L’hôpital Cheikh Ahmadoul Khadim de Touba se démarque dans le paysage sanitaire sénégalais grâce à son service de radiothérapie qui prend en charge les patients atteints de cancers. Le Dr Maïmouna Mané, oncologue radiothérapeute et chef du service d’oncologie radiothérapie, relève le défi de soigner des dizaines de femmes atteintes de cancer du sein chaque jour, ainsi que des enfants.
Il est 13 heures passées au service d’oncologie du Centre hospitalier national Cheikh Ahmadoul Khadim de Touba. L’effervescence matinale commence à tomber, laissant place à une atmosphère plus calme. Les patients sont moins nombreux. Les couloirs sont animés par le bruit des machines médicales et les conversations discrètes entre les soignants et les patients. Cependant, il semble difficile de trouver des femmes atteintes de cancer disponibles pour partager leur histoire.
Grâce à l’intervention d’un médecin, nous avons pu rencontrer une jeune femme d’environ 40 ans, qui préfère garder l’anonymat. Originaire de Diourbel, elle lutte contre le cancer du sein depuis 2022. Elle accepte de partager son histoire, espérant peut-être aider d’autres femmes à faire face à cette maladie.
A lire aussi : Lutte contre le cancer du sein à Touba : les femmes invitées à pratiquer l’autopalpation
Cette femme a fait preuve d’une grande vigilance en consultant un médecin dès l’apparition des premiers symptômes, notamment en raison de ses antécédents familiaux de cancer du sein.
« En 2022, j’ai commencé à ressentir des douleurs au sein, ce qui m’a amené à effectuer des autopalpations. Lorsque j’ai constaté une déformation, j’ai immédiatement pensé à la possibilité d’un cancer du sein, étant donné que des membres de ma famille ont déjà été touchés par cette maladie. Pour obtenir un diagnostic précis, j’ai décidé de passer une mammographie à l’hôpital Matlaboul Fawzeyni », a-t-elle expliqué.
La mammographie a permis de détecter la présence du cancer à un stade précoce, ce qui a facilité la mise en place d’un traitement approprié. Son parcours de soins, de l’hôpital Matlaboul Fawzeyni à l’hôpital Cheikh Ahmadoul Khadim, montre qu’elle a bénéficié d’une prise en charge médicale adéquate pour lutter contre la maladie.
Le dépistage précoce, la clé pour augmenter les chances de guérison
« Le dépistage précoce est la clé pour lutter contre le cancer du sein. Lorsqu’on détecte la maladie à un stade précoce, les chances de guérison sont significativement meilleures », souligne la patiente.
Malgré les défis qu’elle rencontre, elle continue de se battre et de chercher de l’aide pour faire face à cette épreuve. En revanche, elle estime que si la maladie se propage, le traitement devient plus compliqué. Il est donc essentiel de sensibiliser les femmes à l’importance du dépistage régulier et de l’autopalpation pour détecter les anomalies le plus tôt possible.
Son témoignage est un appel à l’action pour toutes les femmes de prendre soin de leur santé et de ne pas négliger les signes avant-coureurs. En partageant son expérience, elle espère encourager les autres femmes à être proactives dans la prévention et la détection précoce du cancer du sein.
Toutefois, elle sollicite l’aide du gouvernement pour que les femmes atteintes de cancer puissent bénéficier d’une prise en charge adéquate.
Renforcer le soutien aux malades
« Le traitement du cancer du sein est coûteux, malgré la prise en charge partielle par les structures de santé. Nous lançons un appel aux autorités pour qu’elles renforcent leur soutien aux femmes atteintes de cette maladie, en particulier en ce qui concerne la prise en charge financière et l’accès aux soins de qualité », clame-t-elle.
Au sein du service d’oncologie du Centre hospitalier national Cheikh Ahmadoul Khadim, environ une cinquantaine de femmes sont prises en charge quotidiennement.
Selon le Dr Maïmouna Mané, chef du service, la capacité d’accueil est actuellement limitée à 55 patients par jour en radiothérapie. Les statistiques montrent que le cancer du sein est la localisation la plus fréquente, suivie du cancer du col de l’utérus et ensuite du cancer de l’ovaire.

Le Dr Maïmouna Mané souligne que la radiothérapie est un traitement crucial pour les patients atteints de cancer, mais que la demande dépasse largement l’offre. En effet, il n’y a que deux structures publiques qui offrent la radiothérapie au Sénégal, ce qui entraîne une longue liste d’attente.
« Lorsque les deux structures fonctionnent à pleine capacité, la liste d’attente diminue, mais dès qu’il y a une panne ou un dysfonctionnement, la situation se dégrade rapidement. À l’hôpital Cheikh Ahmadoul Khadim, la liste d’attente peut atteindre des chiffres alarmants, avec jusqu’à 400 ou 600 patients en attente de traitement », le Dr Maïmouna Mané, oncologue radiothérapeute à l’hôpital Cheikh Ahmadoul Khadim.
Toutefois, elle annonce l’arrivée d’un nouvel appareil de radiothérapie externe de type VMAT (Arcthérapie volumétrique par modulation d’intensité), une technique de pointe pour traiter les cancers avec plus de précision. Cette nouvelle technologie, combinée à du matériel et des accessoires supplémentaires, permettra à l’hôpital d’augmenter sa capacité d’accueil de patients, passant de 50 à 80 patients par jour.
Selon Dr Mané, avec cette nouvelle technologie, les traitements deviendront ainsi « plus efficaces et moins toxiques ». Elle espère que ces améliorations seront opérationnelles avant la fin de l’année 2025, grâce au travail acharné du ministère de la Santé et de la Direction des infrastructures.
Prise en charge des enfants malades du cancer, un défi
Le Dr Maïmouna Mané attire également l’attention sur un problème crucial : les cancers de l’enfant, qui, selon elle, représentent 1% des cas de cancer et sont souvent négligés malgré leur gravité. Malheureusement, dit-elle, ces cancers sont souvent masqués par ceux de l’adulte, ce qui entraîne une prise en charge insuffisante due au manque de spécialistes et d’infrastructures.
Elle a précisé qu’actuellement, le service d’oncopédiatrie de Dalal Diam est le seul à prendre en charge les enfants atteints de cancer. Cependant, lorsque ces enfants ont besoin de radiothérapie pour augmenter leurs chances de survie, ils sont dirigés vers l’hôpital Cheikh Ahmadoul Khadim.
Pour leur donner la priorité, les enfants sont intégrés directement dans le circuit de radiothérapie, ce qui malheureusement allonge la liste d’attente pour les adultes. La prise en charge des enfants atteints de cancer nécessite un dispositif particulier, notamment pour les séances de radiothérapie.
Selon le Dr Maïmouna Mané, pour maintenir les enfants immobiles pendant les séances, il est souvent nécessaire de les anesthésier. Cela signifie qu’un enfant qui doit suivre 14 séances de radiothérapie devra être endormi 14 fois, ce qui nécessite la présence d’un anesthésiste à chaque séance.
Malheureusement, l’hôpital Cheikh Ahmadoul Khadim ne dispose pas des ressources nécessaires, notamment en termes d’anesthésistes et de matériel. En conséquence, l’hôpital ne peut prendre en charge que deux enfants par mois en radiothérapie, en attendant une amélioration de la situation.
Birane Diop (Correspondant)



