Directeur des services techniques de la Ville de Dakar, Cheikh Oumar El Foutiyou Bâ revient dans cet entretien sur les défis liés à la gestion du patrimoine urbain, notamment les cimetières. Il est revenu sur la sécurité, la numérisation et la pression foncière entre autres défis auxquels ces lieux sont confrontés.
En quoi consiste le travail des services techniques de la Ville de Dakar au niveau des cimetières ?
Nous prenons en charge la gestion de l’ensemble du patrimoine de la Ville. Il se compose de plusieurs secteurs dont l’immobilier, les réseaux d’éclairage public, les espaces verts, les feux de signalisation, les canaux à ciel ouvert pour le drainage des eaux pluviales, etc. Il y a également la gestion du patrimoine immobilier notamment les cimetières départementaux.
Il existe quatre, deux fonctionnels (cimetière catholique de Saint-Lazare et musulmans de Bakhiya de Yoff) et deux autres fermés (Bel Air pour les Catholiques et Abattoirs communément appelé Soumbédioune pour les musulmans).
Quel est l’état de nos cimetières actuellement ?
Il faut rappeler qu’avec la nouvelle équipe municipale installée en 2022, nous avons inscrit la gestion des cimetières comme une super priorité. Nous avions trouvé une situation alarmante, du point de vue sécuritaire, de l’aménagement et aussi la gestion administrative. Par la suite, nous avons axé notre intervention sur ces trois leviers-là. Améliorer la sécurité dans ces cimetières, leur gestion administrative, l’enregistrement des enterrements, le circuit du déclarant, etc.
Aussi, il important pour nous de travailler davantage sur l’aménagement, l’aspect esthétique, la fonctionnalité des espaces à l’intérieur de ces cimetières-là, pour en faire effectivement des lieux de vie.
Quels étaient les défis sécuritaires ?
Le premier constat c’est que les cimetières n’étaient pas éclairés la nuit. Les lieux étaient un repli pour les brigands, des voyous qui commettaient des forfaits et s’y retranchaient.
Il y avait aussi des actes criminels qui s’y déroulaient, notamment la profanation des sépultures. Ainsi, la première intervention était de sécuriser, à travers l’éclairage, au niveau d’abord de Yoff et ensuite de Saint-Lazare.
Après, nous avons dû réhabiliter les murs de clôture, les enceintes et déployer des équipes de la brigade des volontaires pour la surveillance. Dernièrement, nous avons déployé un système de vidéosurveillance pour plus de sécurité. Vous avez aussi évoqué une évolution dans la gestion administrative, notamment l’archivage.
Comment cela va se passer concrètement ?
Ce qu’il faut dire à ce niveau, c’est que l’archivage était manuel. A notre arrivée, nous avons introduit le numérique. Actuellement, nous sommes en train de travailler avec une start-up, pour développer une application, qui nous permettra d’approfondir l’archivage numérique et de le généraliser, à travers une plateforme personnalisée, qui appartiendrait à la Ville de Dakar, pour la gestion numérique des cimetières.
Cette plateforme va offrir un service public, et aider les usagers à y accéder gratuitement partout dans le monde. Ces derniers pourront identifier ou localiser exactement l’emplacement de la tombe de leur parent, à travers des outils de géolocalisation.
Quelles dispositions avez-vous prises quant à la construction des tombeaux ?
Il y a de nouvelles dispositions qui ont été prises, et seront appliquées dans un futur proche, au niveau de la réserve de Yoff et peut-être dans les cimetières chrétiens qui seront aménagés. Pour optimiser le foncier qui est très serré au niveau de Dakar, il ne sera plus permis de faire des constructions. Pour ce qui concerne la réserve qui va être aménagée au niveau de Yoff, nous allons commencer à enterrer comme à Bakhiya de Touba.
Actuellement, nous travaillons sur un modèle de stèle uniformisé et harmonisé comme dans les cimetières militaires américains. La Ville va faire la proposition et les familles vont pouvoir en disposer moyennant une somme symbolique. De telle sorte qu’au niveau de la réserve, vous n’aurez plus de constructions, mais des stèles uniformisées.
Cela renverrait au principe d’égalité et d’équité. C’est l’objectif qui est recherché parce qu’actuellement, si on regarde comment est configuré le cimetière, on voit nettement la famille aisée, celui qui n’a pas de moyens. Nous sommes en train de travailler à enlever ça. De plus, à Dakar, on ne peut plus étendre le cimetière.
Nous avons 26 hectares qui sont pratiquement consommés pour les trois quarts.
Le cimetière de Saint-Lazare est-il arrivé à saturation ?
Il faut savoir que là-bas, le problème est beaucoup plus aigu. La pression foncière est plus perceptible. Car, chez les chrétiens, il y a des constructions qui ne peuvent être enlevées.
L’espace s’étend sur environ 11,77 ha et ce n’est pas grand. On y reçoit des fidèles chrétiens de tous horizons. La seule alternative possible, c’est de faire en sorte que celui de Guédiawaye soit opérationnel. C’est un espace qui a été déjà acquis, mais il reste quelques aménagements que la Ville de Guédiawaye doit faire pour son ouverture. Je crois que les démarches ont été entamées par le Comité de gestion des cimetières catholiques de l’Archidiocèse de Dakar (Cogesic).
Propos recueillis par Daouda DIOUF