Ouvert en mars 1997, le cimetière catholique Saint Lazare de Béthanie fait face aujourd’hui à un manque d’espace. Cette situation, d’autant plus inquiétante, préoccupe les gestionnaires des cimetières chrétiens qui appellent à son extension et à la mise en fonction du cimetière de Guédiawaye nouvellement construit.
Dans les allées qui mènent au cimetière Saint-Lazare de Béthanie, les va-et-vient frappent le visiteur. Les uns sont à pied, tandis que d’autres stationnent leurs véhicules au parking d’en face. Ce rite habituel, pour venir formuler des prières aux défunts, est un grand signe d’honneur et de respect envers les morts. D’après Pascal Dionne, président du Comité des gestionnaires des cimetières chrétiens (Cogecic), tous les jours des familles viennent se recueillir auprès de leurs défunts. Toutefois, ce lieu réservé à la communauté chrétienne, est confronté à un problème d’espace.
Ce site de 16 ha ne dispose maintenant que de quelques poches, dont la majeure partie est déjà réservée et d’après les gestionnaires, le cimetière va devoir fermer faute de places. À l’entrée, un bâtiment de deux étages est aménagé et occupé par des gestionnaires qui veillent au grain. Ils sont chargés du contrôle et du bon fonctionnement. Ici, les gens viennent dans la plupart du temps pour une réservation. Habib Sagna, l’un des gestionnaires, est chargé de recevoir leurs demandes et d’étudier les dossiers. « Aujourd’hui, je peux vous dire que le cimetière Saint-Lazare de Béthanie est plein à 97 %. Il nous reste peu d’espace pour les enterrements et nous avons des difficultés pour trouver quelques poches », renseigne Habib Sagna.
Pour lui, la cause est liée à la période de la pandémie Covid-19, durant laquelle les enterrements avaient triplé. D’après lui, il urge de trouver des solutions pour l’extension du cimetière de Saint Lazare. « De manière générale au Sénégal, partout où l’on programme des cités ou des habitations, il faut prévoir des cimetières. On a tendance à faire des aires de jeu, des espaces de loisirs, des marchés, entre autres, mais on pense rarement au cimetière et c’est notre dernière demeure. Une raison de plus pour les inclure dans les politiques d’aménagement », fait-il savoir.
L’ouverture du cimetière de Guédiawaye, la solution
Un homme vient pour enregistrer le corps de son cousin en provenance de Rufisque. « Tous les chrétiens de la région Dakar amènent leurs morts ici. Ce qui fait que Saint Lazare se remplit très vite», assure Habib Sagna. Pour juguler ce problème, le Cogecic avait pris les devants avec l’implantation d’un autre cimetière à Guédiawaye. Mais jusqu’ici, celui-ci n’a pas encore étrenné sa première pierre tombale.
Selon Pascal Dione, le président du Cogecic, le cimetière de Guédiawaye, conçu comme bouée de sauvetage, est déjà clôturé. Cependant, énumère-t-il, les infrastructures minimales pour son exploitation comme l’adduction d’eau, l’alimentation électrique, les bureaux et les toilettes tardent à se faire. «D’ici le mois de décembre, nous allons fermer le cimetière Saint-Lazare de Béthanie, parce qu’il reste peu de places. Maintenant, nous demandons aux autorités de rendre fonctionnel celui de Guédiawaye en guise de solution, avant sa fermeture », dit-il.
Sur les lieux, le constat est vite fait. Le cimetière est quasi plein. Il ne reste que quelques petites portions de terre. Dans les coins et recoins, les visiteurs arpentent les différents chemins à la recherche de tombes de leurs parents, amis, etc. Certains qui n’ont pas une maîtrise parfaite des lieux sont aidés par des gens qui travaillent dans l’entretien des tombes. En y pénétrant, une atmosphère de calme et de recueillement s’impose aussitôt. Une tranquillité plate y règne. Ici, même le bruit est mort.
Ce lieu sacré, empreint de sérénité, témoigne d’un lien indéfectible entre les vivants, et ceux qui les ont quittés. Les allées, bordées de pierres tombales alignées avec soin, invitent au recueillement. Loin de l’agitation du monde extérieur, ce lieu semble suspendu dans le temps, comme une passerelle entre la terre et le ciel. Les tombes, bien ordonnées, portent des croix, symboles de la foi chrétienne, ainsi que des inscriptions gravées à la mémoire des défunts. Ici et là, des bouquets de fleurs sont déposés.
Un espace, deux mondes : la vie et la mort
Certaines stèles sont même ornées de photos. De temps à autre, le silence est troublé par le chant des oiseaux ou encore le bruissement des feuillages. Le cimetière, loin d’être un lieu triste, est aussi perçu comme un lieu de paix et de mémoire, où la foi et l’amour unissent les vivants et les morts dans une profonde communion spirituelle. Michelle Mendy est une jeune fille venue formuler des prières à l’endroit de son défunt père. Assise confortablement sous un arbre, elle tient à la main une belle fleur de couleur rose.
Celle-ci, dit-elle, va être déposée sur la tombe de son papa disparu il y a un an. Le visage triste, elle a les yeux souvent baissés ou perdus dans le vide. Le chagrin de perdre un être est passé par là. C’est un visage qui parle sans mots exprimant ainsi une solitude. Néanmoins, la jeune fille a bien pris note du manque d’espace au cimetière Saint-Lazare. « J’ai bien remarqué ce fait. Le cimetière n’a plus de places et il faut vite remédier à cela », constate-t-elle.
Bada MBATHIE