La campagne électorale s’est achevée vendredi à Bissau, où les douze candidats engagés dans la présidentielle de ce dimanche ont tenu leurs derniers meetings. Plus de 966 000 électeurs sont appelés à élire le prochain président de la République ainsi qu’un nouveau Parlement de 102 sièges, dissous depuis 2023 après une présumée tentative de coup d’État.
Ces élections, reportées à 2025 pour « raisons de sécurité », se déroulent sans le PAIGC, parti emblématique de l’indépendance, écarté par la Cour suprême pour dépôt tardif des dossiers. Son exclusion — ainsi que celle d’autres coalitions d’opposition — suscite de vives critiques et alimente les soupçons d’un processus taillé pour favoriser le président sortant, Umaro Sissoco Embaló.
Le PAIGC a finalement apporté son soutien à Fernando Dias, candidat indépendant issu du PRS, devenu le principal rival d’Embaló. Les rues de Bissau affichent cette polarisation, entre t-shirts à l’effigie du président et bonnets traditionnels d’Amílcar Cabral arborés par les partisans de Dias.
Embaló mise sur les infrastructures : routes rénovées, bâtiments publics modernisés, réhabilitation de l’aéroport et inauguration, en 2025, de la première autoroute du pays. Il promet également la construction du port commercial de Bandim, projet jugé stratégique pour dynamiser les pêches et ouvrir de nouveaux corridors commerciaux.
Malgré une croissance annoncée de 4 % du PIB en 2023, les économistes soulignent la persistance de la pauvreté : une large majorité vit avec moins de 800 francs CFA par jour, alors que le salaire minimum plafonne à 500 000 francs CFA.
La campagne a été marquée par des exclusions politiques, des dénonciations d’agressions contre des militants et l’expulsion de journalistes portugais (Lusa, RTP, RDP). Plusieurs acteurs de la société civile dénoncent un contexte liberticide et une justice « instrumentalisée ».
Dans ce climat tendu, Fernando Dias s’impose comme la figure de l’opposition, soutenu par Domingos Simões Pereira. Il promet d’appliquer le programme du PAIGC et de réformer un système jugé verrouillé.
Tous les candidats s’accordent sur la nécessité de transformer l’économie dominée par la noix de cajou, peu industrialisée, et de moderniser un secteur halieutique dont 90 % des captures sont débarquées… à Dakar, faute d’infrastructures nationales. La participation des femmes reste marginale : aucune candidate à la présidentielle et un seul parti dirigé par une femme, malgré une loi de parité adoptée en 2018.
À la veille du vote, les autorités ont renforcé le dispositif sécuritaire : fermeture de l’espace aérien, patrouilles militaires et axes bloqués dans la capitale. Les Guinéens, échaudés par des décennies d’instabilité et de coups d’État, aspirent avant tout à la paix, à des services publics dignes et à des emplois pour les jeunes.


