 mars 2011 relative à l’organisation du Système LMD dans les établissements d’Enseignement Supérieur du Sénégal. Les mutations sur le processus d’expressions et d’exploitation de l’enseignement-apprentissage se sont déployées dans un registre descriptif,
« Enseigner autrement, apprendre autrement, évaluer autrement ». Il serait important d’y ajouter : former autrement, par la pédagogie des pratiques à appliquer, activement et concrètement dans les secteurs du développement durable.
Le spectre de la Loi Pécresse dans son motif portant sur l’autonomisation des universités a engendré de fortes ripostes d’étudiants d’universités françaises qui ont contesté contre une privatisation rampante des universités publiques. Des ripostes estudiantines de la même vigueur ont plané jusqu’à l’Hôtel de la Concertation nationale pour l’Avenir de l’Enseignement Supérieur (CNAES) tenue du 06 au 09 avril 2013 au Sénégal. Ces fortes similitudes dans la vivacité des mouvements d’humeur d’étudiants sénégalais et français peuvent être notées en un terme social : « Nous tous n’avons pas les moyens de payer la hausse des frais d’inscription au prix de l’autonomisation des universités ». Une CNAES (Concertation Nationale pour l’Avenir de l’Enseignement Supérieur) riche en réformes constructives en révèle une autre, CNAES, que nous nommons, Contestation Nationale pour l’Avenir des Etudiants Sénégalais, devant l’autel de l’autonomisation des universités. Celle-ci serait-elle exprimée à l’échelle africaine ?
2014-2024, dix années après la hausse des inscriptions académique et pédagogique, les universités sénégalaises sont-elles au seuil de la porte d’entrée de l’autonomie en termes de fonctionnement, notamment, matériel didactique pour la pédagogie des pratiques, infrastructures, gestion et maintenance du matériel, logistique de transport, gestion de l’environnement et de la sécurité, assurance des primes, paiement d’heures de vacation à la hauteur des charges pédagogiques et selon le délai requis, ? Allons savoir auprès des statisticiens et des planificateurs en développement durable. Toutefois, il est manifeste noir sur blanc que dix ans après la CNAES (Concertation Nationale pour l’Avenir de l’Enseignement Supérieur) qu’il y a toujours des étudiant-e-s qui peinent à réunir vingt-cinq mille francs, (25000) CFA pour s’inscrire.
Nous posons ouvertement ces questions d’ordre historique, heuristique et conjoncturel dans un contexte de remous d’avis et de visions relatifs à un projet d’ouverture d’une Unité de Formation et de Recherche (UFR) en Sciences Agro-alimentaires et Environnementalistes (UFR S2A) à l’Université Iba Der Thiam (UIDT) – Sénégal.
A ce titre, on peut relever dans une revue de presse, ce qui suit : « Cette initiative, qui s’inscrit dans le cadre du Plan stratégique de développement 2025-2029 de l’UIDT validé par le Conseil d’administration du 21 décembre 2024, vise à répondre aux enjeux majeurs de souveraineté alimentaire et de gestion durable des ressources naturelles au Sénégal , indique un communiqué qui nous est parvenu hier, vendredi 7 février. (2025). » [3]
Aux autorités universitaires et aux porteurs de projet de programme de formation, aussi faudrait-il éviter, pour ne pas reprendre des erreurs du passé, de communiquer à mots ouverts avec autant d’assurance sur un projet à valider par des instances formelles.
Il est justement à noter que le projet de l’installation de l’Unité de Formation et de Recherche en Sciences Agro-alimentaires et Environnementalistes (UFR S2A) pose de réelles inquiétudes exprimées de parts et d’autres par des militants du Syndicat Autonome de l’Enseignement Supérieur (SAES)- Campus de Thiès, en termes de moyens de mise en œuvre, notamment d’infrastructures, de ressources humaines, de masse salariale, etc. Ces inquiétudes fort légitimes et constructives en portent ouvertement d’autres, à savoir la survie des programmes de formation de l’UIDT existants, en termes de recrutements de PER (Personnel d’Enseignement et de Recherche) et de PATS (Personnel Administratif Techniques et de Services) et de paiement équitable sur les primes d’encadrement, par exemple des Projets de Fin de Cycle et de mémoires [4] .
Huit domaines existent dans le REESAO (Réseau pour l’Excellence de l’Enseignement Supérieur en Afrique de l’Ouest).[5]
1. Sciences de la Santé
2. Sciences et Technologies
3. Sciences Agronomiques
4. Sciences Juridiques, Politiques et de l’Administration
5. Sciences Economiques et de Gestion
6. Sciences de l’Homme et de la Société
7. Lettre, Langues et Arts
8. Sciences de l’Education et de la Formation
Ces huit (08) domaines de programmes de formation du REESAO sont déroulés dans diverses universités de l’Afrique de l’Ouest. Cependant, il en existe des versions multivariées de programmes de formation, nommés « filières porteuses[6] », aptes à impulser le développement économique durable des pays africains. Des Enseignants-chercheurs selon leur domaine en font œuvre en termes de programme de formation dans leur établissement d’appartenance et en co-diplomation avec d’autres établissements et universités ; des Recteurs insufflent la mise en œuvre de « filières porteuses » de développement durable « afin qu’ils puissent développer leurs propres stratégies en matière de formation, de recherche et d’insertion professionnelle » [7].
Compte tenu de l’impulsion de programmes de formation « porteurs » de vies et survie au service du développement, la mesure intellectuelle et professionnelle gagnerait, au lieu d’individualiser, de faire endosser la paternité ou la maternité de telle filière ou telle UFR à un (e) Enseignant ( e ), à poser dans les instances les questions suivantes :
– Quel est le profil du programme ou l’établissement de formation à mettre en œuvre ?
– Pourquoi, le programme ou le nouvel établissement de formation ?
– Comment le mettre en œuvre, autrement dit, avec quels moyens budgétaires (ressources humaines (PER, PATS), masse salariale, infrastructures, matériels didactiques, logistiques de fonctionnement, etc.) ?
– Quels sont les risques à éviter ? doublon de la formation ? déficience dans l’insertion professionnelle des apprenants ? débouchés saugrenus de la formation, à savoir des diplômés à des métiers de terrain qui finissent en grande partie dans la fonction à Bureau ? défaut d’impact concret dans la vie des communautés ?
– Quel est le profit escompté dans le processus du développement durable du Sénégal ?
Somme toute, pour la part des universités africaines dans le développement fiable et durable à travers des programmes de formation « porteurs » et pratiques, comme les sciences de la santé, les sciences de l’eau et de l’agro-alimentaire, l’agriculture, la culture, les arts, les langues appliquées,, les études religieuses, les sciences juridiques et politiques, la protection de l’environnement, la transformation écologique, les sciences économiques et de gestion, l’informatique, l’évolution des technologies numériques appliquées à l’éducation académique et populaire, les statistiques, etc, nous gagnerons tous à unir notre responsabilité sociétale du citoyen.
De notre leadership dans l’innovation et de notre clairvoyance du visionnaire dépendent le Bien-être et la liberté du peuple africain, face à l’hégémonie rampante des autres nations en provision culturelle, agro-alimentaire, médicale, numérique, audiovisuelle et économique.
Dr Hadja Maïmouna NIANG
Enseignante-chercheure en Lettres et Didactique de l’Image
Département Langues, Lettres et Sciences Humaines (LALESH)
UFR Sciences Economiques et Sociales (SES)
Université Iba Der Thiam de Thiès (UIDT)
Notes de références :
1. A propos de l’importance de la formation intellectuelle et technique sur tout secteur, à Sembène Ousmane de répondre en français par deux phases à Hadja Maï Niang : « tu sais ma fille, un peintre, s’il ne sait pas harmoniser les couleurs, il va commettre beaucoup de dégâts en terme de gâchis » ; « Quand tu le veux, tu le sais ; quand tu le sais, tu le peux ; quand tu le peux, tu le fais ». Cf. Les propos et leur contexte de production dans l’Emission « Entretien » de la chaîne de télévision 2STV in. https://www.youtube.com/watch?v=XF-0XN5kajI&t=262s: mot-clé : Entretien avec Hadja Maï Niang (mars 2017).
2. https://cgt.fercsup.net/les-dossiers/enseignement-superieur/loi-lru-pecresse-2007/
3. https://www.sudquotidien.sn/modernisation-et-transformation-du-secteur-agro-environnemental-une-nouvelle-ufr-voit-le-jour-a-luidt/
(« … indique un communiqué qui nous est parvenu hier, vendredi 7 février ». (2025) : c’est nous qui ajoutons : 2025.
4. « Communiqué à l’attention des Camarades – SAES –Coordination Campus de Thiès du 10 juin 2025. » Le document issu, en filigrane, de ces données étant destiné aux militants du SAES ; nous ne pouvons nous permettre d’en publier.
5. Le bloc des Guides du REESAO version novembre 2015- Formation LMD ; Référentiel, codification, élaboration du Syllabus de l’UE et de l’EC). In. https://www.lecames.org/wp-content/uploads/2023/11/Referentiel-developpement-SI-CAMES.pdf
6. Rapport général de « Formation locale de base en didactique des enseignements dans les disciplines liées aux nouvelles filières porteuses des institutions d’enseignement supérieur, tenue du 17 au 21 mai 2016 à Dakar ; le Rapport général de la session de formation sur le thème « Formation didactique sous régionale de niveau supérieur des enseignants formateurs dans les disciplines liées aux nouvelles filières porteuses des institutions d’enseignement supérieur » organisée dans le cadre du Projet d’Appui de l’Enseignement Supérieur (PAPES) – CAERD- BAD- UEMOA – tenue du 1er au 12 août 2016 à Ouagadougou.
7. tps://cgt.fercsup.net/les-dossiers/enseignement-superieur/loi-lru-pecresse-2007/, op.cit. en ligne. Page consultée le 20 juin 2025.
[1] Pour toute référence, consultez la page 5-5.[2]