Les récentes réactions suscitées par le discours en anglais du président Bassirou Diomaye Faye au Kenya soulignent la nécessité d’une meilleure sensibilisation aux réalités linguistiques. Les commentaires observés sur les réseaux sociaux traduisent une méconnaissance d’un phénomène pourtant bien documenté en linguistique : l’ethnolecte.
L’ethnolecte désigne une variante d’une langue influencée par l’origine culturelle, ethnique ou linguistique du locuteur. Il ne s’agit pas d’une erreur ni d’un manque de maîtrise, mais d’une empreinte identitaire naturelle. Chaque être humain parle une langue avec l’empreinte de son territoire, de son histoire et de sa culture d’origine (habitus). Cela confère à sa parole une authenticité propre et n’enlève rien à la qualité de la communication.
Dans un monde multiculturel, l’accent n’est pas un handicap, mais un marqueur de diversité. Des dirigeants du monde entier s’expriment en anglais avec des accents variés, sans que leur légitimité ne soit remise en cause. Cette diversité linguistique est le reflet de la richesse humaine et culturelle des nations.
Il importe donc de valoriser les identités linguistiques africaines au lieu de les déprécier.
Se moquer d’un accent revient à nier une partie de cette identité. Le débat doit dépasser les formes superficielles pour reconnaître la valeur universelle de la pluralité linguistique et la légitimité des dirigeants africains à s’exprimer dans les langues internationales avec leur propre marque culturelle.
Le respect de la diversité linguistique est une exigence de dignité, de souveraineté et d’ouverture au monde.
L’essentiel n’est-il pas de communiquer clairement, dignement et avec assurance ?
Halimatou Dia
Socio-anthropologue des arts et de la culture
Tivaouane, le 22 octobre 2025